vendredi 21 août 2015

Nora ou le paradis perdu

4e de couverture: Cuba, 1956. Nora et Alicia, deux cousines très proches et complices, vivent une enfance heureuse et insouciante.
Mais la révolution éclate, et Fidel Castro accède au pouvoir. Un climat de peur, nourri par la répression, s’installe peu à peu. Nora émigre alors aux États-Unis, laissant Alicia derrière elle, qui s’apprête à vivre des heures sombres à La Havane.
Tandis que Nora, bien nostalgique de son pays natal, s’accommode peu à peu de cet environnement nouveau, Alicia subit les coups durs, dans un Cuba où la situation se détériore. Grâce aux lettres qu’elles continuent d’échanger, Nora comprend que la vie d’Alicia est devenu un enfer. Elle décide alors de retourner à la Havane pour lui venir en aide.
Mais ce qu’elle va découvrir à Cuba est bien loin de tout ce qu’elle pouvait imaginer…


La littérature est un moyen formidable de se divertir, tout en apprenant des choses nouvelles et elle nous offre de fabuleux voyages immobiles vers des contrées magnifiques ou des époques lointaines. (Je ne remercierai jamais assez la vie (et ma mère, une autre grande lectrice) de m'avoir donné le goût de la lecture).

Nora ou le pardis perdu en est un nouvel exemple. Ce roman m'a offert un fabuleux voyage immobile à travers le temps mais également vers un pays merveilleux : Le Cuba des années 50 jusqu'au début des années 80.
De Cuba, je ne connaissais quasiment rien : à part la prise de pouvoir de Fidel Castro et La Baie des Cochons en 1961 ( vue avec un regard américain, mais cet événement a toujours été un peu confus pour moi). C'est donc avec un grand intérêt que je me suis lancé dans la lecture de ce roman.

J'en ressors complètement bouleversé. Cécilia Samartin décrit Cuba d'une manière tellement poétique qu'on a l'impression d'y être et de l'aimer. Elle a également le don de croquer des personnages en leur donnant une âme qu'on a l'impression qu'il ne sont pas que des êtres de papier mais qu'ils sont fait de chair et de sang et qu'ils nous racontent leur histoire, à l'instar de Nora, personnage principal de ce roman, qui vivra l'exil quand ses parents décident de quitter Cuba après l'arrivée de Castro au pouvoir.

A travers le regard de Nora, Cuba se livre à nous sous plusieurs facettes : tout d'abord le Cuba d'avant la révolution : la vie de Nora, avec sa cousine Alicia était rempli d'insouciance, de jeux, de soleil et de bonheur ; ensuite vient le moment de la révolution avec l'arrivée de Fidel Castro, promesse d'un renouveau et d'un nouveau départ, sauf que ce ne sera pas la nouvelle vie que tout le monde espérait. C'est alors le moment de l'exil pour Nora et sa famille et la séparation pour les deux cousines puisqu'Alicia restera à Cuba. Le lecteur oscille alors entre la nouvelle vie de Nora aux Etats Unis, qui doit tout apprendre et se faire une place dans ce pays étranger, et la vie d'Alicia, qui devient progressivement un enfer, vue à ttravers les lettres qu'elle envoie tant bien que mal à sa cousine Nora.

J'ai été touché au cœur par Nora et Alicia : je me suis surpris à trembler pour elles deux (surtout les parties se déroulant à Cuba en 1981), à verser quelques larmes (la plume tendre et poétique de Cécilia Samartin n'y est pas étrangère non plus) devant la vie d'Alicia.

C'est un superbe roman sur l'amitié indéféctible entre deux cousines, qui ne couperont jamais le contact malgré la distance. C'est également un roman magnifique sur l'exil : le fait de se sentir étranger partout et de ne plus savoir d'où l'on vient (Nora n'est pas une américaine, malgré ses années passées en Californie, mais elle n'est plus aussi Cubaine qu'avant. L'exil lui fait perdre ses repères et elle se sent étrangère partout) : la métaphore du « cœur fantôme » traduit bien ce sentiment. Nora ne se livre pas complètement : elle garde pour elle son véritable cœur et offre à voir un « cœur fantôme »...sauf que l'on ne peut pas vivre de cette manière là indéfiniment.

Je n'arrive pas à croire que ce roman a 11 ans (Cécilia Samartin l'a écrit en 2004) : il est au contraire très actuel et je dirai même qu'il fait écho à l'actualité : en ce moment, on parle beaucoup des migrants qui quittent leur pays pour l'Europe et un « monde meilleur » (cela fait même débat depuis plusieurs jours). C'était la même chose à Cuba (et probablement dans d'autres pays), il y a 60 ans : Cécilia Samartin le décrit de fort belle manière : tous ces cubains qui risquent leur vie sur des bateaux, voire des radeaux de fortune pour quitter l'enfer qu'ils vivent dans leur pays et avoir la chance de se construire une vie plus belle aux Etats Unis. En lisant ce livre, j'ai ainsi mieux compris les raisons des migrants. Alors, je sais qu'on ne peux pas tous les accueillir (c'est techniquement impossible) mais j'aimerai parfois qu'on les comprenne mieux et qu'on se mette à leur place. Le roman de Cécilia Samartin est un bon moyen de mieux comprendre ces migrants et d'avoir un autre regard sur eux.

Au final, un roman boulerversant qui vous montre un pays (Cuba) peu présent dans les romans (enfin pour moi, c'est le cas, puisque c'est ma première incursion dans ce pays), avec des personnages forts et touchants qui ne m'ont pas laissé indifférent. Un roman très actuel qui nous montre un visage différent sur l'exil et les migrants (on le voit de l'intérieur, par l'intermédiaire de la voix de Nora). Un roman sur une belle amitié qui défit le temps et l'espace. Je n'oublierai pas de sitôt Nora et Alicia : elles ont trouvé le chemin de mon petit cœur pour le faire chavirer. C''est toujours un bonheur de découvrir la plume d'un nouvel auteur : quand en, plus cette plume vous bouleverse et vous émeu, vous n'avez qu'une envie : la retrouver un jour. Cécilia Samartin est une auteure a découvrir (si ce n'est pas déjà fait) et que je retrouverai avec plaisir en ouvrant un autre de ses romans. 

Merci à Camille et aux Editions de l'Archipel pour la découverte de la plume de Cécilia Samartin et pour ce bouleversant voyage à Cuba. 




Cécilia Samartin: Nora ou le paradis perdu (Broken Paradise), L'Archipel, 453 pages, 2015



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