dimanche 30 septembre 2018

Le paradoxe d'Anderson

4e de couverture: 
Plus rien n’est acquis. Plus rien ne protège. Pas même les diplômes.
À 17 ans, Léa ne s’en doute pas encore. À 42 ans, ses parents vont le découvrir. La famille habite dans le nord de l’Oise, où la crise malmène le monde ouvrier. Aline, la mère, travaille dans une fabrique de textile, Christophe, le père, dans une manufacture de bouteilles. Cette année-là, en septembre, coup de tonnerre, les deux usines qui les emploient délocalisent. Ironie du sort, leur fille se prépare à passer le bac, section « économique et social ». Pour protéger Léa et son petit frère, Aline et Christophe vont redoubler d’imagination et faire semblant de vivre comme avant, tout en révisant avec Léa ce qui a fait la grandeur du monde ouvrier et ce qui aujourd’hui le détruit. Comme le paradoxe d’Anderson, par exemple. « C’est quoi, le paradoxe d’Anderson ? » demande Aline. Léa hésite. « Quelque chose qui ne va pas te plaire », prévient-elle. Léon, dit Staline, le grand-père communiste, les avait pourtant alertés : « Les usines ne poussent qu’une fois et n’engraissent que ceux qui les possèdent.»
Rentrée Littéraire 2018 (#6)
Paradoxe d'Anderson: Paradoxe empirique selon lequel l'acquisition par un étudiant d'un diplôme supérieur à celui de son père, ne lui assure pas, nécessairement, une position sociale plus élevée. 
En partant de cette situation Pascal Manoukian, offre un bel hommage au monde ouvrier, dans un roman drôle et bouleversant qui ne laisse pas indifférent. 
Avec Pascal Manoukian, je sais que je vais retrouver notre quotidien, et bizarrement,cela ne me fait pas peur depuis ma découverte de son précédent roman "Ce que tient ta main droite t'appartient". Ici,il décrit le parcours chaotique d'un couple, Aline et Christophe, travaillant tous deux en usine (elle chez Wooly, fabrique de chaussettes, et lui, chez Univerre, une usine fabriquant des bouteilles) et qui voit leur monde s'écrouler quand un plan social s'abat sur leur deux usines. Malgré les difficultés de leur vie, ils vont tout faire pour que rien ne change, pour ne pas inquiéter leurs enfants, faisant fonctionner leur imagination pour ça. 

Le lecteur oscille ainsi tout le temps, entre le rire et la tristesse devant les situations que l'auteur égrène au fil de cette année de terminale (pour Léa, la fille du couple). C'est un livre toujours juste, rempli de vérités qu font mal. On se retrouve dans le quotidien de plus en plus difficile d'Aline et Christophe, mais l'espoir n'est jamais loin et les découragements du couple, sont contrebalancé par des moments magiques d'espoir et de sourire, ce qui fait que le roman ne tombe jamais dans le pathos. 
L'auteur décrit avec justesse le monde ouvrier d'aujourd'hui, qui se meurt à petit feu au profit du capital. C'est un livre sur les espoirs déçus de la génération Y, qui voit progressivement son monde s'écrouler et ses rêves partir en fumée. C'est violent parfois (la scène du stage de formation d'Aline pour un emploi de vendeur en porte à porte est des plus glaçant), mais les moments de tendresse et de drôlerie sont justement là pour nous laisser souffler. 
Les personnages sont très bien croqués et sonnent tellement vrai: Aline et Christophe pourraient être nos voisins de pallier. On se sent proches d'eux et on a tellement envie qu'ils s'en sortent. Le blanc bec de chez Univerre qui vient de Paris pour négocier la reprise du travail, est vraiment l’archétype du capitaliste en costard cravate qui ne voit devant lui que des chiffres et pas des être humains, parlant une langue de bois qui nous ferait vomir, qu'on ne peut que le détester. 
Tout cette histoire est menée de main de maître et les surprises et les rebondissements sont nombreux, ce qui m'a tenu en haleine jusqu'au final, qui oscille entre sourire et larme, espoir et drame, entremêlant les deux jusqu'à la dernière scène que l'on se prend comme un électrochoc et qui vous laisse complètement sonné. Pascal Manoukian a l'art de nous donner des fins de roman étonnantes qui restent souvent gravé longtemps dans notre mémoire, bien après la fermeture du livre. 

