lundi 30 juillet 2018

Les Crèvecoeur Tome 2 (Germain & Raphaël)

4e de couverture: L'Histoire et la guerre viennent une fois de plus bouleverser la passion que cultive Germain Crèvecœur pour les souliers féminins, en ravivant de douloureux souvenirs d'enfance. Otage du conflit franco-allemand dans lequel on exploite son talent et témoin d'un amour qui dérange, Germain se voit obligé de jouer les héros malgré lui pour protéger sa liberté et sa vie.

Il se raccroche alors à son génie créatif et tente de trouver le chemin qui mène au cœur des femmes, entraînant ainsi le lecteur dans le tourbillon de son destin exceptionnel. Trahisons, amour, secrets de famille, rien n'épargnera Germain dans sa quête du bonheur et surtout pas cette dernière confidence trouvée, bien malgré lui, au fond d'une petite boîte.

Entre passions et intrigues familiales, la saga des Crèvecœur est un hymne à la féminité autant qu'un voyage dans le cœur meurtri d'un homme à la sensibilité unique, qui espérait soigner son âme au fond d'une bottine pour dame.

Germain et Raphaël est le second et dernier volet de cette épopée familiale.

Risque de Spoilers sur le tome précédent. 

C'est avec soulagement (car j'ai enfin pu lire le dénouement des Crèvecoeur), mais également un petit pincement au coeur que j'ai refermé ce 2e et dernier tome. 
Après 3  ans d'attente, j'ai enfin lu le dénouement de cette saga qui m'a hanté pendant toutes ces années. 

Germain continue de dérouler son histoire à son fils Raphaël. Il nous raconte sa vie parisienne que la 2nde guerre mondiale va venir bousculer. 
C'est alors le temps des années sombres pour Germain et les Bonhomie, qui voient des trains arriver en gare de Drancy pour parquer les juifs. 
Dans ce 2e volet, Antonia continue de dérouler le fil de la vie de Germain, avec toujours autant de détails sur le monde des chaussures, tout en faisant entrer son anti-héros dans la grande Histoire. 

Ce fut encore une fois un plaisir de retrouver Germain, un personnage attachant qui nous surprend de par sa lâcheté (après tout il n'est qu'un homme) mais qui va devenir un héros malgré lui, en sauvant la vie d'Hanna, la petite fille de ses voisins. 
Dans ce tome là, les nouveaux personnages sont encore nombreux: de Erlmann, le soldat nazi (qui avait fait une apparition au début du premier tome, et c'est intéressant de voir les fils de l'histoire se tisser et nous faire nous poser mille questions), en passant par Ballantine, la jeune bonne d'une cliente de Germain, quand celui ci fait son retour à Bayeux, ou bien Garance, qui sera le grand amour de notre solitaire qui ne saura jamais vraiment aimer. Tous ont de multiples facettes qui les rendent très intrigants. 

C'est bien simple, je n'ai pas pu décrocher une seule minute, étant avide de savoir comment tout cela allait se boucler. 
La plume d'Antonia est des plus magiques. Il y a quelquefois des fulgurances de poésie dans certains passages qu'on se met à frissonner, tellement c'est beau. Le parti pris de la narration par Germain fait que celui ci devient un personnage exceptionnellement attachant, de par ses failles, ses faiblesses. Les passages du dernier chapitre dans la seconde partie "Raphaël" m'ont presque mis la larme à l'oeil tellement ce qu'il dit à son fils est beau. Et le procédé de la narration alternant le je et le tu, fait que, si Germain s'adresse à Raphaël, son fils dans les lettres, le lecteur se surprend à se mettre dans la peau de ce fils perdu et retrouvé...trop tard. 

Un point important que je n'avais pas relevé lors de ma précédente lecture: le rôle de la maison des Gervais-Crèvecoeur à Bayeux, au 15 rue Saint Malo, est primordial. Il est même central. Cette maison est le coeur du récit et c'est elle qui renferme cette noirceur et cette profondeur quasi macabre qui fait qu'on s'y sent mal à l'aise, tout comme Raphaël quand il l'a découvre. On se demande même pourquoi le destin s'acharne à ramener Germain dans cette maison qu'il a toujours détesté et qui va lui servir de tombeau. Antonia la décrit de telle manière que j'ai eu l'impression, bien souvent de m'y trouver. 
De par sa plume, Antonia lui a donné une âme, sombre certes, mais une âme qui fait qu'elle est vivante et renferme bien des secrets. 

Des secrets qui sont dévoilés au lecteur de fort belle manière, même si certains sont répétés plusieurs fois (je pense au secret de la naissance de Germain), mais c'est tout à fait normal: le point de vue étant celui de Germain, il découvrira le secret de sa naissance par son père, puis quelques pages plus loin par sa mère. Cela peut sembler redondant mais c'est un fait exprès; Cette répétition n'est là que pour nous montrer le chemin qu'a pris Germain pour découvrir les secrets de sa famille. 

Je dois dire que le final m'a beaucoup surpris: je ne m'attendais pas à avoir 3 épilogues se focalisant sur Edith en 1936, pour nous parler du destin de certains personnages qui ont croisé la route de la mère de Germain, sur Raphaël en 1975 et sur une certaine Eva (dont je vous tairai le patronyme pour un peu de suspense) la même année, bouclant ainsi la boucle de cette histoire de famille pas comme les autres. 

Au final, une saga flamboyante qui tient toutes ses promesses, écrite d'une plume poétique qui n'est pas sans rappeler celles du XIXe siècle. Il y a un souffle dans cette épopée familiale, rempli de secrets, de malheur et des personnages attachants aux destins tragiques pour lesquels on tremble et l'on espère des jours meilleurs. A n'en pas douter, "Les Crèvecoeur" resteront au panthéon des grandes sagas et ils ont tout à fait leur place aux côtés des Rougon Macquart, car, tout en nous parlant des secrets de famille, elle nous parle surtout  de la société du début du XXe siècle jusqu'aux années 70, tout en dressant un portrait magnifique du monde de la Chaussure. Jamais cet objet n'aura été autant sublimé qu'entre les pages des Crèvecoeur. 
"Les Crèvecoeur"? Une saga à lire absolument! 

Merci à Antonia de m'avoir permis de lire le fin mot de cette histoire. 

Antonia Medeiros: Les Crèvecoeur Tome 2 (Germain & Raphaël), Silk Thread Publishing, 285 pages (format ebooks), 2018


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