4e de couverture: Ce n'est pas grand chose une semaine. Sept jours chez sa mère, avec les filles, pour faire le point. Rien de tragique, non. Juste souffler un peu; Vincent n'en revient pas. Son épouse vient de le pousser à faire la même chose: retourner quelques jours au bercail. Sauf que lui n'a pas vu sa famille depuis dix ans. Dix ans qu'il l'a quittée. Dix ans qu'il a quitté Jérôme, ce frère trop sage, et les copains, Olivier, Fanny, Etienne...
Les souvenirs sont douloureux, car Vincent a fait plus que les quitter: il les a lâchés. Ces petites vies communes où les rêves ne se débattent même plus. Ils lui en veulent mais lui cachent leur chagrin. Perdu dans sa propre identité de frère, de fils, d'amant, d'ami, Vincent voit la semaine s'étirer. Et toujours ce même air, lancinant, qui résonne, et qui n'est pas une chanson d'amour...
Ouvrir le roman d'un auteur qu'on adore, c'est comme retrouver un ami, se retrouver en terrain connu et où l'on se sent bien.
C'est ce que j'ai ressenti en commençant ce livre de Jean-Philippe Blondel. Dès les premiers mots, j'ai retrouvé cette sensation de bien être que j'ai en lisant l'un de ses livres et j'ai remarqué à quel point sa plume et son univers m'avait manqué.
Mais tout ceci vole en éclat dès qu'on poursuit la lecture et qu'on se rend compte que l'on n'est pas dans un livre "habituel" de M. Blondel. Ce This is not a love song est beaucoup plus grave et cynique que les précédents romans que j'ai lu. Chez Jean-Philippe, il y a toujours une note d'espoir qui pointe le bout de son nez, avec des personnages sympathiques avec lesquels on entre en empathie. Ici, ce n'est clairement pas le cas: Vincent est un être très cynique envers les siens et envers sa vie passée. J'ai senti qu'il faisait ce voyage vers son passé à reculons et les piques qu'il envoie à ses proches et qu'il confie au lecteur peuvent paraître blessanttes. Pourtant, la force de Jean-Philippe, c'est qu'il réussit à offrir un personnage plus complexe qu'il n'y parait. Ce qui fait que je n'ai pas réussi à le détester et que même je le comprenais.
Comme le précédent roman que j'ai lu de Jean-Philippe Blondel, j'ai pris mon temps pour déguster ce roman. Je ne veux plus dévorer les livres de Jean-Philippe en quelques heures. J'ai envie de rester avec ses personnages plus d'une journée. Alors je picorais quelques pages,chaque jour, afin d'en profiter au maximum.
Les souvenirs de Vincent, s'égrènent au fil des pages et on apprend a connaître sa dualité, son entre-deux: sa France désastreuse avec l'appartement partagé avec Etienne, son meilleur ami, les plans de galère, les petits boulots, puis son Angleterre pleine d'espoir, où il construit sa vie avec Susan, sa femme et ses deux filles, son entreprise de restaurant qui cartonne. On peut très bien comprendre qu'il n'ai pas envie, au début du roman de retourner dans sa ville natale, pour y rouvrir de vieilles blessures.
Puis, tout bascule au milieu du roman avec une nouvelle qui m'a bouleversée (et dont je ne vous dirais rien pour garder la surprise) et qui a fait que je n'ai pas pu le lâcher avant la fin.
C'est toujours aussi bien écrit, percutant, avec des phrases courtes comme des uppercuts qui vous estomaque. On ne ressort pas de ce livre indemne. Et surtout ne cherchez pas d'espoir à la fin, il n'y en a pas. Cette parenthèse âpre, dure et violente au niveau des sentiments vous chamboule jusqu'au petit malaise. Mais, après tout, le titre le dit si bien: ce n'est pas une chanson d'amour. C'est simplement l'histoire d'un homme qui a réussit et qui, lors d'un voyage dans son pays natal, rouvre les blessures du passé pour essayer de les exorciser afin qu'elle cicatrise? Maybe.
Au final, un roman de Jean-Philippe Blondel, plus sombre que d'habitude et qui vous chamboule à l'intérieur, jusqu'au petit malaise. C'est percutant, plein de cynisme mais jamais malsain, car, malgré un personnage plus "antipathique" que d'habitude, l'auteur réussit à nous le montrer sous un bon jour. Ce qui fait naître l'empathie. Voilà la grande force de Jean-Philippe: donner une âme à ses personnages pour qu'il prennent forme dans la vie réelle. Et rester vivant dans la tête du lecteur qui aura eu l'impression d'avoir écouter l'histoire d'un inconnu pendant quelques heures, et de quitter un ami, dès le livre refermé.
Jean-Philippe Blondel: This is not a love song, Pocket, 187 pages, 2007
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