vendredi 12 août 2016

Mensonges et faux-semblants

4e de couverture: « Tu sais, Jenny, derrière ces murs, on enferme les petites filles qui parlent trop... »
Petite fille docile et sensible, Jenny passe les sept premières années de sa vie dans le mensonge et la douleur.
Elle survit, essaie de comprendre et subit en silence et dans les pleurs. Marquée pour toujours, elle écrit et clame ainsi publiquement les faits. Elle raconte, avec courage et détermination, la maltraitance sexuelle. Le ton, d'une sobriété pudique, est celui d'une violence rentrée et maîtrisée sous forme d'interrogations quant au rôle d'une mère dans le déni. Car plutôt que de se concentrer sur la pathologie et les agissements du prédateur et d'accuser, Mensonges et Faux-semblants évoque avant tout le comportement des proches, mère et grand-mère, englués avec complaisance dans leurs mensonges, leur passivité et leur confort organisé. Toute l'originalité de ce récit se situe dans l'évocation d'une tacite malfaisance familiale et pose la question d'une résilience possible.

Les rencontres de hasard sont probablement les plus belles. 
J'ai rencontré Martine Magnin, en Mars 2016, au Salon du livre de Paris. Nous étions venus rencontrer Mathieu Tazo sur le stand des éditions Daphnis et Chloé, avec d'autres bloggueurs et bloggueuses. 
C'est lors de cette rencontre que Martine m'apprit qu'elle écrivait également. Toujours curieux et friand de nouvelles découvertes livresques, j'ai voulu en savoir plus et en lire plus. 
C'est ainsi que Martine m'a permis de découvrir ce "Mensonges et faux-semblants", l'un de ses écrits. 
J'ai mis un peu de temps pour le sortir et je me demande bien pourquoi. Ce petit roman est une véritable claque que l'on se prend en plein coeur. Jamais je n'ai lu une plume pareille. Je retrouve la voix de Martine dans sa plume. 
D'un sujet encore tabou aujourd'hui (les violences sexuelles au sein d'une famille), Martine dévoile le parcours d'une petite fille, Jenny, du moins, celui de sa petite enfance (ce moment où l'être adulte que l'on deviendra, se construit), avec pudeur et simplicité. Les mots simples et beaux qu'elle fait couler sur la papier, nous murmure à l'oreille les faits sans en faire trop, et, sans le vouloir, on ressent quelque chose sur le côté coeur.  
Surtout, elle s'attarde sur l'entourage de la petite victime, plutôt que sur le bourreau qui n'est qu'une ombre menaçante, mais à laquelle l'auteur ne veut pas donner d'importance. Ce ne sont pas les faits qui importent, ici, mais les conséquences: surtout, les mensonges qui émaillent la vie de Jenny. Toute sa vie, sa mère et sa grand-mère, lui ont raconté des "légendes", sur son père, qui a fuit le foyer familial, sur son beau-père qui va abuser d'elle, sans que sa mère ne fasse rien. 
C'est dramatique, certes, mais le pathos n'a pas droit de cité. L'auteur n'a pas besoin d'utiliser ce moyen pour émouvoir: des mots simples suffisent pour comprendre et être ému. La vérité brute suffit, pas besoin de broder. 

J'ai aimé l'écriture de Martine car elle touche au coeur: elle explique les non-dits et les moments que Jenny préférerait oublier, en alternant le "je" et le "elle", comme si la Jenny qui vit ce drame était une personne étrangère. 
Derrière ce drame, Martine, n'oublie pas de dresser le portrait de ce père, qui malgré ce que la mère de Jenny disait, n'a pas oublier sa petite fille. C'est une belle déclaration que la petite Jenny fait à son père, dans ce livre émouvant. 

Je ne voudrais pas trop en dévoiler, car, la plume de Martine Magnin, est à découvrir dans toute sa force et sa splendeur, sans trop en dire. Afin d'être happé et surpris. Juste vous inciter à lire ce livre qui lève le voile sur un sujet encore tabou aujourd'hui, même si la parole des enfants est beaucoup plus libre et  entendue, qu'à l'époque où se situe le roman (les années 50). Un roman qui ne vous laissera pas insensible. 

Merci à Martine pour la découverte de son univers et de sa plume qui a su conquérir mon petit coeur. 

Martine Magnin: Mensonges et faux-semblants, Estelas Editions, 154 pages, 2016


1 commentaire:

  1. et bien Claudy, voilà un kadeau du Kabaret que je n'oublierai pas, je ne m'y attendait pas c'est comme noël en plein été. Merci Claudy pour cette lecture et cette Kronique pleine de sensibilité et de talent. Bises d'amitié

    RépondreSupprimer