Au final, un roman drôle et bouleversant sur le monde ouvrier, qui nous fait ouvrir les yeux sur cette génération Y qui voit ses rêves s'envoler. Un roman réussi qui parle avec justesse d'un monde qui est en train de disparaître. Si j'osais, je dirai que l'ouvrier est un peu le dernier Jedi de cette industrie qui se meurt et qui ne laisse que des carcasses vides sur des terrains en friche...mais l'espoir est toujours au bout du chemin et, dans le livre, c'est la jeune Léa qui l'incarne.
"Le paradoxe d'Anderson": l'un des romans les plus marquant de cette rentrée littéraire. 

Merci aux Editions du Seuil  pour ce roman drôle et touchant.

Pascal Manoukian: Le paradoxe d'Anderson, Seuil, 295 pages, 2018



Slow Qui Tue #377: J'ai le blues de toi

Le slow qui tue de la semaine à le blues.

Gilbert Montagné: J'ai le blues de toi



Bonne écoute!


mercredi 26 septembre 2018

Le Grand Nord Ouest

4e de couverture: Fin des années 1930. Lorna del Rio quitte précipitamment les beaux quartiers d’Hollywood avec la petite Jessie et fonce vers le Grand Nord-Ouest du Yukon et de l’Alaska, sur les routes, par mer et jusque sur les anciennes pistes indiennes. Son périple croise les légendes de l’épopée de l’or et des trappeurs d’antan, avec pour seul guide une mystérieuse carte folle et ses munitions de première nécessité : son étole de vi­son, sa trousse à maquillage, son colt, une fortune volée dans le coffre d’Oswald Campbell, feu l’obèse papa de Jessie ; et surtout une sacoche pleine de vilains secrets. D’où vient-elle, que fuit-elle ? Que cherche l’intrépide pin-up, qui change de nom à tout bout de champ et ment comme elle respire ?
L’histoire de cette cavale, c’est Jessie qui, quinze ans plus tard, un soir d’avril 1954, la raconte à Bud Cooper, dans la banlieue d’Anchorage. Car qui d’autre que Bud tendrait l’oreille pour comprendre ce qu’a vécu Jessie, l’année de ses six ans, protégée par Kaska, l’Indienne gwich’in, puis réfu­giée dans une autre tribu, et enfin exfiltrée par l’homme que le FBI a payé pour “délivrer” la fillette ?

Rentrée Littéraire 2018 (#5)

Le nouveau roman d'Anne-Marie Garat nous invite à un grand voyage, autant extérieur, qu'intérieur, au pays du grand nord ouest alaskaïen. 

De cette première incursion dans le style et l'univers d'Anne Marie Garat, je retiendrai son style très littéraire, dans lequel j'ai eu un peu de mal à entrer au départ...puis vers la soixantaine de pages, je me suis immergé dans cette histoire fantastique. 
A quel beau voyage Anne Marie Garat nous convie, lors du périple de cette petite fille de 6 ans, emportée par sa mère vers le "Grand Nord Ouest de ses rêves"! Il y a de la magie dans ce roman, teintée de légendes amérindiennes qui, par l'intermédiaire de Kaska et Hermann, nous convie à un rêve fantasmagorique. 

C'est d'ailleurs la destination qui m'a amené vers ce livre: le grand nord  que je ne connais pas du tout, et tout comme la petite Jessie, je me suis laissé embarquer dans cette fuite en avant,porté par les rêves de cette petite fille de 6 ans. 

Alors, je vous le dis tout de suite, ce livre n'est pas simple et il se lit, ou plutôt se déguste, lentement. En premier lieu, le style de l'auteure, très travaillé, est un peu complexe, mais tellement poétique qu'on se laisse charmer (même si j'ai décroché sur certains passages, mon esprit revenait toujours dans ce grand nord ouest). Mais aussi la forme spéciale du roman. En effet, il n'y a aucun chapitre et saut de pages. Juste des paragraphes. Ce qui fait que je ne savais jamais à quel moment arrêter ma lecture (car oui, c'est un livre qu'il faut poser pour pouvoir laisser reposer son esprit et essayer de comprendre le but du voyage). Et puis, c'est qu'il y a une double narration en "je" qui s'installe: celle de la petite Jessie, 6 ans, et celle de Bud Cooper, pilote, qui recueille Jessie, 15 ans plus tard, et à qui cette dernière raconte son périple alaskaïen, quand elle avait 6 ans. Puis  progressivement, on prend un rythme lent et patient qui nous porte, car, mine de rien, il y a une histoire et un mystère, nommé Lorna Del Rio, la mère de la petite Jessie, qui s'installe: pourquoi a t'elle fuit à la mort de son mari, pour ces grandes étendues sauvages? Je vous assure que les réponses à ces questions vous étonneront. 

