samedi 30 juin 2018

Souvenirs involontaires

4e de couverture: «  Il y a longtemps qu’on m’y incite  : vous devriez raconter votre vie, elle est passionnante  : vous en avez vu des choses et des gens, que ce soit dans le journalisme, la haute couture, la politique, dans le milieu littéraire, en amour  !  … 
Je croyais l’avoir fait  : en une centaine d’ouvrages, j’en ai abattu des sujets, analysé des sentiments  !
Que rajouter, comment y revenir  ?
De Jean-Jacques Servan Schreiber à Françoise Giroud en passant par le Brésil, et Saint-Tropez…
D’analyses en psychanalystes, avec Pontalis, Lacan, Dolto, et bien d’autres.
De Sagan à Camus et Nimier, de Sartre à Céline, de Liliane Bettencourt à François Mitterrand…
Du jury Femina à tous mes éditeurs  : Claude Gallimard, René Julliard, Jean-Claude Fasquelle, et bien sûr Claude Durand…, d’autres plus secrètement, que de personnages ont traversé – parfois durablement – ma vie  !
C’est la façon dont j’ai forgé mon destin et dont en retour il m’a construite et constituée que j’entreprends de raconter ici.
Qu’est-ce qu’écrire, sinon se donner en pâture au public  ?  »


Madeleine Chapsal est une écrivaine connue de bons nombres de français, et  même de ceux qui ne l'ont jamais lu,comme moi. 
La littérature a croisé ma vie il y a 34 ans, et ne l'a plus jamais quittée dès lors (j'avais 6 ans). 
Sans jamais  l'avoir lue, je connais Madeleine Chapsal depuis près de 30 ans. Ma mère, mes tantes ont toutes lu, un jour où l'autre l'un de ses livres. Mon regard a ainsi croisé son nom lors de mes pérégrinations dans les bibliothèques de mes proches. 

Quelle ne fut pas ma surprise, et mon bonheur de trouver dans ma BAL, son dernier livre. Enfin, j'allais avoir l'occasion de me plonger dans son écriture. Pourquoi alors ne pas l'avoir fait avant, en piochant dans la bibliothèque de mes proches. J'avais peur, tout simplement. Peur que ses livres ne me parlent pas, car trop jeune, ou trop garçon, pour pouvoir comprendre le regard d'une femme sur la vie d'une femme. Un grand mystère pour moi. 

Cette autobiographie, joliment titré Souvenirs involontaires n'aurait peut être pas vu le jour, si l'on avait pas demandé, à maintes reprises, à Madeleine de raconter sa vie passionnante. Tout simplement, parce qu'elle n'a fait que ça, à travers ses autres écrits. Ses romans étant inspiré de sa propre vie. 

J'ai beaucoup aimé découvrir la vie de Madeleine Chapsal, qui a vécu tant de choses et découvert tant d'univers qu'elle nous rappelle: le monde de la Haute Couture, par sa mère, créatrice de mode dans les années 20 et au delà, le monde de la presse avec la création de "L'Express" par son mari, Jean-Jacques Servan, Schreiber (JJSS), son expérience de juré littéraire au Prix Fémina,le monde de l'édition avec ses différents éditeurs,  ses amitiés avec Régine Deforges, Sonia Rykiel, Liliane Béttencourt. 
Par petites touches, Madeleine Chapsal déroule le fil de sa vie au gré de ses souvenirs, et le plus étrange, c'est que j'avais l'impression de croiser des connaissances, tellement les personnes croisées au fil de la vie, sont entré dans l'inconscient collectif, comme Sonia Rykiel, Régine Deforges, Françoise Dolto, Françoise Giroud , David Servan Schreiber (un grand médecin, le fils de son ex-mari, avec qui elle construisit une belle relation filiale, elle qui ne put jamais avoir d'enfant), François Mitterrand, Roger Nimier, Bernard Giraudeau, et tant d'autres. 
C'est aussi toute une époque, (celle du Paris de l'après-guerre jusqu'à aujourd'hui) que Madeleine nous dévoile à travers ses souvenirs. C'est fabuleusement bien écrit, de manière fluide, comme si cela coulait de source. L'écriture de Madeleine Chapsal, c'est comme si elle nous parlait à l'oreille pour nous dévoiler ses pensées les plus intimes. Puis, il y a aussi la notion du temps qui passe, inexorable, et la fin du livre est bouleversant, surtout quand elle évoque les êtres aimés, qui disparaissent progressivement (JJSS, David, François Mitterand, Bernard Giraudeau...) et qu'elle, est toujours là, à vivre pleinement et avec une certaine sérénité, sa vie...tout en gardant en soi l'envie d'écrire encore et encore. 

L'autre point que j'ai aimé dans ce livre, c'est qu'enfin, je lis une autobiographie, telle qu'elle devrait être écrite:au gré de ses souvenirs qui reviennent à la mémoire, de façon involontaire. En effet: le livre est constitué de petits chapitres très courts, entre deux et cinq pages, qui reviennent sur des moments de la vie de Madeleine: elle parle de sa mère, de son enfance, de son métier de journaliste, de sa rencontre avec Jean-Jacques, son mari, de ses voyages, au Brésil ou en Suisse, de ses éditeurs, de son expérience des Salons du Livre (d'ailleurs très intéressant de voir ça, d'un point de vue de l'auteur), de ses rencontres, de ses amours, et ce, au gré de sa mémoire. Alors il y a un petit fil chronologique, puisqu'elle commence à ses trois ans, pour aller vers aujourd'hui, mais, je pense que cela est un travail de montage, et qu'elle a d'abord écrit ce livre dans le désordre le plus complet au gré de ses souvenirs. Il n'y a d'ailleurs quasiment aucun dialogue et c'est normal: qui se souvient d'une conversation dans ses moindres détails, au mot près, qu'il a eu alors qu'il avait 20 ans ou 32 ans. Personne...à moins de les avoir enregistré, comme ce fut le cas pour les entretiens que Madeleine Chapsal eu avec Françoise Dolto ou André Malraux, par exemple. 
Le seul défaut de cet exercice qui consiste à se raconter, au gré de ses souvenirs, c'est qu'il y a certains événements répétés plusieurs fois dans le livre, donnant un aspect répétitif au livre. Un défaut qui n'en n'est qu'un, si comme moi, vous lisez le livre de manière continu. Je pense plutôt alors que c'est un livre qu'il faut picorer et découvrir en lisant un chapitre, de ci de là. 

