samedi 4 juin 2016

Étonnez-moi

4e de couverture: La grâce. C'est ce que voit Joan lorsqu'elle regarde danser Arslan Rusakov. La grâce qui la sépare, elle, petite ballerine à l'Opéra Garnier, de cette superstar du ballet soviétique. Pour s'en approcher, une fois, une seule, Joan se glisse un soir dans sa loge pour une étreinte furtive, passionnée, comme une supplique : « Étonnez-moi. »

Vingt ans plus tard, Joan vit dans une petite ville de banlieue en Californie, où elle se consacre désormais à son mari et à son fils, Harry. Son passé de danseuse, elle a choisi de l'oublier : toutes ces années de passion, d'efforts, de compétition permanente, et surtout ce moment où elle a compris qu'elle ne rejoindrait jamais Arslan au firmament.

Mais comment oublier quand elle regarde Harry danser ? L'enfant montre de prodigieuses aptitudes. Pour lui, Joan va renouer avec l'univers du ballet, ce monde aussi cruel que merveilleux, qui a brisé son coeur, son corps et tous ses rêves. Un monde où évolue encore Arslan Rusakov...


Le monde des Arts, du théâtre, à la littérature,en passant par le chant, la musique et la peinture, m'interpellent beaucoup et j'y suis sensible...sauf une discipline: la danse. Je suis hermétique à ce monde et les spectacles qui concernent cet art, sont le seuls auxquels je n'assiste pas. 
Alors, vous pensez forcément qu'en voyant un chausson de danse sur la couverture du 2e roman de Maggie Shipstead, j'allais tiquer et détester. Il est vrai qu'une petite moue est apparue sur mon visage, mais je laisse toujours une chance aux livres (et surtout ceux des Editions Belfond, car ils m'ont rarement déçu). 

J'ai bien fait de ne pas m'arrêter à la couverture et au sujet (la danse) puisque j'ai apprécié la lecture de ce roman...car, même si la danse n'est pas un art qui m'attire, les coulisses du monde du spectacle en général me fascine et voir l'envers du décor m'intrigue toujours. Puis, même si voir un spectacle de danse n'est pas ma tasse de thé, découvrir les heures de travail derrière cela est très intéressant. 

J'ai été fasciné par l'histoire de Joan, Harry, Jacob, Chloé, Elaine et tant d'autres personnages, dont l'auteur, par petites anecdotes qui s'étalent sur plus de trente ans, nous raconte les destins. Il est vrai que la construction du roman retient l'attention:chaque chapitre raconte un moment de la vie des personnages, passant ainsi d'une année à une autre. Cela permet de donner un rythme et de ne pas lasser le lecteur, mais également de lui laisser la surprise de savoir où les personnages en sont dans leur vie (puisque un ou deux ans sont passé au chapitre suivant). J'ai aimé suivre leurs aventures, et j'ai aimé découvrir les coulisses de l'Opéra de Paris, par exemple. 

En revanche, les flashbacks de la 2e partie (qui reviennent sur l'arrivée d'Arslan, danseur russe, aux Etats Unis durant la guerre froide) ne m'ont pas emballé, (même s'ils éclairent certains points restés dans l'ombre dans la 1ère partie), cassant le rythme de croisière qui s'était installé. Autre petit bémol, la personnalité des personnages: ces derniers sont arrogants,imbus d'eux mêmes, et parfois froids (à part Jacob, le seul scientifique du roman comparé à tous ces artistes), mais, en même temps, je savais à quoi m'attendre, en lisant ce livre, car c'est comme ça que je me représente les danseurs/danseuses...donc, c'est un bémol, qui ne m'a pas trop gêné, en somme, mais qui pourrait fermer la porte de cet univers, à certains lecteurs. En fait, on a du mal à ressentir de l'empathie pour Joan, Elaine, Arslan et Harry adulte (car Harry, enfant, est un personnage attachant, mais qui devient arrogant, dès qu'il devient un danseur prometteur...comme quoi). 

Malgré ces petits bémols, qui ne m'ont pas gâché la lecture (car je m'y attendais un peu) , j'ai été emporté  par l'écriture fluide de Maggie Shipstead, qui nous ouvre les portes de l'univers de la danse (qu'elle connait bien, de par sa mère qui était une amoureuse de cet art): fascinant, à plus d'un titre, il raconte aussi  la guerre froide du point de vue des artistes, et des danseurs en particulier. 
Le titre du roman pourrait être un défi du lecteur lancé à un auteur: en effet, à chaque fois que j'ouvre un livre, je pose implicitement ce défi à l'auteur: "Étonnez-moi" . Eh bien malgré quelques secrets découverts très vite, l'auteur à réussi son pari. Maggie Shipstead nous offre une fin étonnante à laquelle je ne m'attendais pas. 
Alors,si l'univers de la danse vous fait vibrer, ou si vous voulez savoir ce qui se cache quand le rideau se ferme...découvrez le dernier roman de Maggie Shipstead et j'espère qu'il vous étonnera, jusqu'au dernier chapitre. 

Merci à Brigitte et aux  Editions Belfond pour ses choix toujours aussi justes. 

Maggie Sphipstead: Étonnez-moi (Astonish Me), Belfond, 370 pages, 2015


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