jeudi 6 septembre 2012

2 mai 2008: le jour où tout a basculé

4e de couverture: "C'est moi qui ai eu l'idée de la liste. Je n'ai jamais voulu que quelqu'un meure. Est-ce qu'un jour on me pardonneras ?"

C'est ce que pense Valérie, effondrée après un drame inexplicable survenu au lycée. Son petit ami, Nick, a ouvert le feu dans la cafétéria, visant un à un tous les élèves de la liste. Cette fameuse liste qu'ils ont écrite pour s'amuser et où figurent ceux qui étaient odieux, lâches, méprisants dans l'établissement. Maintenant, ils sont blessés ou morts. Et Nick s'est suicidé, emportant son secret pour toujours. Mais Valérie elle, est toujours là, enfermée dans une bulle de questions sans réponses? Jusqu'au matin, où elle se lève et quitte sa chambre pour retourner au lycée...


Encore un roman Young Adult qui se transforme en coup de coeur. Mais aussi un roman coup de poing, qui ne laisse pas indifférent, bien au contraire.
Dès sa sortie, j'ai voulu avoir ce roman dans ma bibliothèque: le sujet grave abordé dans "Hate List" m'interpellait. Je l'ai acheté lors du salon du livre de Paris puis l'ai laissé dormir quelques mois avant de le sortir, sans le faire exprès au moment de la rentrée des classes.

Jennifer Brown a eu la bonne mais difficile idée de s'approprier l'évènement de la fusillade de Columbine  pour nous livrer ce roman psychologique percutant qui vous interpellera.

Dès le début de ma lecture, j'ai fait un rapprochement avec le film de Gus Van Sant "Elephant".  Tous deux m'ont mis mal à l'aise, surtout au moment de la fusillade par Nick dans le roman, ce fameux 2 mai 2008: j'étais oppressé. Mais là où Gus Van Sant a filmé cet évènement de manière clinique, froide, Jennifer Brown, par l'intermédiaire de Valérie et de ses souvenirs avec Nick, nous rend ses personnages et en particulier  le jeune "tueur" beaucoup plus humain.
Je vais peut être en choquer plus d'un mais Nick n'est pas un "tueur", c'est une victime et je me suis beaucoup retrouvé en lui. Moi même, j'ai été victime de brimades à l'école, étant même parfois le souffre-douleur de petits crétins qui se trouvaient cool. Mais alors qu'est ce qui fait que je ne sois pas passé à l'acte, au contraire de Nick: l'éducation?, le fait que j'ai été soutenu par une famille aimante?
Je n'ai pas la réponse à cette question.  Pas plus que Valérie qui se demande comment son meilleur ami Nick en est arrivé à cette extrémité. Le fait que l'auteur ai choisi la première personne pour raconter l'histoire m'a permis d'être en empathie avec Valérie: tout comme elle, je voulais comprendre. Mais Valérie veut surtout faire comprendre aux autres qu'elle n'y est pour rien.
Progressivement, elle va faire son petit bonhomme de chemin vers sa rédemption et faire changer la donne: retrouver  confiance en elle mais également retrouver la confiance de son entourage et en particulier de sa mère. Elle va grandir simplement.

Personne ne m'a tapé sur les nerfs dans ce roman sauf le père de Valérie. Je l'ai vraiment détesté ce type: il ne mérite pas d'avoir des enfants. Pour moi ce fut un beau salaud qui ne croit même pas en sa fille, qui ne pense qu'à son petit confort avec sa maitresse. Même elle se préoccupe plus de Valérie que son propre père. Je lui aurait fichu mon poing dans la figure bien volontiers. Ce n'est pas un père, c'est un homme égoïste, qui ne pense qu'à sa petite personne (tout ce qu'il reproche à sa fille en fait!).

La Tuerie de Garvin survenue le 2 mai 2008 va redistribuer les cartes et faire changer les mentalités: on dit souvent que le lycée est un lieu important dans la vie d'un ado. C'est à ce moment là qu'on commence à construire sa vie d'adulte. Le lycée, c'est aussi l'enfer pour certains: une jungle qui vous étouffe pour mieux vous broyer. Les plus forts mangent les plus faibles...oui mais quand les plus faibles se soulèvent, c'est souvent à ce moment là que les drames arrivent.