Au final, un livre de souvenirs qui m'a fait découvrir une personne charmante, une femme amoureuse, et pleine de vie, rempli de joies, de doutes, et de larmes. Une femme qui nous ressemble et qui se livre à son public une énième fois. Je suis ravi d'avoir pu la découvrir et je dirai même que j'ai maintenant envie de découvrir certains de ses romans, pour continuer de suivre le chemin de cette grande dame de la littérature. 

Merci à Eric et aux Editions Fayard pour cette charmante découverte. 

Madeleine Chapsal: Souvenirs involontaires, Fayard, 432 pages, 2018



mercredi 27 juin 2018

La Discothèque du 20e siècle #275

En 1982, Philippe Lavil retrouvait le haut des classements des ventes avec ce titre.

Philippe Lavil: Il tape sur des bambous (1982)


Philippe Lavil a dû attendre une bonne dizaine d'année pour renouer avec le succès. Il tape sur des bambous, en effet, est sorti en 1982, c'est à dire 13 ans après Avec les filles, je ne sais pas. Mais quel succès! Sur une musique de Michel Héron et des paroles de Didier Barbelivien, Lavil donnait un bien bel aperçu de ce qu'était l'ambiance des Antilles. Au point que le single s'est vendu à plus de 1 800 000 exemplaires, avant que Julio Iglesias n'en fit un hit international. (Source: Fascicule "L'encyclopédie de la chanson française n°14", Universal Collections)

Bonne écoute!


mardi 26 juin 2018

L'invitation

4e de couverture: Lutte des classes, ambition politique, désirs refoulés et violence sourde… Une œuvre originale et parfaitement construite qui allie roman noir à la tension implacable et comédie sociale mordante, le tout porté par un humour grinçant tout britannique.
Ben Fitzmaurice est devenu le meilleur ami de Martin Gilmour le jour où, dans la cour de leur très chic école, Ben, héritier d’une prestigieuse dynastie, a pris la défense de Martin, petit boursier, fils unique d’une mère célibataire sans le sou. Depuis, Ben s’est fait un nom en politique, Martin est devenu critique d’art ; Ben a épousé la très parfaite Serena, Martin vit avec la très discrète Lucy. Et Ben est toujours le meilleur ami de Martin.
Ce soir, Ben fête ses quarante ans. Tout le gratin est présent. Martin aussi. Naturellement…

Le 4e roman d'Elizabeth Day, The Party, (l'invitation pour le titre français): oui, je préfère le titre original de ce roman et son triple sens qui vont être utilisé dans le roman (en anglais "the Party", peut être "une fête", "un parti politique" ou "la partie civile d'un procès"). 
Au départ, je n'avais pas été attiré plus que ça part ce roman (le résumé me paraissait une histoire classique que j'avais déjà lu où vu, donc je passe). Sauf qu'il a atterrit dans ma PAL grâce aux Editions Belfond et, je crois qu'elles me connaissent bien car, finalement, j'ai adoré ce livre. 
Alors, je vous le dis tout net, j'ai enlevé les références d'autres romans indiqués dans la 4e de couverture, et j'ai coupé les dernières phrases car elles en disaient trop sur le livre et aurait gâché la lecture. 
Car, ce qui retient mon attention avant tout dans ce roman, c'est sa construction diabolique. En effet, l'histoire débute dans un commissariat avec Martin qui est interrogé par la police à propos de la soirée d'hier soir (l'anniversaire de Ben Fitzmaurice, son meilleur ami) qui se serait terminé par un drame. Ainsi, Martin va raconter le déroulement de la soirée, sauf que celui ci sera entrecoupé de souvenirs d'enfance et d'adolescence de Martin, et du cahier que tient Lucy, la femme de Martin, qui se trouve dans une maison de repos après les événements de la soirée. 
Ainsi, l'auteure maintient un suspense insoutenable (un peu gâché si on  lit la 4e de couv' jusqu'au bout car l'un des événements raconté n'arrive que dans les 60 dernières pages du roman(!!), qui va nous plonger dans l'esprit complexe de Martin, cet être ambitieux, qui semble fort, mais qui est rempli de faiblesse. 
Il faut d'ailleurs, dire une chose: mis à part, Lucy, la plupart des personnages sont abjects dans ce roman: Martin est pathétique à vouloir avoir l'amitié de Ben, coûte que coûte, quitte à le suivre comme un petit toutou et à accepter des choses plus ou moins honnête de sa part. Ben est un être arrogant, l'archétype de l'aristocrate qui n'en a rien à faire des autres, sa femme Seréna est la pire de tous, glaciale, hautaine: honnêtement, j'ai plains cette pauvre Lucy qui doit la supporter. Puis, le petit monde qui tourne autour des Fitzmaurice, n'est pas meilleur. Il y a quelque chose de malsain dans ce roman, et j'ai eu du mal à m'attacher aux personnages. Heureusement, l'intrigue est assez accrocheur pour passer outre le caractère des personnages. 
Non, ce roman rempli parfaitement son rôle: c'est un thriller psychologique de bonne qualité (oui, thriller psycho, car une tension est là tout au long du roman qui tient bien en haleine) qui dépeint l'aristocratie anglaise dans ce qu'elle a de plus sombre. Elle nous fait entrer dans ce monde grandiloquent qui navigue entre richesse, et politique avec l'hypocrisie chevillé au corps. 
Il y a aussi cette tension perpétuelle, mais surtout une relation ambiguë entre Ben et Martin, à tel point qu'il y a des désirs refoulés qui vont refaire surface à un moment où à un autre. (D'ailleurs, en ce sens, cela m'a un peu rappelé "Maurice" de E.M. Forster (oui je fais une référence, mais elle ne vend quasiment rien sur le corps de l'intrigue). Une ambiance toute anglaise qui nous fait plonger dans les méandres des pensionnats anglais et navigué en eaux troubles dans la politique et l'aristocratie. Tout ce que j'aime.
En fait, Martin est un pur Rastignac (ah, une autre référence) qui va progressivement perdre ses illusions et qui, près de chuter, va tout faire pour tourner tout ceci en sa faveur. C'est purement diabolique, je vous dis! 
Si je n'avais qu'un seul petit bémol, sur ce roman, c'est sa fin ouverte: j'ai eu l'impression en la lisant, de n'être qu'aux prémices d'une historie de plus grande envergure. Disons,qu'il manque un affrontement entre Ben et Martin, qui ne viendra pas. Et je ne suis que frustration et n'ai qu'une envie: qu'il y ait  une suite! Ce qui est la preuve, s'il en est, que j'ai été happé par ce roman qui tient toutes ses promesses, et que je n'ai pas pu lâcher. Une très belle surprise que cette "Party" que je vous encourage à découvrir.

