mercredi 6 mai 2015

Le secret de Tristan Sadler

4e de couverture: Tristan Sadler, vingt-et-un an, a survécu à l'enfer de la Première Guerre mondiale, mais son âme est restée en France, dans les tranchées. Auprès de Will, son compagnon d'arme qui n'est jamais revenu. 

De retour en Angleterre, Tristan rapporte à Marian les lettres que celle-ci adressait à Will. Mais aura-t-il le courage de lui dire que son frère, malgré les apparences, n'était pas un lâche? Cela l'obligerait à dévoiler son secret...

Les champs de bataille et l'absurdité des combats ne sont que le décor de ce roman, où se déploient l'amitié, l'amour, la cruauté, la trahison, le remords...Traduit dans vingt langues, Le secret de Tristan Sadler a été unanimement salué par la critique. 

Ce roman de John Boyne est un petit bijou poétique. Les mots de ce dernier nous laissent pantois, dévasté, touché au coeur devant ce destin hors norme, d'un "héros" ordinaire. 
Tout d'abord, je voudrais rassurer les personnes qui n'aiment pas les livres traitant de la guerre: celle ci n'est que le cadre, qui sert juste à parler des états d'âme d'un homme, qui essaie de tuer les démons du passé en livrant, à Marian, mais aussi au lecteur, les événements tragiques de cette partie d'histoire.

C'est donc plus un roman psychologique que nous offre John  Boyne, qui réussit, en dressant le portrait de Tristan, à maintenir un suspense, jusque dans le dernier chapitre, en alternant le passé et le présent des personnages (puisque l'histoire se déroule entre 1916 et 1919, c'est donc le passé total pour le lecteur, on est d'accord).

J'ai trouvé ce roman bouleversant, et il a su me toucher profondément, de par son sujet, dont je tairais l'objectif puisque cela serait dévoiler le fameux secret du titre...ce serait donc dommage...même si j'avais deviné par avance certains aspect de ce secret... Ce roman nous parle surtout, et avant tout  de l'acceptation de soi et nous donne à voir deux aspects différents, entre Tristan (le personnage qui m'a le plus touché) et Will, de l'acceptation d'une certaine chose, qui a encore du mal à être accepté à notre époque...alors, je ne vous dis pas comment c'était au début du siècle dernier. Malgré ma colère contre Will, à certains moments, devant son attitude envers Tristan, je ne peux pas le blâmer: venant d'une famille catholique (ou anglicane, je  ne saurai dire? En tout cas, son père est pasteur), il ne peut pas concevoir de devoir vivre comme un paria si son "amitié" avec Tristan était révélé au grand jour. Surtout, il ne l'accepte pas, à la différence de Tristan, qui, s'il ne le crie pas sur les toits, assume ce qu'il est (en revanche, il mettra longtemps à admettre ce qu'il a fait...mais chut).

L'auteur évoque la guerre de manière grandiose: même si celle ci n'est pas le noeud central du roman, John Boyne donne une atmosphère si particulière que, par des petites phrases de description, parcheminé dans le roman, le lecteur est de suite immergé dans cet enfer...surtout il montre également la folie des hommes, en la personne du sergent Clayton, détestable, et fou à souhait. Là aussi est la force de ce roman: le croquis minutieux et vrai de personnages haut en couleurs.
Heureusement, les chapitres de la guerre (qui sont supportables à lire, je vous rassure et qui ne sont qu'au nombre de deux, en définitive) sont contrebalancé par les chapitres de Norwich où Tristan se rend pour donner les lettres à Marian, l'un des rares personnages féminins de ce roman mais quelle femme! Moderne, combative et qui rêve d'indépendance. Ces chapitres sont une manière d'amener le lecteur vers les chapitres du passé. Ils servent de pont pour révéler progressivement les secrets des protagonistes.

Au final , un roman bouleversant, qui ne vous laissera pas indifférent. Un roman sur l'acceptation de soi, (qui vient juste de me faire penser à un certain roman de E.M Forster,auteur  évoqué dans le roman), sur la lâcheté des hommes et les non dits. Un roman que je vous recommande fortement. Une jolie pépite d'un auteur irlandais que je suis ravi d'avoir découvert.

Merci à Sibylle et aux Editions de l'Archipel pour cette belle découverte.



John Boyne: Le secret de Tristan Sadler, (The Absolutist), L'Archipel, 328 pages, 2015


6 commentaires:

  1. Déjà qu'il me tentait dans ton billet des nouveautés alors là c'est sûr je veux le lire!!!

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    1. Je pense que tu ne seras pas déçu. Enfin, je l'espère.

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  2. Pas besoin d'être grand devin pour deviner la nature de ce secret mais j'ai quand même bien envie de découvrir le parcours de ces deux hommes... en souhaitant quelque part au fond de moi que Tristan trouve son Alec Scudder ;-)

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    1. Tu as tout à raison (ou très perspicace) en ce qui concerne la nature du secret, mais je ne voulais pas le dévoiler (même si on le devine facilement) par principe...et pour ce qui est de savoir si Tristan trouvera son Alec, je te laisse le découvrir..Mais je vois que nous avons penser au même roman, de Forster.

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    2. Je viens tout juste de le terminer et j'ai adoré ce roman que j'ai trouvé extrêmement touchant. Je craignais un peu d'artificielles circonvolutions de l'auteur pour entretenir un pseudo secret mais au final, le "secret" de Tristan réside plus dans son acte quand dans sa nature, non ? Bref, une belle lecture.
      PS: J'ai lu le roman en VO et je trouve que le titre original est beaucoup plus fort que sa transposition en français.

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    3. Je suis ravi que tu ai apprécié ce roman. En effet, tu as tout à fait raison: le fameux secret de Tristan réside plus dans la révélation de son acte que dans sa nature...puisqu'il ne cache pas qui il est.
      P.S. Le titre VO est fort bien choisi, à défaut d'un titre français plus "banal" et qui peut porter à confusion puisqu'on en revient à se demander si le secret est sur la nature de Tristan ou sur son acte.

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