lundi 26 avril 2021

Père et fils

Résumé: Charlie Goldwyn est avocat dans un prestigieux cabinet new yorkais. Depuis la mort de sa femme, deux ans plus tôt, il se noie dans le travail, et néglige son fils, Caleb, un petit garçon de cinq ans. Sa vie bascule le jour où, suite à un banal écart de conduite, sa boîte le licencie. Ce revirement brutal qui voit s'effondrer ses ambitions professionnelles le pousse à se tourner vers Caleb. Au contact de son fils, il prend conscience des priorités de la vie. Et, pour la première fois, se découvre le père qu'il se croyait incapable d'être.
 

Quelquefois, il suffit juste de voir la couverture d'un livre pour se dire qu'on va de suite l'aimer. 

C'est ce qui m'est arrivé avec le 2e roman de Cristina Alger, Père et fils. Ce petit bonhomme sur la couverture (qui représente bien le petit Caleb du roman) m'a de suite fait craquer. 

En commençant ma lecture, j'étais à priori, déjà conquis...sauf que je ne pensais pas que ce serait à ce point là. C'est bien simple, j'ai carrément bouffé ce livre en un week-end. Tout m'a plu, dans ce roman: le lieu, tout d'abord: New York. Retourner dans la Grosse Pomme fut un plaisir incommensurable et me rappelle à chaque fois que je la croise, de très beaux souvenirs. Ensuite, les personnages: le petit Caleb, tout d'abord, qui est l'un des enfants les plus mignons et des plus réalistes que j'ai pu croiser dans un livre. Ce petit bonhomme de 5 ans, est la lumière de son père, Charlie, avocat d'affaires qui a vu sa vie bouleversée par la mort de sa femme dans un accident d'avion. Charlie essaie d'être un bon père, mais il est peu présent pour lui, son travail lui prenant tout son temps. Heureusement, Zadie, la soeur de Charlie, est là pour l'épauler. J'ai aimé cette fratrie: malgré les difficultés, ils se serrent les coudes, malgré parfois quelques désaccords, comme dans toutes les familles. 

Mais ce qui retient l'intérêt dans ce livre, ce sont les thèmes abordés avec justesse, force, et sans pathos. (avec un sujet pareil, il est souvent difficile de ne pas trop en faire): tout d'abord, le deuil et toutes les étapes que Charlie doit passer, tout en faisant comprendre à son petit bonhomme de 5 ans, que sa mère ne sera plus jamais là. C'est abordé avec finesse, sans tomber dans la tragédie. Il est vrai qu'on pourrait penser que Caleb est trop mature pour son âge, mais, en fait pas du tout. Il reste le petit garçon qu'il est, sauf que bien évidemment perdre sa maman, lui fait voir la vie autrement. 

Un des autres thèmes abordés, c'est la paternité et comment Charlie doit jongler avec elle et son boulot, très prenant. Cristina Alger, qui a évolué dans le milieu financier, sait très bien nous ouvrir la porte de ce milieu de requin. Charlie a tout donné à son boulot pendant 10 ans, pour tout perdre en 1 soirée...mais ne serait ce pas le bon moment pour prendre un nouveau départ. Alors, certes, le parcours est peut être un peu convenu, car déjà vu, mais il est bien mené. Et puis, surtout ce sont les personnages qui emportent le tout; Que ce soit les membres de la famille Goldwyn, ou les meilleurs amis comme Baloo, Buck, et Elise, on ressent de l'empathie pour tout ce joli petit monde. 

Toute cette alchimie, on la doit à une écriture fluide, addictive, et à des dialogues justes, et souvent drôles. C'est bien simple, le roman se lit d'une traite, sans s'en apercevoir, car le lecteur a envie de savoir comment tout cela va se terminer...et le final n'est pas forcément celui auquel je m'attendais, donc aussi ravi de ce point de vue là. Les nombreux retours en arrière dans la vie de couple de Charlie et Mira, sont aussi un point marquant du livre car, j'ai été beaucoup touché par Mira,  personnage sympathique et bienveillant, qui redonne un sens à  la vie de Charlie. Ces retours en arrière ont fait que je me suis attaché à Mira, et sa disparition me rendait d'autant plus triste, à mesure que je faisais connaissance avec sa vie passée. 

Non, franchement, parfois, il faut faire confiance à son instinct et à la couverture d'un livre (bien choisie pour ce livre là). pour passer un agréable moment de lecture. Père et fils est un roman enlevé et sympathique qui a égayé mon week-end, mais dans lequel il se dégage une certaine profondeur. Je serai maintenant curieux de découvrir un autre roman de l'auteure. 