Merci aux Editions Belfond  d'avoir encore une fois fait mouche.

Elizabeth Day: L'invitation, (The Party), Belfond, 334 pages, 2018








dimanche 24 juin 2018

Les immortalistes

4e de couverture: New York, été 1969. Pour tromper l'ennui, les enfants Gold ne trouvent rien de mieux à faire que d'aller consulter une voyante capable de prédire avec exactitude la date de leur mort. Si Varya, Daniel, Klara et Simon veulent tous savoir de quoi demain sera fait, ils sont loin de se douter de ce qui les attend. Des années plus tard, hantés par la prophétie, ils vont faire des choix de vie radicalement opposés. Simon, le petit dernier censé reprendre l'entreprise de confection familiale, s'enfuit sur la côte ouest, en quête d'amour à San Francisco. Klara, la rêveuse, devient magicienne à Las Vegas, obsédée par l'idée de brouiller les pistes entre la réalité et l'imagination. Épris de justice, Daniel s'engage comme médecin dans l'armée après les attentats du 11 septembre. Quant à la studieuse Varya, elle se jette dans des travaux de recherche liés à la longévité, tentant désespérément de percer le secret de l'immortalité. Lorsque le premier d'entre eux trouve la mort à la date annoncée par la voyante, les trois autres craignent le pire. Doivent-ils prendre au sérieux cette prémonition ? N'est-ce la puissance de l'autosuggestion qui pousse les Gold à faire des choix qui les conduisent irrémédiablement vers leur mort ? 

Fresque de grande envergure, à l'ambition et à la profondeur remarquables, Les Immortalistes se situe entre le destin et le libre arbitre, le réel et l'illusion, l'ici-bas et l'au-delà. Une ode magnifique à ce qui nous échappe et à la force implacable des liens familiaux.

Quel sens donneriez vous à votre vie, si on vous prédisait la date de votre mort? 
C'est à cette question que Chloé Benjamin tente de donner un sens à travers le parcours de quatre frères et soeurs. 

Je dois dire que le pitch de ce roman me tentait beaucoup, car c'est un roman américain et j'aime toujours autant me plonger dans ma littérature de prédilection, mais surtout, j'étais impatient de voir comment l'auteure allait traiter ce sujet là: celui des choix de vie et comment ils peuvent être conditionné avec une seule phrase (et ici c'est une date). 

Je pense que c'est l'une des premières fois, où j'ai eu une lecture en dent de scie, avec des hauts et des bas. 
J'ai adoré le point de départ: le prologue qui nous présente Varya, Daniel, Klara et Simon chez la voyante, et surtout le fait que Chloé Benjamin ne nous révèle qu'une seule date sur la prédiction de la mort d'un de ses personnages (et c'est  celle de Varya), gardant le mystère des trois autres pour garder un peu de suspense. 
Puis vient la première partie concernant Simon, qui est ma préférée (et je ne dis pas ça parce qu'on apprend que Simon est gay, non), j'ai aimé sa jeunesse, sa fougue et son envie de vivre sa vie intensément, et ce, pour la bonne et simple raison que la voyante lui a prédit qu'il ne vivrait pas vieux. Donc ,il décide de vivre a cent à l'heure. On découvre alors le San Francisco de la fin des années 70, début 80, avec l'arrivée du Sida, le monde de la danse classique, mais aussi celui des boites et des gogo-dancers . Non, vraiment, cette première partie, lu très rapidement, fut une bonne augure pour la suite...sauf que...
La 2e partie sur Klara, a vu mon intérêt s'émousser. Je n'ai pas tellement adhérer à cette partie là, la trouvant parfois un peu trop surréaliste (dû au fait que Klara, hanté par la mort de son frère, voit sa santé mentale en prendre un coup), le personnage de Raj, qui deviendra son mari, n'est pas des plus sympathiques et le monde de la magie qui nous est présenté, n'est pas des plus reluisants. 
Je me demandais donc comment allait se passer la suite: eh bien, la troisième partie a vu mon intérêt renaître et j'ai lu la partie sur Daniel, très rapidement; Daniel devenu médecin, essaye de recoller les morceaux de sa vie, a fait que je l'ai lu rapidement, vu que  la petite partie du mystère de la voyante que Daniel essaye de retrouver tient tout de même en haleine.
Puis, il y a la dernière partie sur la soeur aînée, Varya (dont on connaissait la date de mort dès le départ) qui a été une montagne russe à lire, car, toute la partie scientifique développée dans cette partie m'a un peu laissé à la rue, moi, qui ne suis qu'un littéraire. Sauf que la révélation concernant un secret de Varya, a relancé mon intérêt avec une fin qui m'a beaucoup touché. 