Malgré ses difficultés de lectures auxquelles je ne suis pas très habitué, j'ai beaucoup apprécié, la magie de ce roman et le voyage fantastique qu'il m'a procuré. Il y a  des légendes indiennes, Le petit Kid de Chaplin qui s'invite dans l'histoire, tout comme une certaine Alice, en la personne de Jessie, qui découvre son pays des merveilles. 
Toutefois, j'aurai un petit bémol, pour la fin. Le récit de Bud prend le pas sur celui de la petite Jessie (alias Qui Donnent ses dents, ou Niyah), ce  qui est logique puisqu'on avance dans le récit, mais j'aurai tellement aimé que la petite Jessie continue de nous raconter son périple.Son voyage intérieur et sa voix étaient si beaux.  Il y a également quelques répétitions de certains éléments de l'intrigue sur la fin, mais ceci n'est pas un reproche: bien au contraire, ils ont été salutaires pour tout remettre en ordre, en ce qui concerne l'histoire rocambolesque de Lorna et de sa petite fille. 

Au final, je ressors enchanté de ce roman. Une belle découverte qui m'a fait voyager au delà de mes rêves les plus fous. Le style travaillé et poétique d'Anne Marie Garat se prête bien à ces légendes amérindiennes. Et on a qu'une hâte: de prendre la route vers le Grand Nord Ouest de nos rêves: peut être y croiseront nous la route de Jessie, Kaska, Hermann ou Bud. Et pourquoi pas,au bout du voyage, réussir à trouver le chemin vers une vie rêvée. 

Merci aux Editions Actes Sud pour ce merveilleux voyage poétique vers le Grand Nord Ouest de "ses" rêves. 

Anne-Marie Garat: Le Grand Nord Ouest, Actes Sud, 316 pages, 2018


La Discothèque du 20e siècle #288

En 1931, la grande Joséphine Baker nous offrait son plus grand succès.

Joséphine Baker: J'ai deux amours (1931)


La ceinture de bananes...Les contorsions invraisemblables, à la fois sexy et sauvages...Les yeux qui roulent et le sourire éblouissant...Cette quasi nudité qui scandalise les prudes et bouleverse ses fans...Évoquez le nom de Joséphine Baker et aussitôt des images de légendes vous reviennent à l'esprit: la Revue Nègre, le Paris des "Années Folles", vers 1925-26, la fabuleuse histoire de cette petite danseuse qui galérait sur Broadway et qui devient meneuse de revue aux Folies Bergères! Dès lors, Miss Baker enchaîne les succès, en commençant par La Petite tonkinoise et J'ai duex amours en 1931... (Source: Fascicule "La Discothèque du 20e siècle: 1930/39", Polygram Direct)

Bonne écoute!


dimanche 23 septembre 2018

Slow Qui Tue #376: Rough Boy

Le slow qui tue de la semaine veut montrer à tout le monde que c'est un dur.

ZZ Top: Rough Boy



Bonne écoute!


vendredi 21 septembre 2018

Les Roses du Montfort

4e de couverture: Au premier jour des vendanges de 1899, Louise fête ses dix-huit ans sur les pentes du Montfort. Son père, Charles Vinot, viticulteur sur ces coteaux des Vosges, veille sur elle comme sur sa vigne : sans relâche. Quitte à sacrifier son bonheur, il est prêt à la marier à un vieux garçon dont la parcelle avoisine la sienne.
Mais le phylloxéra, ce fléau, ruine les vignobles. Grâce aux conseils d’un pépiniériste réputé du pays et d’un spécialiste alsacien, la vigne de Vinot sera reconstituée. Le temps d’une passion avec un ingénieur venu du Nord, le bonheur de Louise sera épargné, jusqu’à ce que cet homme révèle sa nature profonde…
Le travail patient de la terre et du vin, la paix retrouvée avec son père suffiront-ils pour que Louise, jeune rose à peine éclose, emportée par le tourbillon de l’Histoire, s’ouvre enfin au bonheur et à la liberté ? 


Rentrée Littéraire 2018 (#4)

Le dernier roman de Gilles Laporte fait la part belle aux gens de la Terre, et plus particulièrement ici, aux vignerons. 

Je dois vous dire que j'ai beaucoup apprécié ce livre. Même s'il n'y a pas d'action à chaque page, c'est la plume de l'auteur qui nous emporte: une plume d'antan qui fait chanter les mots et nous montre tout son amour pour cette région des Vosges qu'il connait tant. 
Durant vingt ans, l'on va suivre la famille Vinot, Charles et Marie, les parents, et Louise, leur fille, sur leur terre du Montfort, entre coups dur et accalmie, c'est la valse des saisons qui se joue devant nos yeux ébahis. 
Certes, chaque chapitre se concentre sur une période précise, passant ainsi les mois et les années d'une page sur l'autre, mais cela ne m'a pas dérangé. Je l'ai pris comme des instants de la vie d'une famille sur près de vingt ans, ce qui donne un bon rythme au roman. 

