mardi 19 avril 2011

Pleurer en choeur est tout un art


Résumé: Du haut de ses onze ans, le narrateur ne saisit pas très bien les enjeux du monde des adultes dans la petite bourgade du sud du Jütland où il grandit. Il a bien remarqué que le chiffre d'affaires de l'épicerie de son père augmentait après chacune des prestations de ce dernier... lors des enterrements : cet homme dépressif et taciturne a en effet un talent, celui de faire pleurer les plus endurcis grâce à ses oraisons funèbres déchirantes. Le gamin, qui accompagne les envolées lyriques paternelles de ses mimiques affligées, se prend au jeu : la famille est enfin considérée, et l'atmosphère à la maison est plus légère après chaque cérémonie. De là à susciter l'augmentation du nombre de décès, il n'y a qu'un pas, vite franchi par l'imagination débridée de l'enfant.

Mon avis: Voilà un petit livre bien étrange, qui au fil de la lecture, m'a un peu mis mal à l'aise. La famille dont il est question dans le roman, est un peu bizarre je trouve. Ce gamin de 11 ans qui nous raconte ce qui se passe dans cette famille m'a fait parfois froid dans le dos: je sais, il a une grande imagination mais ses idées morbides pour aider son père à faire augmenter son chiffre d'affaire à l'épicerie m'ont gênés.
Mais revenons au début pour bien comprendre: le père du gamin est un vrai orateur né qui fait des éloges funèbres du feu de Dieu, à faire pleurer les gens. Dès le lendemain des enterrements, l'épicerie du père ne désemplit pas. Bien évidemment, le fils de 11 ans à trouvé la solution pour que la boutique marche: il faut aller à des enterrements pour que son papa puisse faire des éloges. Mais pour ça, il faut qu'il y ait des enterrements, et donc des gens morts. Qu'à cela ne tienne, le gamin se met en tête de tuer des gens pour pouvoir assister à des enterrements. Il faut dire qu'il aime ça le gamin les enterrements.

Ce qui commence comme un livre gentillet sur une famille danoise où tout va bien, se transforme peu à peu en un roman mordant, dérangeant par moment. J'étais de moins en moins à l'aise devant les révélations du roman. J'avais un sentiment de malaise: si au début du roman, je souriais devant les facéties de cette famille et des petites aventures du petit narrateur, progressivement,je souriais jaune devant les situations.
Le moment où le roman prend un virage et où le malaise s'installe: c'est au moment ou Sanne, la grande sœur du narrateur, commence à perdre la boule: elle ne veut plus dormir sur le canapé avec papa quand celui ci dort seul dans le salon. Pourtant, comme le dit le narrateur, il n'y a qu'elle qui peut consoler papa quand il est triste. Comme vous le voyez, on y parle clairement d'inceste: sauf que c'est dit avec les mots d'un gamin de 11 ans qui ne comprend pas pourquoi sa grande sœur ne veux plus aller consoler son papa chéri. Le narrateur qui voit son père comme un héros.

A partir de ce moment là, tout part en vrille: Sanne, la sœur commence à perdre la boule, le narrateur fait des listes pour savoir qui il va faire mourir pour que son père puisse faire l'éloge funèbre; la grand-mère qui décède dans l'incendie de sa maison, etc... Et moi qui n'avait qu'une envie: quitter cette famille de dingue.
En revanche, ce qui m'a plu et qui rend parfois le livre plus léger qu'il n'est, c'est le style: l'auteur réussi à se mettre dans la peau d'un gamin de 11 ans en utilisant des mots simples et surtout en nous racontant des situations morbides mais avec la candeur d'un gamin de cet âge. Le lecteur comprend très bien ce qui se passe mais le roman ne tombe jamais totalement dans le sordide et le graveleux.

J'ai aimé ce roman mais j'ai trouvé les personnages énervant à cause de leur suffisance: comme le dit la petite Mette, la fille de la voisine qui a le même âge que le narrateur: "ils ne se prennent pas pour de la crotte". Surtout quand le père est nommé au conseil municipal. Attention, à présent, ils sont des gens importants du village: faut pas faire n'importe quoi. Qu'est ce que ça à pu m'énerver cette suffisance: ils sont imbus d'eux même, surtout le petit gamin. Mais bon, je lui pardonne, il n'a que 11 ans.
La seule qui sort du lot et que l'on va écarter progressivement, c'est la fille, Sanne. Elle va tout faire pour se venger de ce père qui lui a fait du mal.

En conclusion, un roman déroutant, dérangeant qui met mal à l'aise par moment, mais qui m'a quand même plu dans l'ensemble.

Erling Jepsen: L'art de pleurer en choeur (Kunsten at graede i kor), Le Livre de poche, 307 pages, 2010




Sans le vouloir je fais avancer mon challenge: "La littérature fait son cinéma"
puisque j'ai appris en ouvrant ce livre qu'il avait été adapté au cinéma en 2006.
Comme vous voyez, un challenge qui va être facile à remplir vu le nombre de livres adaptés au cinéma. Maintenant, à chaque fois que j'ouvrirai un livre, je vérifierai s'il n'a pas eu une autre vie au cinéma: on ne sait jamais.


2/10

4 commentaires:

  1. Ça me plait bien cette histoire, ça a l'air très bizarre comme ambiance, bien décalé...

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  2. @Ys: Un gros décalage, je confirme. Donc, peut être fait pour toi, qui sait?

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  3. Tu as réussi à titiller ma curiosité sur ce coups là.

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