Comme vous pouvez le voir, ce ne fut pas une lecture simple,mais tout de même stimulante. Il permet de se poser quelques questions et surtout celle ci: est ce que savoir quand on va mourir influence nos choix?: les personnages nous donne chacun une vision de ces prémonitions: Simon, qui sait qu'il va mourir jeune, décide de profiter de la vie à fond, Klara,qui, elle est un peu fragile psychologiquement va également être influencé par les événements (celui de la mort de son frère et l'échéance de sa propre fin). Daniel, lui fera tout pour ne pas y penser mais sera rattrapé par son passé qui le hante tout de même, faisant tout pour retarder l'échéance et Varya, qui elle sait qu'elle vivra longtemps (puisque la voyante lui prédit qu'elle mourra le 21 janvier 2044, à l'âge de 88 ans (je ne révèle rien de capital puisque l'auteure nous le dit dès les premières pages du livre) va mettre sa vie entre parenthèse et s'interdire de vivre. Ainsi, elle passe à côté de la vie, alors qu'elle sait, si elle décide d'y croire bien sûr, qu'elle aura une longue vie. 

Au final, un roman un peu inégal, qui m'a offert une lecture fait de hauts et de bas, mais qui permet de nous poser des questions sur les choix de vie et les croyances qu'on peut faire sur une prédiction, et le sens qu'on veut bien lui donner. Chacun est différent face à une révélation. C'est également la question du destin tout tracé: est ce que tout est déjà écrit d'avance, ou bien peut on inverser et influer sur le cours de notre vie? Vaste question. Un roman que je vous conseille toutefois, même s'il ne m'a pas procuré toutes les promesses que j'y avais mise. Je ne regrette cependant pas cette lecture et la découverte de cette auteure. En fait, je vous laisse libre de faire votre propre choix concernant la lecture de ce livre. 

Chloé Benjamin: Les Immortalistes, (The Immortalists), Stéphane Marsan, 405 pages, 2018



Slow Qui Tue #371: You might need somebody

Le slow qui tue de la semaine pourrait avoir besoin de quelqu'un.

Shola Ama: You might need somebody



Bonne écoute!


mercredi 20 juin 2018

La Discothèque du 20e siècle #274

En 1981, Hervé Cristiani arrivait sur les ondes avec  un titre qui allait résonner en cette année électorale.

Hervé Cristiani: Il est libre Max (1981)


Cet ancien du Petit Conservatoire de Mireille transite au milieu des années 70 par le circuit folk où il peaufine son style qui doit beaucoup au country-rock américain comme le prouvera son premier et unique tube, l'imparable Il est libre Max en 1981. Par la suite, Radio Bonheur, et Salve Regina lui vaudront sur cette lancée, un succès d'estime. (Source: Fascicule "La Discothèque du 20e siècle: 1981", Polygram Direct)

Bonne écoute!


