Qu'est-ce que tu lis en ce moment ? C'est avec cette question que Will Schwalbe brise la glace chaque fois qu'il accompagne sa mère, Mary Anne, à ses séances de chimiothérapie. Car pour lui, éditeur new-yorkais, comme pour elle, fondatrice de la bibliothèque universitaire de Kaboul, lire, c'est le contraire de mourir ; lire, c'est vivre.
John Irving, J. R. R. Tolkien, Khaled Hosseini, Irène Némirovsky, Thomas Mann, Colm Tóibín, Harold Pinter, Maurice Sendak... À travers leurs lectures communes, mère et fils dépassent pudeur et chagrin et échangent sur la famille, l'amour, la mort, la vie, et la magie de ces livres qui nourrissent notre regard sur le monde et nous font goûter, le temps de quelques pages, à une forme d'immortalité.
Quel livre éblouissant que ce "Parfum de ces livres que nous avons aimés"! Avant d'aller plus loin: arrêtez ou finissez votre lecture en cours et précipitez vous sur le livre de Will Schwalbe pour vous laissez porter par ce livre tendre, touchant et plein de délicatesse.
Si je n'avais qu'une chose à dire sur ce livre, ce serait: Lisez-le!
Bien évidemment, je vais essayer de dire pourquoi, mais ce sera un peu difficile car j'ai souvent été dans le ressenti avec ce livre. Ce n'est alors pas évident de retranscrire avec des mots, des émotions aussi fortes.
En 2007, Mary Ann Schwalbe apprend qu'elle est atteinte d'un cancer du pancréas. Sa famille va alors être à ses côtés pour la soutenir dans cette épreuve. Un jour, lors d'une séance de chimio où Will avait accompagné sa mère, il lui pose une question pour engager la conversation et ainsi briser la glace: "qu'est ce que tu lis en ce moment?" C'est avec cette phrase que va s'instaurer entre la mère et le fils, un club de lecture très privé où il n'y a que deux membres. Pendant deux ans, ils vont partager les mêmes lectures et en discuter. C'est à travers ces échanges que Will en apprendra plus sur sa mère.
Voilà l'un des plus beaux témoignages qu'ils m'ait été donné de lire: Will Schwalbe nous dresse le portrait d'une femme forte, qui se bat pour ses convictions, qui malgré la maladie continue à s'occuper des autres (et notamment du projet de construction d'une bibliothèque à Kaboul). Alors, certes, il y a des passages émouvants où la maladie s'invite dans ces pages mais ce qui domine, c'est la joie de vivre de Mary-Ann, qui veut profiter de chaque instant, leur amour commun des livres (c'est l'un des livres les plus beaux sur la littérature et ce que les livres nous apportent au quotidien): leur rapport aux livres les rapprochent bien sûr et ce livre nous parle aussi des rapports entre une mère et son fils, très proches l'un de l'autre et que les livres ont encore plus rapprochés.
Il ne faut pas s'en cacher: ce livre parle également de la mort et du deuil mais ces deux thèmes ne plombent pas l'ensemble du livre: la délicatesse de la plume de Will Schwalbe (très bien traduite par Lyne Strouc) y est pour beaucoup. La mort fait partie de la vie et il ne faut pas faire comme si elle n'existait pas: de toute façon, on sait dès le début, sans même avoir commencé la lecture du livre par la fin (une manie qu'avait Mary-Anne: elle débutait toujours la lecture d'un livre par la fin, peu importe le genre), que Mary-Anne Schwalbe ne survivra pas à son cancer. Eh bien, même en sachant cela, elle continue de vivre sa vie comme elle l'entend, en agissant toujours pour les autres.
Ce livre est également une malle aux trésors, rempli de plein d'idées de lectures: Mary-Anne et Will sont des boulimiques de livres et ce n'est pas moins d'une centaine de livres que Will parsème dans son histoire (d'ailleurs la liste des livres évoqués dans ce témoignage, se trouve à la fin du livre et m'a donné envie d'en lire quelques uns). Will et Mary-Ann ont une manière de parler de tous les sujets, grâce aux livres). J'aimerai tellement avoir des discussions comme celles de Will et Mary-Ann!
En arrivant à la fin du livre, j'ai ressenti une grande émotion: mes larmes ont coulées en lisant les derniers instants de Mary-Ann.
Mary-Anne Schwalbe, s'est éteinte le 14 septembre 2009 (deux jours avant Patrick Swayze, qui avait parlé dans une interview de son combat contre un cancer du pancréas. J'en parle puisque Will Schwalbe mentionne cette interview dans son livre).
La vie est étrange: le 14 septembre 2009, j'arrivais à New York, la ville qui ne dort jamais, que j'allais découvrir avec des yeux émerveillés pendant trois jours. Au même moment, dans la même ville, Mary-Ann quittait ce monde doucement.
Au final, un livre éblouissant que je n'oublierai pas: il y a parfois des livres qui vous accompagnent toute votre vie et qui l'embellissent'. "Le parfum de ces livres que nous avons aimés" en fait parti. Voilà un livre lumineux, tendre et touchant, dans lequel je me suis beaucoup retrouvé (surtout à travers Will), qui nous dresse le portrait d'une femme exceptionnelle, pour qui les livres, tenaient une place importante dans sa vie.