Le moment le plus touchant du roman pour moi fut la visite de Valérie à Nick, au cimetière: le dernier adieu de Valérie à Nick, (qui s'est suicidé après la fusillade) fut très beau et très douloureux aussi.
Mais il y a surtout un passage qui est pour moi le plus magnifique du roman:

"Évidemment que M'man voulait qu'on se souvienne de Nick comme de son "fils bien aimé". Et évidemment, elle voulait passer le message de la façon la plus discrète possible, chuchotant ses mots à l'oreille de son fils en lettres minuscules gravées sur sa pierre tombale. A peine un murmure. Je t'ai aimé, mon fils. Tu as été mon bien-aimé. En dépit de ce qui s'est passé, je me souviendrai toujours de celui que j'ai aimé. Je ne t'oublierai jamais. (p.329)

Je n'ai pas pleuré une seule fois lors de ma lecture. Pourtant, dès que j'ai tourné la dernière page et laissé Valérie à son avenir et à sa nouvelle vie, les vannes se sont ouvertes et j'ai laissé couler mes larmes, comme un besoin de laisser retomber la pression qui m'a pesée tout au long de ma lecture.

 Je trouve que ce roman devrait être étudié au lycée car il pourrait changer beaucoup de chose et provoquer une prise de conscience chez tous les jeunes: des plus populaires jusqu'aux souffres-douleurs et autres bouc-émissaires.

Un roman essentiel, qui nous parle de l'adolescence et de ses combats, ses questionnements. Chacun de nous a connu ce que traverse Valérie: une tuerie dans un lycée n'est pas chose courante, heureusement, mais dans "Hate List", elle est le point de départ d'une remise en question que chacun d'entre nous connait un jour où l'autre.

Jennifer Brown: Hate List (Hate List), Albin Michel, collection Wiz, 389 pages, 2012









6 commentaires:

  1. deux livres ajoutés à ma LAL aujourd'hui à cause de toi, t'exagères pas un peu ? :p Ton billet donne encore plus envie de le découvrir en tout cas, je soumettrai le titre à la documentaliste du collège.

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    1. Même si je fais du mal à ta LAL, je suis ravi de t'avoir donné envie car je pense que,de par ta profession, ce roman peut t'interpeller. Et puis, je n'y peux rien si j'enchaine les coups de coeur en ce moment.

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  2. Oh et puis on ne va pas se plaindre des coups de coeur justement! Cc'est vrai que globalement, ce genre de faits d'hiver, qui arrivent quand même régulièrement aux Etats-Unis me fout toujours un peu la trouille... ça arrive en général plutôt au lycée qu'au collège mais au final on n'est quand même pas à l'abri de ce genre de choses... L'an dernier en 5e, j'avais un élève qui souvent me faisait penser à ce genre de gamin mal dans leur peau et bien je t'assure qu'il me "faisait peur" ... Pas dans le sens où je me sentais menacée moi-même, mais de ce qu'il aurait pu faire à ses camarade ... Résultat des cours il a été exclus de notre établissement pour vol de portable, "défécation" dans les urinoirs et parce qu'il a allumé un feu dans les wc... Il a à nouveau été exclus de son autre établissement parce qu'il a menacé une autre élève avec un couteau ... Que faire de ces enfants?

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    1. Merci d'avoir partagé cette anecdote. Je me pose également la question sur ces élèves mal dans leur peau et malheureusement, je n'ai pas la réponse.(Et la réponse n'est pas dans le livre.). Mais je comprend tout a fait ton 'malaise" envers cet élève.

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  3. J'aime beaucoup ton commentaire, qui me fait ajouter à ma LAL un livre que j'aurais laissé de côté sans toi.
    Et oui, que les adolescents sont cruels les uns avec les autres...

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    1. Je susi ravi que mon commentaire t'ai fait découvrir ce roman. En espérant qu'il te plaira quand il aura rejoint ta bibliothèque.

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