lundi 18 juin 2018

L'île des absents

4e de couverture: Rester à la surface des souvenirs, ou tomber dans l'abîme
On l’appelle le Cauchemar. C’est un lac à l’eau noire et stagnante, quelque part en Suède, dont la légende raconte qu’il est maudit. Au milieu du Cauchemar, il y a un îlot. Sur cet îlot, Alex et la petite Smilla vont faire une promenade, tandis que Greta les attend dans la barque amarrée au rivage, puis s’endort. À son réveil, la nuit tombe et seuls retentissent au loin les cris lugubres des oiseaux aquatiques. L’homme et la fillette ont disparu. De retour dans le cottage que la petite famille occupe au village, Greta fouille chaque pièce et tente en vain de joindre Alex. En proie à la panique, elle décide de se rendre au commissariat. 
Premier thriller psychologique de Caroline Eriksson, "L'île des absents" tient toutes ses promesses. 
Je dois dire que le résumé de ce livre me tentait (même si ici, j'en ai coupé une partie pour vous laisser un peu de suspense car une révélation faite dans la 4e de couv,  arrive vers les 100 pages,(sur 236, cela arrive donc tardivement) et je m'y suis plongé avec plaisir mais aussi incompréhension. Car, au départ, l'auteur nous mène en bateau en accumulant les faux semblants, et nous fait naviguer entre passé et présent, dans la vie de Greta, pour mieux brouiller les pistes. Le lecteur est alors dans l'expectative, essayant de faire fonctionner ses méninges pour comprendre un tant soit peu l'histoire. Heureusement, plus on avance, et plus l'histoire s'éclaire, les révélations, fort nombreuses s'enchaînant à un rythme effréné. 
Caroline Erriksson se sert de ses connaissances en psychologie, pour développer son personnage féminin, troublant et troublée par ce qu'elle vit, en nous faisant plonger dans ses angoisses. Le lecteur est vraiment dans la peau de cette jeune femme qui vit un drame terrible: la disparition de l'homme de sa vie et de sa fille. Tout se délite autour d'elle et c'est par ce biais que le passé de Greta va nous être livré par petite touche, tout au long du roman. 
Autant vous dire que, malgré des débuts chaotiques, j'ai adoré ce thriller, que je n'ai pas pu lâcher avant la fin. Le rythme saccadé de l'auteur, faits de petites phrases percutantes nous tient en haleine et rend cette lecture hyper addictive. Il se dégage une angoisse permanente  dans ce huis clos étouffant qui va crescendo, jusqu'au climax du final qui vous laissera pantois. 
Greta est un personnage complexe, qui n'a pas fait le deuil de son passé et de la mort de son père, dont elle se sent coupable, et qui voit débarquer Alex, qui va prendre une place importante dans la reconstruction de sa vie. Sauf que la disparition de celui ci et de sa petite fille va faire resurgir toutes les blessures de Greta. Sa rencontre avec son "double", en la personne de cette jeune fille, qu'elle rencontre sur cette île (et qui porte le même prénom qu'elle), va la déboussoler encore plus, même si elle va tout faire pour la sortir dans l'engrenage où la jeune Greta se trouve piégée. 
Dans un huis-clos, le lieu de l'action à son importance: la petite ville de Marhem et son îlot sur ce lac appelé Le Cauchemar est parfaite car elle nous  plonge dans une ambiance angoissante dans laquelle, on se sent piégé, tout comme le personnage principal. 
Que vous dire de plus, sans trop en dévoiler, (ce qui n'est pas facile quand on parle d'un thriller)? Tout simplement que ce thriller psychologique est réussi et tient en haleine jusqu'au bout. Sa brièveté (moins de 240 pages) est une force car il va à l'essentiel et distille ses révélations les unes après les autres, à vitesse grand V. J'ai été happé par ce titre que j'ai lu en quelques heures, totalement essouflé par un final grandiose qui verra Greta affronter les monstres de son passé. Un très bon thriller psychologique qui tient toutes ses promesses pour un novice du thriller comme moi. Je ne suis pas près d'oublier ce dimanche passé sur cette île de Suède. J'en ai encore des frissons. 
Merci aux Editions Presse de la Cité pour cette haletante découverte. 
Caroline Eriksson: L'île des absents, (De Forsvunna), Presses de la Cité, 237 pages, 2018


dimanche 17 juin 2018

Les portes de mon imaginaire

4e de couverture: La relation de Guillaume de Tonquédec à la lecture est une longue histoire mouvementée, douloureuse autant que merveilleuse. Enfant, il peine à déchiffrer les mots, tâtonne dans un monde flou jusqu’au jour où une paire de lunettes bleues va tout changer et où la passion du théâtre l’entraîne, par des chemins de traverse, vers les grands textes.
Aujourd’hui, dans son univers, Molière, Shakespeare, Zweig et Buzzati côtoient Sylvain Tesson, le scénario de la série Fais pas ci, fais pas ça ou les Conversations avec Billy Wilder. Tous ont un point commun : ils sont des portes ouvertes vers l’imaginaire.
Avec générosité, le comédien de théâtre, acteur de télévision préféré des Français, couronné par un César, raconte ses difficultés mais aussi le travail, l’enthousiasme, les rencontres qui lui ont permis de les dépasser. C’est cette lutte silencieuse à l’issue heureuse qu’il souhaite partager, pour que tous les complexés, les dyslexiques, les timides apprivoisent à leur rythme les livres.


"Lire avant de dormir est une véritable fenêtre sur le rêve."  (p.88) 

La Collection "Des vies et des mots" mis en place par les éditions de l'Observatoire donne la parole à des artistes de tous horizons, pour nous parler de leur rapport à la lecture. Après Joann Sfar et Ariane Ascaride, c'est au tour de Guillaume de Tonquédec de nous ouvrir les portes de son imaginaire. 

Bon,je vous le dis tout de suite, je ne vais pas être très objectif dans ce billet. Je voue une admiration sans borne (presque amoureuse, si je dois être tout à fait honnête) pour Guillaume de Tonquédec depuis plusieurs années. Je partais donc déjà conquis par ce titre...et j'en sors complètement étonné et heureux. 
C'est une belle leçon de vie que nous donne à lire Guillaume. Son combat de tous les jours pour pouvoir apprivoiser la lecture (qui était un calvaire lors de son apprentissage en primaire, tout ça parce qu'il vivait dans un monde flou (un problème de vue qui n'a été décelé qu'en CM1) est des plus beaux et tellement rempli d'espoir  pour tous les jeunes qui n'aimeraient pas la lecture. 
Grâce à son envie de jouer et sa découverte du théâtre,  Guillaume a su conquérir la lecture et tout un monde s'est ouvert pour ainsi développer son imaginaire. 

J'ai été ravi de lire ce livre et de découvrir Guillaume par le prisme de la lecture. Je trouve cela très originale de se raconter à travers les livres qui ont traversé nos vies et qui nous ont forgés. 
Alors, il est vrai que ce livre parle beaucoup de théâtre (Molière y tient une grande part, ainsi que Shakespeare), du monde du spectacle et que si cela ne vous intéresse pas trop, vous n'allez peut être pas adhérer. Pour ma part, je m'y suis beaucoup retrouvé et y ai trouvé des clefs d'entrée pour pouvoir jouer (je vais avoir la chance de jouer dans une pièce de théâtre l'année prochaine et l'excitation et l'appréhension se mélangent dans ma petite tête. En fait, j'angoisse un peu et d'avoir certains conseils sont toujours les bienvenus): c'est rare, mais j'ai noté plein de passages qui m'ont interpellé (jamais je n'avais mis autant de post it dans un livre, notant, de ci de là, certaines phrases ou certains passages). 

