Dans Le fil des kilomètres (que je n'ai pas encore lu), le narrateur, mécanicien, prend la route pour retrouver son père; dans Le poids de la neige (qui remporta un grand succès auprès du public), celui ci, blessé, se retrouve confiné dans un village bloqué par la neige; et voici que dans Les ombres filantes, ce même narrateur poursuit sa route en forêt pour rejoindre le camp de chasse de sa famille où il pense retrouver les siens.
Alors, je vous rassure, pas besoin d'avoir lu les livres précédents pour comprendre celui ci. Christian Guay Poliquin réussit à faire que chaque livre trouve son ton et son indépendance. Seul, le narrateur (qui n'a pas de nom) et la fameuse panne d'électricité qui bloque le monde dans lequel il vit sont présent dans tous ses livres.
J'ai découvert la plume de Christian Guay Poliquin avec son précédent roman Le poids de la neige. Un roman que j'avais beaucoup aimé et trouvé très original par le mélange des genres et l'ambiance que l'auteur avait installé. Ce huis clos oppressant ménageait son lot de suspense.
En apprenant que son nouveau roman sortait, je n'avais qu'une hâte: le découvrir et poursuivre l'aventure. Je dois dire qu'encore une fois, Christian Guay Poliquin a su me surprendre, de par sa plume ciselée et poétique, et par ce mélange des genres qu'il maitrise si bien. Le monde dystopique est toujours là, de par la panne électrique qui bloque le pays, et dont on ne connait pas l'origine. Mais ici, fini la neige et le huis clos, bienvenu en été et en pleine nature: nous sommes donc dans un nature writing comme les grands auteurs américains savent les écrire. Tout comme le narrateur, on s'enfonce dans cette forêt parfois hostile où le but est de survivre. Les descriptions de la nature et les moments de chasse et de tensions retranscrivent cela à merveille. Par moments, ce livre a un petit côté western où c'est la loi du plus fort et le chacun pour soi qui l'emporte (surtout dans la partie La Famille).
Durant son périple, le narrateur rencontre sur sa route un petit garçon qui dit se nommer Olio. Ce dernier va suivre le narrateur dans sa quête. J'ai aimé la relation qui se tisse entre les deux, ils se soutiennent malgré les embûches et les mensonges du petit Olio (ce qui apporte un mystère supplémentaire à l'histoire. Ils restent unis et leur relation va grandir et donner un sens à ce que cherche le narrateur: retrouver une famille pour se sentir moins seul. D'ailleurs, l'arrivée d'Olio dans la vie du narrateur m'a beaucoup fait penser au "Petit Prince" de Saint Exupéry.
Pour moi, Christian Guay Poliquin est un auteur "atmosphérique": il sait installer une atmosphère souvent hostile (et encore plus dans ce livre là) qui emmène le lecteur très loin et ne lui fait plus lâcher le livre. Je vous assure que vous plonger entièrement dans un roman de Christian, c'est prendre le risque de ne plus en sortir avant le mot final.
Justement, on en parle de ce final! Celui ci risque de faire débat et en faire grincer plus d'un. Honnêtement, j'ai été scotché par cette fin ouverte qui m'a fait détester et maudire l'auteur pour un moment. C'est pas humain de terminer un livre comme ça. Je me suis même dit: "Il a pas le droit!" Pourtant, l'auteur à tous les droits et pouvoirs sur son oeuvre et ses personnages. Même celui de continuer l'aventure avec ce narrateur sans nom dans un prochain volet ou de l'achever avec ces Ombres filantes.
En tout cas, la dernière phrase du livre , surprenante, va me rester en tête encore longtemps et donne peut être un sens sur la quête du narrateur.
Vous l'aurez compris, je suis complètement tombé en amour de cet auteur charmant, de sa plume et de son univers atypique. Un auteur que je continuerai à suivre, c'est certain, même s'il m'a mis en colère avec sa fin. En tout cas, je vous encourage vivement à le découvrir. Vous ne serez pas déçu. Christian Guay Poliquin vaut le coup d'être connu du plus grand nombre. Pour moi, il sort du lot et des sentiers battus.
Christian Guay Poliquin: les ombres filantes, La Peuplade, 336 pages, 2021
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