Ce fut également un roman fort instructif sur les vignes et surtout, le philloxera, cet insecte qui ravagea les vignes au début du XXe siècle. Ainsi, Charles, le père de famille décide de se battre et de trouver une solution a ce problème. Il ira même jusqu'en Alsace (alors zone occupée par les Allemands à l'époque) pour aller chercher des plants de ceps sains, quitte à prendre tous les risques. 
J'ai également aimé la relation compliquée de Charles et Louise: père et fille n'arrivent pas forcément à se comprendre et c'est Marie la mère, qui fait tampon entre les deux afin de protéger sa fille des projets de mariage que Charles met en place pour agrandir ses vignes. 
J'ai surtout aimé suivre cette relation père-fille sur plusieurs années. L'évolution de cette relation se transforme au gré des malheurs et des joies, et cela est très beau. 

Ce roman, c'est un bel hymne à la vie et à la terre. C'est aussi un bel hommage que l'auteur rend à sa région:les Vosges. J'ai imaginé, ces montagnes, ces champs, ces vignes courant tout au long des vallées. Gilles Laporte fait revivre ces paysages d'antan et leurs habitants en leur redonnant une parole qu'il ne faut pas oublier. 
Je remarque également que je reprend de nouveau plaisir à retrouver cette littérature régionale vers laquelle je m'étais éloigné depuis fort longtemps. Je retrouve ainsi les saveurs de mon enfance, et, le temps d'une lecture, je me laisse envahir par la nostalgie. Je renoue ainsi un dialogue muet avec ma grand-mère, dont c'était le genre de lectures qu'elle affectionnait. 

Au final, un roman fort touchant, vers lequel on se laisse bercer par le rythme des saisons qui passent, avec une plume magnifique qui redonne vie à ces gens de la terre et de la vigne. Ce moment de lecture fut fort plaisant et bienvenue. Un petit bonbon d'enfance qui m'a fortement plu, et que ma grand-mère aurait appréciée. 

Merci aux Editions Presses de la cité pour ce joli moment de nostalgie heureuse. 

Gilles Laporte: Les Roses du Montfort, Presses de la Cité, collection "Terres de France", 395 pages, 2018


mercredi 19 septembre 2018

La Discothèque du 20e siècle #287

En 1998, une jeune chanteuse fait son entrée dans les hits parades avec ce titre.

Loïs Andrea: In (1998)



Sa voix limpide comme un cristal de roche et sa fraîche blondeur ont surgi au cours de l'été 1998 sur les ondes et les écrans pour s'inscrire dans le ton de la mode du groove avec son single In. Dès l'âge de 11 ans, au coeur de sa Normandie natale, Loïs avait décidé de vouer sa vie à ne carrière dans le monde du spectacle. Après des années de pratique de la danse classique, c'est vers la musique qu'elle s'est tournée, et c'est à Paris qu'elle a pris des cours de chant, de comédie et d'expression corporelle. A 21 ans son chemin a croisé celui du compositeur Jean-Patrick Allouche: un coup de foudre artistique dont on n'a pas fini d ressentir les effets: écoutez l'album Insomnies pour vous en convaincre. (Source: Fascicule "La Discothèque du 20e siècle: 1998" Polygram Direct)

Bonne écoute!


dimanche 16 septembre 2018

Slow Qui Tue #375: Le premier pas

Le slow qui tue de la semaine joue les grands timides.

Claude Michel Schönberg: Le premier pas



Bonne écoute!


samedi 15 septembre 2018

Héléna

4e de couverture: Kansas, un été plus chaud qu’à l’ordinaire.
Une décapotable rouge fonce sur l’Interstate. Du sang coule dans un abattoir désaffecté. Une présence terrifiante sort de l’ombre. Des adolescents veulent changer de vie. Des hurlements s’échappent d’une cave. Des rêves de gloire naissent, d’autres se brisent.
La jeune Hayley se prépare pour un tournoi de golf en hommage à sa mère trop tôt disparue.
Norma, seule avec ses trois enfants dans une maison perdue au milieu des champs, essaie tant bien que mal de maintenir l’équilibre familial.
Quant à Tommy, dix-sept ans, il ne parvient à atténuer sa propre souffrance qu’en l’infligeant à d’autres…
Tous trois se retrouvent piégés, chacun à sa manière, dans un engrenage infernal d’où ils tenteront par tous les moyens de s’extirper. Quitte à risquer le pire.
Et il y a Helena… 
 
Jusqu'où une mère peut-elle aller pour protéger ses enfants lorsqu'ils commettent l’irréparable ? Après Les loups à leur porte, Jérémy Fel aborde cette vertigineuse question dans une grande fresque virtuose aux allures de thriller psychologique.