Bien évidemment, quand vous ouvrez ce genre de livre, où un artiste vous ouvre les portes de sa bibliothèque, cela ne va pas faire du bien à votre PAL, et c'est ce qui m'est arrivé avec ce livre car j'ai noté certains titres que Guillaume donne envie de découvrir, comme la biographie de Marie Antoinette, écrite par Stefan Zweig, par exemple ou bien "Une soupe aux herbes sauvages" d'Emilie Carles. Il y a aussi Molière qui est souvent évoqué, car il a façonné le jeune comédien,  Guillaume, qui nous parle de son parcours chaotique pour cet éternel timide, qui aimerait bien casser l'image un peu lisse qu'il peut avoir. 
Mais il n'est pas seulement question de livres dans ce livre, mais aussi de scénarios qui ont croisée et changé sa vie comme celui de "Fais pas ci, fais pas ça", qu'il reçu alors qu'il était en tournée avec Isabelle Gélinas, et qui l'a enthousiasmé dès la première lecture, ou bien celui du "Prénom" qui changea également sa vie. 
Seulement que ce soit de scénarios ou de livres ou tout autre support écrit, il a toujours cette appréhension de la lecture, qui revient le perturber à chaque fois qu'il doit entrer dans une oeuvre, quelle qu'elle soit. 

"Lire un scénario ou une pièce de théâtre s'apparente chaque fois à une plongée en apnée profonde, souvent surprenante, toujours excitante. Même i avouons le, je dois encore aujourd'hui me faire violence: lire reste un exercice difficile. [...]Envahi par un sentiment contradictoire, j'oscille entre l'excitation d'une promesse, d'une nouvelle aventure et la sourde douleur qui rôde encore de devoir me frotter à un exercice dont j’appréhende les embûches. Lire un texte long, court, relié, aux pages volantes, sous forme e brochure ou de livret: peu importe, c'est une même sensation ambivalente! Mais une fois lancé, si le texte m'accroche je fonce; les mauvais souvenirs d'écolier s'évaporent à mesure que je m'enfonce dans l'intrigue, que je me laisse emporter par l'histoire".(P.167)

Il réussit alors à combattre cet handicap qui le poursuit sournoisement depuis l'enfance et qu'il réussit a vaincre dès lors qu'il est conquis. 

Guillaume de Tonquédec est un lecteur/noteur,(ce que je ne suis pas assez malheureusement et parfois je le regrette), qui, à l'aide d'agendas, va noter des phrases et des paragraphes qu'il aura glaner lors de ses lectures et qui vont le faire avancer dans sa vie de comédien. Ils nous en livre quelques unes dans le chapitre "Ceuillir, glaner, récolter.
"
Il nous explique également son rapport à la notoriété et le fait qu'il ne veut pas plonger dans une sorte de voyeurisme en se livrant trop. (D'ailleurs dans ce livre, il nous parle de son métier de comédien et non pas de sa vie privée et tant mieux, car ce n'est pas ce qui m'intéresse): "Pour ma part, j'ai choisi: moins on en saura sur moi, plus cela me permettra d'être le monsieur Tout-le-Monde dont parlait Billy Wilder." nous dit il en page 188. Et je trouve qu'il a mille fois raison. Ainsi, il peut composer tout un tas de personnages sans que sa propre image vienne phagocyter celui à qui il doit donner corps. 

Voilà un livre qui ne parlera pas forcément à tout le monde,tout simplement parce que l'artiste ne l'intéresse pas ou ne lui parle pas, le monde du théâtre ne lui dit rien, mais je pense tout de même,que pour les amoureux de la lecture, cette collection "Des vies et des mots" peut leur parler. Il suffit de trouver l'artiste qui vous plait et dont vous voulez découvrir l'univers. Pour ma part, je pense que je vais suivre attentivement la suite de cette collection. 

Au final, un beau livre sur un jeune garçon qui avait des difficultés dans l'apprentissage de la lecture et qui a réussi à les combattre grâce à sa découverte et son amour du jeu. Guillaume délivre un beau message d'espoir à toutes les personnes (jeunes ou moins jeunes) qui ont un rapport difficile à la lecture et aux livres.

"C'est abyssal d'angoisse, effrayant, et pourtant les grands auteurs peuvent nous tenir la main, nous aider à certains moments de nos vies alors qu'on ne s'y attend pas. Mes jeunes années de résistance à la lecture m'ont permis de développer, plus que d'autres, un monde imaginaire.[...] Mes lectures m'ont parfois aidé, poussé à prendre des décisions: elles m'ont permis de m'évader pour mieux revenir dans la réalité' (p. 210)

Tout est dit!  

Le livre de Guillaume de Tonquédec est un livre de chevet que je garderai près de moi précieusement et dont je relirai certains passages  de temps en temps.

Merci Guillaume de nous avoir ouvert les portes de votre imaginaire, afin de  nous livrer une belle leçon de vie. 


Guillaume de Tonquédec: Les portes de mon imaginaire, Editions de l'Observatoire (collection "Des vies et des mots"), 210 pages, 2018




Slow Qui Tue #370: Baby come to me

Le slow qui tue de la semaine est heureux d'avoir trouvé celle qu'il aime.