Merci Mme Schwalbe pour votre force et votre sagesse: c'est une belle leçon de vie que vous m'avez donner. Et merci à Will Schwalbe pour l'avoir si bien retranscrite. Merci!
Quelques extrait pour convaincre les derniers réticents:
"Ils nous reste à tous beaucoup plus de livres à lire qu'on n'en pourra lire et beaucoup plus de choses à faire qu'on n' en pourra faire. Pourtant, Maman m'a appris que lire n'est pas le contraire de faire, mais celui de mourir. (p.16)
"Ce que j'aime par dessus tout dans les livres est leur existence physique. Les livres électroniques vivent hors de notre vue et disparaissent de nos pensées, tandis que les livres imprimés ont un corps, une présence.Bien sûr, ils vous échappent parfois en se cachant dans des lieux improbables, par exemple une boite pleine de vieille photos encadrées, ou le panier à linge, enveloppés dans un tee-shirt. Mais, à d'autres moments, ils vous défient et vous trébuchez littéralement sur des bouquins que vous aviez oubliés depuis des semaines ou des années. Je recherche souvent les livres électroniques, mais ils ne viennent jamais à ma rencontre.(....)Ce sont des âmes sans chair (...) incapables de vous bouleverser. (p.59-60)
"Elle était entourée de livres-un mur entier de rayonnages en était plein, il y avait des livres sur sa table de nuit, un autre à côté d'elle. Stegner et Highsmith, Mann et Larsson, Banks et Barbéry, Strout et Némirovsky, "The Book of Common Prayer et la Bible.
(...)
Ils étaient les compagnons et les professeurs de maman. Ils lui avaient montré le chemin. Et elle pouvait les voir tandis qu'elle se préparait pour la vie éternelle qui l'attendait, elle le savait. Quel réconfort pourrais je espérer en regardant ma tablette sans vie? (p.391-392)
Quelques extrait pour convaincre les derniers réticents:
"Ils nous reste à tous beaucoup plus de livres à lire qu'on n'en pourra lire et beaucoup plus de choses à faire qu'on n' en pourra faire. Pourtant, Maman m'a appris que lire n'est pas le contraire de faire, mais celui de mourir. (p.16)
"Ce que j'aime par dessus tout dans les livres est leur existence physique. Les livres électroniques vivent hors de notre vue et disparaissent de nos pensées, tandis que les livres imprimés ont un corps, une présence.Bien sûr, ils vous échappent parfois en se cachant dans des lieux improbables, par exemple une boite pleine de vieille photos encadrées, ou le panier à linge, enveloppés dans un tee-shirt. Mais, à d'autres moments, ils vous défient et vous trébuchez littéralement sur des bouquins que vous aviez oubliés depuis des semaines ou des années. Je recherche souvent les livres électroniques, mais ils ne viennent jamais à ma rencontre.(....)Ce sont des âmes sans chair (...) incapables de vous bouleverser. (p.59-60)
"Elle était entourée de livres-un mur entier de rayonnages en était plein, il y avait des livres sur sa table de nuit, un autre à côté d'elle. Stegner et Highsmith, Mann et Larsson, Banks et Barbéry, Strout et Némirovsky, "The Book of Common Prayer et la Bible.
(...)
Ils étaient les compagnons et les professeurs de maman. Ils lui avaient montré le chemin. Et elle pouvait les voir tandis qu'elle se préparait pour la vie éternelle qui l'attendait, elle le savait. Quel réconfort pourrais je espérer en regardant ma tablette sans vie? (p.391-392)
Merci infiniment à Brigitte et aux Editions Belfond pour cette belle leçon de vie.
Will Schwalbe: Le Parfum de ces livres que nous avons aimés; (The End of your Life Book Club), Belfond, 414 pages, 2013
1er livre lu pour le challenge New York organisé par le webzine Café Powell.
Will Schwalbe: Le Parfum de ces livres que nous avons aimés; (The End of your Life Book Club), Belfond, 414 pages, 2013
1er livre lu pour le challenge New York organisé par le webzine Café Powell.
Tu as une amie précieuse chez Belfond, sois en certain ! A chaque fois que je note un titre chez toi, il sort toujours de cette maison. Ce titre-là ne déroge pas à la règle et va rejoindre les autres sur ma wishlist.
RépondreSupprimerJ'en suis conscient. Cela va faire trois ans que je collabore avec cette maison d'édition et à chaque fois, je remercie "mon" amie précieuse de tous les titres qu'elle a pu me faire découvrir. A chaque fois, elle réussit à faire mouche.
SupprimerJe pense que tu devrais apprécier ce titre là. Que dis je, tu vas apprécier!
je l'ai donc lu...et c'était magnifique! merci.
RépondreSupprimerDe rien! Merci à toi pour ce beau commentaire qui me donne l'envie de continuer ce blog.
Supprimer