Rentrée Littéraire 2018 (#3)

2e roman de Jérémy Fel, Héléna est un page turner glaçant, qui vous prend sur sa route pour ne plus vous lâcher avant la fin. 

Alors, je préfère vous prévenir, ce roman ne conviendra pas à tout le monde. Il est très noir et cruel, et pour le savoir, il faut juste lire le premier chapitre du roman. Celui ci vous place dans une ambiance dérangeante qui provoque une gêne. (Il est vrai que par la suite, la centaine de pages qui suit, rien ne prédit une catastrophe glaçante et cruelle, car elles nous présentent les personnages que l'on va suivre sur plus de 700 pages, mais il faut toujours garder en mémoire ce premier chapitre où l'on voit un ado de 17 ans, massacrer un chien, car elles prédisent la noirceur qui nous attend lors de cet été suffocant.)

Je dois dire que j'ai été happé de suite par ce livre. Ce thriller psychologique nous emmène loin dans la noirceur, mais il est impossible de décrocher une seule minute. Jérémy Fel nous prend par la main et ne nous lâche plus avant le mot final, car même si vous devez quitter le roman un seul instant, pris par d'autres activités, il continue de vous hanter, et vous êtes irrésistiblement attiré vers lui et vous revenez alors dans cet enfer, avec un plaisir non dissimulé j'avoue. 

Dans ce roman, nous allons suivre 4 personnages (Hayley, jeune fille qui part pour un tournoi de golf et qui tombera en panne sur la route, Norma, mère de trois enfants, qui, accompagnée de sa fille Cindy, prendra en charge Hayley et l'emmènera chez elle; Tommy, jeune ado un peu (voire beaucoup) perturbé, et Graham, jeune homme qui veut prendre un nouveau départ dans la vie, avec sa petite amie, Amber). 
Puis un drame survient et chacun à sa manière, va vouloir sortir de ce piège par tous les moyens, quitte a commettre parfois l'irréparable. 

Voilà un roman haletant, aux personnages à la psychologie fort bien dessinée, et qui nous emporte loin dans l'horreur glaçante. Il est vrai que chacun des personnages a un côté très sombre, sauf, peut être Graham, qui, pour moi, est le personnage le plus solaire de ce roman, mais qui va jouer sa partition dans cette horreur. 
Honnêtement, je me suis demandé comment Jérémy allait faire pour tenir son histoire sur plus de 700 pages, sans qu'il y ait de temps mort ou de longueurs. Eh bien, cet auteur est follement génial car il tient son histoire au cordeau, avec de nombreux twists que je n'ai pas vu venir  et qui m'ont laissé sur le carreau, tellement tendu pour savoir jusqu'où il pouvait aller. Et il va aller très loin dans la noirceur. Pourtant, il y a un côté conte cruel qui se dégage dans certaines de pages, un côté onirique qui nous emporte (comme la tornade qui emporte Dorothy à Emerald City),  mais qui est tout de suite après contrebalancé par la réalité la plus cruelle qui soit. 

C'est aussi un roman qui parle de la maternité, et de ce qu'une mère est capable de faire pour ses enfants. L'auteur a formidablement compris ce que peut être une mère pour ses enfants, et le personnage de Norma, que l'on pourrait détester par moment, n'en reste pas moins très humaine, car, elle a cette dualité qui est en chacun de nous. Et les autres personnages ont cette dualité, qui fait qu'on ne peut pas les détester complètement, malgré leurs actes. De ce point de vue psychologique, l'auteur a réussi à donner chair à ses personnages de papier. 

Le titre du livre m'a longtemps intrigué, car je ne voyais pas le lien entre lui et l'histoire, sauf que ce lien s'explique dans les dernières pages du livre. D'ailleurs cet épilogue ferme la boucle de toute cette tragédie et les toutes dernières pages m'ont beaucoup ému, je dois dire. 

Autre avertissement, avant de vous plonger dans ce roman: celui ci est intrinsèquement lié au premier roman de l'auteur, "Les Loups à leur porte": le point commun entre les deux se trouve être le lieu de l'action. La maison où habite Norma est la même que celle des "Loups à leur porte". Mais je vous rassure,on peut très bien lire ce roman sans avoir lu le précédent (même si l'auteur fait référence à certains personnages de son premier roman). D'ailleurs, cela ne va pas m'empêcher de lire ce premier roman ,tellement j'ai adoré l'ambiance d'"Héléna" et la plume de Jérémy Fel. 