Patti Austin & James Ingram: Baby come to me



Bonne écoute!


vendredi 15 juin 2018

Les enfants du dernier salut

4e de couverture: En 1942, Colette a 22 ans et elle est étudiante en médecine à l’hôpital Rothschild de Paris. En fait d'hôpital, c'est plutôt l'antichambre de l'enfer puisque les Juifs qui passent par cet établissement sont ensuite envoyés dans les camps de la mort.

Face à l’atrocité de la situation, Colette intègre un réseau d’évasion qui permet aux enfants de l'hôpital d’échapper à la déportation. Car, si personne ne sait vraiment ce qui les attend, on connaît l’horreur du transport, entassés pendant des jours dans des wagons sans eau et sans vivres.

Pour sauver ces enfants, le réseau truque les registres ou déclare décédés des nourrissons que l'on fait sortir en passant par la morgue... Malgré les soupçons des Nazis et plusieurs arrestations, des centaines d'enfants sont ainsi sauvés. Dernier membre vivant de ce réseau, Colette témoigne dans ce document bouleversant et essentiel.


En hommage à Claire Heyman, assistante sociale à l'hôpital Rothschild, et à une grande partie de l'équipe de cet hôpital, qui durant la guerre a sauvé des centaines d'enfants juifs, Colette Brull-Ulmann, jeune interne à Rothschild en 1942 (et qui elle même a participer à ce réseau) a décidé de laisser une trace écrite de ces gens formidables, dont on avait aucun témoignage. 

La Seconde Guerre mondiale est un terreau formidable d'histoires dans lequel on ne cessera jamais de retrouver des traces. A chaque fois que je lis des témoignages ou des livres sur cette période, j'y découvre toujours de nouveaux éléments. 
Ce fut le cas avec le témoignage de Colette Brull Ulmann: une  jeune femme juive, qui durant la guerre, alors qu'elle préparait ses études de médecine, s'est retrouvée dans cet hôpital qui était le seul à accepter les médecins juifs (chose que j'ignorais totalement) et qui est devenu un hôpital de transit où beaucoup de juifs de Drancy, étaient amené pour se faire soigner, mais qui repartaient pour Drancy ensuite. C'est alors qu'entre en scène Claire Heyman, assistante sociale, qui, de par ses connaissances administratives, sauvera plusieurs enfants juifs, en les faisant s'évader de l'hôpital par la morgue, et les faire "disparaître" aux yeux de l'administration. 

Voici un témoignage bouleversant, qui ne vous laissera pas indifférent. Colette y parsème ses souvenirs, d'avant, pendant et après la guerre. Elle nous raconte sa famille, son père, héros de guerre, travaillant au ministère de la guerre et qui va se retrouver interné à Drancy, en 1941. C'est alors, la peur au ventre, mais le courage chevillé au corps que Colette et les siens vont apprendre à survivre dans ce Paris en guerre. Il y aura la Rafle du Vel' d'Hiv qui nous sera racontée par Colette. Puis son engagement dans la résistance. Cette femme est d'un courage qui force l'admiration, prenant tous les risques pour combattre les cruautés, ayant pourtant un seul regret qui la ronge encore aujourd'hui: ne pas avoir sauvé Danielle, cette petite fille juive qui a vécu plusieurs mois à l'hôpital,  avant qu'un médecin français vendu aux boches, n'en décide autrement. (Danielle, c'est la petite fille sur la photo de couverture, comme pour en garder un souvenir impérissable). 

Heureusement qu'il n'y avait pas que des salauds à l'époque et Mademoiselle Damengout en est un bel exemple. Ah, Gougoute (comme on la surnommait affectueusement) qu'est ce que je l'ai aimé,cette petite bonne femme. Un véritable rayon de soleil qui sera un grand soutien pour Colette dans son combat. 

Vous l'aurez compris, j'ai beaucoup aimé lire et découvrir cette histoire fabuleuse, que Jean-Christophe Portes (auteur de la série "Victor Dauterive") a su mettre en mots, avec son style incomparable et son sens du suspense (rien que la scène d'ouverture où l'on voit Colette emmener clandestinement un garçon juif, par le fameux passage de la morgue,nous présentant tout d'abord le combat de Colette,  pour ensuite revenir sur son passé dans le chapitre suivant,son enfance, son envie de devenir médecin coûte que coûte:  on ressent tout l'art du suspense que possède Jean-Christophe dans sa manière de mettre en forme l'histoire de Colette), en retrouvant son métier de journaliste. 

Ici, Jean-Christophe se transforme en passeur, pour nous livrer le témoignage fort et bouleversant d'une femme exceptionnelle qui s'est battue pour la liberté. Il aurait été dommage de ne pas garder une trace de ces femmes et ces hommes exemplaires, qui ont permis par leur propres moyens et leur sens du devoir et de la liberté, de sauver des centaines d'enfants, d'une mort certaine. 
Un témoignage essentiel pour que l'on n'oublie jamais qu'une telle horreur a existée. Heureusement que certains moments de bravoure ont existé également,  pour nous montrer que l'humanité n'est pas si cruelle, et que la lumière est tapi dans l'ombre, et qu'elle déchire toujours les ténèbres un jour ou l'autre. 
Un témoignage que je vous encourage à lire pour partir à la rencontre d'une femme formidable. 

Merci à Jean-Christophe Portes pour la découverte de ce destin magnifique. 

Colette Brull-Ulmann: Les enfants du dernier salut, Editions City, 254 pages, 2017


mercredi 13 juin 2018

La Discothèque du 20e siècle #273

En 1979,  Gloria Gaynor allait nous offrir l'un des grands succès du disco, qui allait connaître un second souffle en 1998, lors de la Coupe du monde.

