jeudi 5 janvier 2017

Le dernier arrivé

4e de couverture: Ninetto, 57 ans, incarcéré dans une prison milanaise pour encore quelques
semaines, repense à sa jeunesse.
À 9 ans, alors qu’il se rêve poète, il abandonne à contre-coeur sa Sicile natale pour Milan. À l’aveuglette, il arpente la ville inconnue, trouve un logis, un emploi… et les années passent, jusqu’à ce que l’enfant déjà un peu adulte s’efface pour devenir adolescent, découvrir l’amour. Après une brève fuite pour se marier avec la jeune Maddalena, Ninetto entre chez Alfa Romeo, où il travaillera sur une chaîne de montage pendant trente-deux ans. Le couple a une fille, Elisabetta.
Parallèlement, on découvre le présent de Ninetto : la prison, ses camarades de cellule, sa libération… Il retrouve Maddalena et une vie qui ne l’a pas attendu : la ville a changé, les usines ont fermé, Ninetto ne s’y reconnaît plus. 
Les deux récits finissent par se rencontrer et l’on comprend pourquoi Ninetto a été emprisonné, pourquoi Elisabetta ne lui parle plus et refuse qu’il rencontre sa petite-fille de 5 ans.
Dans un style vif, Marco Balzano signe l’histoire d’un petit garçon devenu homme, mais aussi celle des « derniers arrivés » et les évolutions d’une société. Un récit d’autant plus fort qu’il offre une réflexion sur les migrants et leur condition.

Le dernier roman de Marco Balzano a, sous ses côtés de chronique italienne intemporelle, une résonance dans notre actualité. 
En effet, il parle de ces siciliens qui ont émigré vers l'Italie du Sud dans les années 60. Et c'est plus particulièrement à la migration enfantine que se penche Marco Balzano, à travers Ninetto, puisqu'il n'a que 9 ans, quand il quitte la Sicile pour Naples, avec son "pays" (son compagnon de route). 
Il y a du Dickens dans le parcours du petit Ninetto. Au début de ma lecture, j'ai vu dans le petit Ninetto de 9 ans, Oliver Twist: le départ, la solitude et la misère (les petits boulots où Ninetto se fait exploiter). 
Ce qui a retenu mon attention dans cette histoire, c'est ce suspense que l'auteur met en place en passant du passé au présent:au début du roman, Ninetto est en prison et c'est en voyant, dans la cour de la prison, la vision de son ancien instituteur, que les souvenirs revienne et que Ninetto embarque le lecteur dans ses souvenirs. Ainsi, il retient l'attention du lecteur qui se demande pourquoi Ninetto s'est retrouvé en prison. 

J'ai aimé la découverte de cette Italie des années 60, et le parcours chaotique du jeune Ninetto. J'avoue cependant, que les passages entre passé et présent qui s'entrecroisent, sans trop de distinction étaient un peu difficile pour me repérer. Cependant, ils sont essentiel pour maintenir le suspense et pour donner toutes les clefs de compréhension au lecteur: car ce dernier ne sait qu'à la fin pourquoi Ninetto s'est retrouvé en prison. 
C'est une chronique douce-amère que nous raconte l'auteur: la vie de Ninetto n'est pas des plus roses et il est souvent entouré de loosers (comme son père ou Giuvà son "pays"). 
"Le dernier arrivé", c'est une langue qui chante à notre oreille et certains mots ou expressions italiennes, qui nous fait instantanément voyager. C'est aussi, le parcours de réinsertion d'un homme qui a gâché sa vie à un moment, sans qu'il sache trop pourquoi il en est arrivé là (il se sent un peu comme "L'étranger" de Camus, en ce sens) et qui n'arrive pas à se reconstruire. L'auteur décrit très bien ce difficile retour à la vie réelle en se glissant dans la peau de ce sicilien émigré qui ne sait plus vraiment qui il est. 

Au final, un roman au sujet d'actualité, qui donne a réfléchir sur la place des migrants, mais aussi des prisonniers, qui se retrouvent aux prises avec la vie réelle. La vie de Ninetto est une vie à la Dickens, où tout le monde se retrouve un peu. car on est tous "l'étranger de quelqu'un". Une jolie plume que celle de Marco Balzano (très bien traduite par Nathalie Bauer) que je vous encourage à découvrir. 

Merci aux Editions Philippe Rey pour cette découverte.

Marco Balzano: Le dernier arrivé (L'ultimo arrivato), Philippe Rey, 240 pages, 2017


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