Vous l'aurez compris, ce roman a été une claque monumentale, qui m'a emporté très loin dans la noirceur humaine, qui m'a parfois glacé le sang, mais dont je ne pouvais pas détacher mes yeux, tellement hypnotiser par la plume de l'auteur et l'ambiance qu'il a instaurer dans ces pages fort sombres. Un thriller psychologique que je vous encourage fortement à découvrir...si vous n'avez pas peur de partir au plus profond de la noirceur de l'âme humaine. 

Jérémy Fel: Héléna, Rivages, 732 pages, 2018



mercredi 12 septembre 2018

La Discothèque du 20e siècle #286

En 1996, un duo de rappeurs fait danser sur les dancefloor avec ce titre.

Addis Black Widow: Innocent (1996)


Duo rap originaire d'Oakland en Californie, mais transplanté en Suède, la "Veuve noire d'Addis" publie un premier album en 1995, intitulé Breakin' DreadInnocent fut un gros succès de l'hiver 1995-96 et rien qu'à l'écouter, on a des fourmis dans les jambes et on se prend d'une furieuse envie de danser! (Source: Fascicule "La Discothèque du 20e siècle: 1996", Polygram Direct)

Bonne écoute!


dimanche 9 septembre 2018

Slow Qui Tue #374: Bridge over troubled water

Le slow qui tue de la semaine sera un soutien, tel un pont enjambant l'eau trouble.

Simon & Garfunkel: Bridge over troubled water



Bonne écoute!


vendredi 7 septembre 2018

Sous les branches de l'Udala

4e de couverture: Dans la lignée d’Imbolo Mbue et de Chimamanda Ngozi Adichie, la découverte coup de cœur d’une voix puissante et singulière. Nommé pour de nombreux prix littéraires, porté par une atmosphère foisonnante où se bousculent les sensations, un roman bouleversant de courage sur la quête de soi, le poids dévastateur de la religion et des traditions, et la force éperdue de l’amour.


 1968. Le Nigeria et la jeune république du Biafra se déchirent, les conflits interethniques sont chaque jour plus meurtriers, la population sombre peu à peu dans le désespoir.
Au cœur de cet océan de violence, la jeune Ijeoma tombe amoureuse d’Amina.
La relation des deux adolescentes est rapidement découverte et tous, mères, pères, voisins, amis, se chargent de leur rappeler qu’aux yeux de Dieu et de la loi, leur amour est criminel.

Pour Ijeoma, un choix se dessine alors : se cacher et suivre ses désirs ; ou s’oublier et jouer le rôle que la société lui impose.
Une existence prisonnière du mensonge, est-ce la seule issue qui s’offre à Ijeoma ?