Gloria Gaynor: I will survive (1979)


19 ans avant la Coupe du Monde 98 en France dont I will survive fut la chanson fétiche, ce titre avait fait de son interprète une star mondiale en 1979 (n°1 aux USA, en G-B et en France), soit 5 ans après son premier tube, précurseur de tout le mouvement disco, Never can say goodbye. Mais saviez-vous que I will survive est aujourd'hui, l'une des chansons les plus demandées lors des soirées karaokés? (Source: Fascicule "La Discothèque du 20e siècle: 1979", Polygram Direct)

Bonne écoute!


mardi 12 juin 2018

Le Mangeur de citrouille (Belfond Vintage Saison 6, Volume 31)

4e de couverture: Dans cette tour sur la colline, il n’y avait pas d’enfants pour me conférer une identité ou mettre de l’ordre dans le chaos du temps qui passe. Il faisait très clair : l’éclat brutal du brouillard était plus net que la lumière du soleil. J’avais décroché le téléphone : il gisait sur la table comme un fœtus informe, avec son fil tordu en nœuds épais.
Profonde, violente, la confession glaçante d’une femme au bord de la folie, étouffant dans un mariage qu’elle ne reconnaît pas, perdant pied devant des enfants qu’elle ne comprend plus. Chargé d’une forte dimension autobiographique, porté par un style renversant d’intelligence, ce roman fouille les plaies de Mrs Armitage, la narratrice, mais aussi de Penelope Mortimer, l’auteur, et finalement celles de générations de femmes cherchant désespérément une échappatoire à leur condition.
Publié en Angleterre en 1962 et chez Plon en 1964, un cri déchirant qui, aujourd’hui, est toujours plus assourdissant.

Comme à son habitude depuis maintenant 6 ans, les Editions Belfond, cherchent toujours des textes sortant de l'ordinaire et qui ont une grande portée sur le monde...mais qui sont depuis tombé dans l'oubli pour la jeune génération. 
Je dois dire que je prends toujours autant de plaisir à découvrir les romans de cette collection. A chaque fois, j'y découvre toujours quelque chose qui me frappe. Dans "Le mangeur de citrouille", roman très autobiographique de Penelope Mortimer, c'est la voix de cette femme qui nous happe dès les premières pages pour ne plus nous lâcher et nous hanter, même après avoir fermé le livre qui m'a touché. Cette femme esseulée qui ne sait plus comment vivre dans un mariage vide de sens et des enfants (nombreux, eu lors de ses précédents mariages) qui, grandissant, ne la comprennent pas et s'éloignent, on se surprend à l'aimer et à l'écouter avec bienveillance. 
Alors, je dois vous avouer que les premiers chapitres m'ont laissé un peu perplexe: entre les visites chez le psy, où elle raconte sa rencontre avec Jake, son dernier mari (elle en eu trois avant lui), son premier amour avec le fils d'un pasteur, tous ces éléments étaient mis bout à bout, comme des petites anecdotes sans trop de lien entre eux, à part, la narratrice Mrs Armitage. Malgré cet état de faits, je continuais quand même et puis, vient le moment où tout bascule dans "l'horreur" le plus absolu (bon, le mot est peut-être un peu fort, mais c'est ce que j'ai ressenti en le lisant) avec les événements du milieu de roman. Ce que l'auteure fait subir à son personnage féminin est des plus terrifiants, et cela serait cruel, si Mrs Armitage n'étaient pas le double de l'auteure Penelope Mortimer. Car, l'épreuve que vit la narratrice, qui va progressivement l'amener jusqu’à une certaine forme de folie, l'auteure l'a également vécue. (D'ailleurs, je me suis un peu spoiler le roman en lisant la biographie de l'auteure qui se trouve en début de livre, mais cela ne m'à pas trop gâcher la lecture)
En fait, c'est un roman aux accents cruels qui, mine de rien vous hypnotise au point qu'on ne peut le lâcher avant la fin (en refermant le livre, je me suis aperçu avec étonnement que je l'avais commencé le dimanche matin pour le finir, le dimanche soir). C'est cruel mais également sadique, surtout au vu du comportement des hommes, qui ne sortent pas grandit dans ce roman que ce soit, Jake, la mari de la narratrice qui se comportera comme un beau salaud, ou Mr Conway,qui fera subir à sa femme Beth, la pire des vengeances...mais je ne la plaindrais pas. 
Encore une fois, nous nous retrouvons face à un roman percutant, qui va vous laisser sans voix, tant il bouleversant. La voix de cette femme esseulée, qui ne trouve le bonheur et la solution à ses douleurs que dans l'enfantement, et qui va devoir renoncer à cette part de féminité, va me hanter encore longtemps. Cette voix est forte, sans fard et vous prend aux tripes, vous hypnotise.
Au final, une (re)découverte qui va laisser des traces: le roman de Penelope Mortimer laisse entendre une voix de femme qui dit son désespoir et sa solitude devant un énième mariage qui part à la dérive. Avec un style percutant,cruel dans les faits, les mots et les gestes, il nous embarque au plus loin dans la folie, jusqu'à l'obsession. L'obsession du personnage pour la survie de son bonheur et l'obsession du lecteur d'aller jusqu'au bout afin de savoir comment Mrs Armitage va se sortir de cet enfer. Un texte important qui, par la voix d'une femme, parlera à toutes les femmes. 
Merci aux Editions Belfond pour cette découverte essentielle. 
Penelope Mortimer: Le mangeur de citrouille, (The Pumpkin Eater), 250 pages, Belfond, (Collection Belfond |Vintage]), 1962 (pour l'édition originale), 1964 (pour la traduction française), 2018 (pour la présente édition)