Rentrée Littéraire 2018  (#2)
71 pays dans le monde considèrent encore l'homosexualité comme un crime. Dans 13 pays, l'homosexualité est même passible de la peine de mort. Le Nigeria (où se déroule l'action de Sous les branches de l'Udala) fait partie de ces 13 pays là. 
J'étais curieux de suivre une jeune héroïne homosexuelle dans ce pays là. C'est pourquoi je me suis plongé avec curiosité et envie dans le premier roman de Chinelo Okparanta. Je dois dire que je suis passé par plusieurs sentiments: l'étonnement, l'exaspération, la colère l'effroi, devant tout ce que vit la jeune Ijeoma. Composé de plusieurs parties bien distinctes, le roman débute, en pleine guerre civile dans les années 70, par la mort du père d'Ijeoma, lors d'un raid aérien. Sa mère voulant la protéger des conflits va l'envoyer chez un professeur à Aba. C'est là qu'elle va faire la connaissance d'Amina et découvrir un sentiment nouveau pour elle: l'amour. 
C'est un roman choc qui va vous faire partir à la rencontre d'une jeune fille perdue dans l'océan des sentiments. Elle va se poser beaucoup de questions quant à ce désir qui naît en elle, pour une jeune fille, quant à la conduite à avoir et comment faire pour y faire face...surtout dans un pays qui condamne l'homosexualité. J'ai souvent été incrédule et énervé contre la mère d'Ijeoma, qui, par l'intermédiaire de la Bible va vouloir rééduquer sa fille après qu'elle ait appris la liaison de celle ci avec une fille. J'ai souvent fait des bonds en voyant comment la mère d'Ijeoma interprète la Bible, par rapport à l'homosexualité, et les questions que se pose Ijeoma par rapport à ça so,nt des plus légitimes. Les dialogues entre la mère et la fille sont d'ailleurs très intéressants, même si je trouve les réponses de la mère souvent aberrantes. J'ai le souvenir d'un dialogue entre la mère et la fille sur l'histoire d'un paysan qui recueille un étranger chez lui. (c'est à Sodome) Il va alors offrir sa fille aux Sodomites (les habitants de Sodome) pour qu'ils la violent plutôt que de livrer l'étranger. Devant ce récit, Ijeoma se demande pourquoi un paysan livrerait sa fille plutôt que l'étranger. Et sa mère de répondre qu'un homme couchant avec un homme est une abomination. (Je dois dire que j'ai bondi en lisant cela) Pourtant, au fil des pages, j'ai compris que la mère d'Ijeoma ne cherchait qu'à protéger sa fille. 
Je me suis retrouvé dans le personnage d'Ijeoma, même si nous n'habitons pas le même pays: dans ses questionnements, ses combats, et je voulais savoir les choix qu'elle allait faire. La relation entre Ijeoma et Amina est très sensuelle et cette sensualité à été très bien retranscrite par Chinelo Okparanta, sans voyeurisme ni vulgarité. 
J'ai trouvé la plume de Chinelo Okparanta fluide et chantante. Je trouve que ce fut une belle idée, de la part de la traductrice de laisser certains dialogues dans la langue d'origine d'Ijeoma, afin de ressentir cette sonorité particulière. Cela nous immerge complètement au Nigeria. J'ai été bouleversé par certains passages et je me suis surpris à trembler devant certaines situations. Ce roman  m'a permis de me  rendre compte comment se passe la vie dans ce pays d'Afrique où il ne fait pas bon être homosexuel. 
Je ne peux que vous encourager à lire ce livre nécessaire pour comprendre et voir que le chemin sera long avant que l'homosexualité ne soit pas vu comme quelque chose de contre nature. Ce roman est aussi le portrait touchant et juste d'une jeune femme qui va tout faire pour survivre dans ce pays qui ne l'accepte pas telle qu'elle est, quitte à se renier. Un roman de la rentrée littéraire qui sort de l'ordinaire, pour peut être éveiller les consciences.La littérature sert à ça quelquefois. 
Merci aux Editions Belfond pour ce roman bouleversant et nécessaire. 
Chinelo Okparanta: Sous les branches de l'Udala, (Under the Udala trees), Belfond, 367 pages, 2018


mercredi 5 septembre 2018

La Discothèque du 20e siècle #285

En 1996, Zucchero revenait sur le devant de la scène avec ce titre devenu un tube.

Zucchero: Il volo (1996)


Né en Italie en 1955, le Joe Cocker italien a mis des années à percer. En 1987, il atteint le sommet des ventes dans son pays natal grâce à l'album Blues, qui contient la version originale de Senza Una Donna qu'il rechantera plus tard, avec le succès que l'on sait, en duo avec Paul Young. Sur Oro, Incenso et birra, publié en 1989, on remarque des invités prestigieux tels que Clarence Clemons (du groupe de Bruce Springsteen), Eric Clapton ou Ennio Morricone...Ses qualités indéniables de chanteur souls sont mises en valeur sur l'album Spirito di vino, 6 ans plus tard, dont est tiré le tube Il volo,, slow imparable plébiscité par le public français (n°2 au Top Singles). (Source: Fascicule "La Discothèque du 20e siècle: 1996", Polygram Direct)

Bonne écoute!


dimanche 2 septembre 2018

Slow Qui Tue #373: Tien an men

Le slow qui  tue de la semaine ne veut pas baisser les bras devant l'adversité.

Calogero: Tien An Men



Bonne écoute!


samedi 1 septembre 2018

La Neuvième Heure

4e de couverture: Jim agite doucement la main en refermant la porte derrière sa femme Annie qu’il a envoyée faire des courses. Il enroule alors soigneusement son pardessus dans le sens de la longueur et le pose au pied de cette même porte. À son retour, c’est un miracle si Annie ne fait pas sauter la maison entière en craquant une allumette dans l’appartement rempli de gaz. 
Les chevilles enflées après une journée à faire l’aumône, sœur Saint-Sauveur prend la relève des pompiers auprès de la jeune femme enceinte et des voisins sinistrés de ce petit immeuble de Brooklyn. La nouvelle du suicide étant déjà parue dans le journal, elle échouera à faire enterrer Jim dans le cimetière catholique, mais c’est très vite toute la congrégation qui se mobilise : on trouve un emploi pour Annie à la blanchisserie du couvent où sa fille Sally grandit sous l’œil bienveillant de sœur Illuminata, tandis que sœur Jeanne lui enseigne sa vision optimiste de la foi. Et quand cette enfant de couvent croira avoir la vocation, c’est l’austère sœur Lucy qui la mettra à l’épreuve en l’emmenant dans sa tournée au chevet des malades. 

«Si j’étais Dieu, avait coutume de dire sœur Saint-Sauveur, je ferais les choses autrement.» À défaut de l’être, les Petites Sœurs soignantes des Pauvres Malades, chacune avec son histoire et ses secrets, sont l’âme d’un quartier qui est le véritable protagoniste du roman d’Alice McDermott.


Rentrée Littéraire 2018 (#1)

Pour débuter cette rentrée littéraire 2018, mon choix s'est porté sur le dernier roman d'Alice McDermott, "La Neuvième Heure". 
Je dois dire que depuis quelques années, je ne lis plus les 4e de couverture en entier de peur d'être spoiler (ou "divulgâché" comme disent nos amis québécois)...sauf que ce procédé est à double tranchant. Un résumé peut nous donner une mauvaise piste sur l"histoire du livre. 

C'est ce qui m'est arrivé avec "La neuvième heure". En lisant le début de la 4e de couverture, je pensais lire un livre sur le suicide d'un homme (Jim) dans un immeuble, suicide qui provoque un incendie, et les conséquences de ce suicide et de cet incendie sur les habitants de l'immeuble. Eh bien pas du tout. ceci n'est juste que le point de départ du roman et l'incendie est vite expédié, car à la fin du premier chapitre, quelques mois se sont passés. 
Ensuite, l'histoire, va alors s'intéresser à la veuve de Jim, Annie, sa fille Sally, et surtout, aux bonnes soeurs qui vont prendre cette veuve et son  enfant sous leurs ailes. 

Voilà, "La neuvième heure" est plus un roman sur les bonnes soeurs, que sur le suicide d'un homme et ses conséquences. 
Alors, cela ne m'a pas déplu,le roman est intéressant et la plume de l'auteure est des plus belles et maîtrisées. Elle dresse un portrait magnifique de cette congrégation de bonne soeur et donne à rencontrer un personnage fort intriguant et complexe en la personne de Sally, la fille d'Annie, qui va être élevée par les soeurs, dans la foi chrétienne. De plus, il n'y a pas de bondieuserie, chose que l'on pourrait craindre dans ce genre de livre. Sauf que je ne m'attendais pas à lire un roman sur les bonnes soeurs, et il m'a fallu une bonne centaine de pages pour me faire à cette idée et  prendre plaisir à ma lecture, quand l'idée à fait son petit bonhomme de chemin dans ma tête. 

Le roman est très beau et poétique: on sent comme une tragédie irlandaise qui se joue sous nos yeux. Ce qui a retenu mon attention dans le roman, c'est la complexité du personnage de Sally. Il se dégage de cette jeune fille devenue jeune femme, une dualité qui oscille entre le bien et le mal. On sent l'influence des Soeurs dans son éducation, qui amène son désir de marcher sur leurs pas, mais le diable est là qui se cache dans les coins et qui lui fait faire des choix différents. Elle oscille entre le bien et le mal et cette nuance de gris est des plus intéressantes. 
Alice McDermott nous conquiert aussi par les portraits des bonnes soeurs qu'elle dessine avec tendresse et humanité, leur donnant un visage des plus humains. En commençant par Soeur Saint Sauveur,qui sera sur les lieux de l'incendie et qui prendra en charge Annie et son enfant à naître. Puis viendra, Soeur Jeanne, qui deviendra amie avec Annie, et la vieille et douce Soeur Illuminata, blanchisseuse au couvent et qui se prendra d'affection pour la petite Sally. Je vous assure qu'après ce livre, vous aurez un autre regard sur ces dames de grande charité. 

Vous l'aurez compris, je ressors déconcerté par ce roman, car il ne m'a pas apporté ce que j'en attendais. C'est cependant, un fort joli roman que je vous recommande si vous voulez découvrir les bonnes soeurs sous un nouveau jour. Et rien que pour la plume de l'auteure, belle et raffinée, et pour le personnage ô combien complexe de Sally, ce livre vaut le coup d'être lu. Alors, à vous maintenant de vous faire votre opinion. 

Merci aux Editions de la Table Ronde pour cette jolie mais déconcertante découverte. 

Alice McDermott: La Neuvième Heure, (The Ninth Hour), La Table Ronde, collection Quai Voltaire, 282 pages, 2018