Cristina Alger: Père et fils, (This was not the plan), Albin Michel, 378 pages, 2017





vendredi 23 avril 2021

Les Folles Années Tome 2 à 4

Résumé1920. La Grande guerre et la grippe espagnole deviennent de mauvais souvenirs, la vie reprend son cours. Au sein de la famille de Marie Picard, les enfants suivent leur destin. Thalie se trouve à Montréal, entichée plus que jamais de ses études de médecine. De son côté, Mathieu découvre à la pratique du droit des à-côtés déplaisants. Son emploi au bureau du Procureur général l'amène à jouer un rôle de premier plan dans une histoire susceptible de donner des haut-le-cœur à tout le Québec : celle d'Aurore Gagnon, l'enfant martyre de Sainte-Philomène-de-Fortierville.

Risque de Spoilers sur les tomes précédents. 

Venant juste de terminer le 4e tome, j'ai eu envie de revenir sur cette saga qui me tient à coeur (et qui fait suite aux "Portes du Québec") et dont j'ai lu les tomes précédents l'année dernière, mais que je n'avais pas pris le temps de chroniquer, étant en pause bloguesque. Je vais tenter de vous donner mon avis sur les tomes 2 et 3, d'après les souvenirs que j'en garde. 

Mathieu et l'affaire Aurore

Après un premier tome léger et de transition où l'action n'était pas très présent, le tome 2 nous plonge dans une affaire qui défraya la chronique dans les années 20 au Québec. 
Alors, ayant lu ce tome 2, un an et demi après le tome 1, j'avais peur de ne pas retrouver mes marques. Heureusement, ce ne fut pas le cas, car ce tome est vraiment déconnecté de l'histoire personnelle des héros. Il se centre principalement sur l'affaire Aurore Gagnon, cette petite fille, victime de maltraitance de la part de sa belle-mère et de son père, et qui meurt d'un empoisonnement du sang, dû à ses sévices. 
C'est au côté historien de Jean-Pierre Charland auquel on a affaire, dans ce tome. Il se fait ainsi chroniqueur de cette affaire retentissante, de la découverte de cette petite fille, jusqu'au procès des parents. 
Alors, j'ai adoré ce tome, qui est mon préféré de la saga. J'adore les histoires de procès, et là ,nous avons droit à de belles plaidoiries et de beaux échanges dans les prétoires. Et, autre point positif, il concerne mon personnage préféré de la saga: Mathieu, jeune avocat, assistant du procureur, qui va découvrir le côté sordide de son métier. 
l'auteur, ne va rien nous épargner de l'horreur que vécu cette enfant, et il faut parfois avoir le coeur bien accroché, mais c'est passionnant de bout en bout et je vous le garanti, vous ne pourrez pas lâcher ce tome avant la fin. 
Autre point positif, on peut même lire ce 2e tome (ou 6e tome, si on prend en compte la saga précédente), sans avoir lu les autres, car il est très indépendant, et ne rentre pas dans les détails de la vie des héros, qui sont assez absent, l'affaire Aurore prenant toute la place. Mais ce fut passionnant, pour un amoureux des prétoires et des salles de tribunaux, comme moi. 

Thalie et les âmes d'élite

Dans ce 3e tome, c'est au personnage de Thalie, soeur de Mathieu, et médecin, que Jean-Pierre Charland va se consacrer. Et encore une fois, c'est la famille d'Alfred Picard, très présente, dans cette saga, qui est mis en avant. Pour mon plus grand bonheur, car c'est ma famille préférée (je déteste les enfants de Thomas Picard, Edouard et Eugénie).
Ici, c'est à la religion, très présente au Québec, en ce début du XXe siècle (c'est bien simple, l'église régente tout dans la vie de la paroisse), que Jean-Pierre Charland s'intéresse, mais aussi à la médecine, et au progrès qu'elle engendre. Et tout ça à travers le combat que se livre Thalie, et Monseigneur Buteau (qui n'est autre que l'oncle de la jeune médecin) à propos d'un jeune homme, Raymond Lavallée, très pieu et qui veut consacrer sa vie à Dieu...quitte à faire les pires folies contre lui-même pour Le servir. 
Alors, ce tome m'a vraiment gêné, de par le parcours de ce jeune homme de 17 ans (si mes souvenirs sont exacts), et par le comportement de ce détestable Curé Buteau, qui va vouloir en faire un martyr pour servir sa cause. Mais Thalie, qui recevra le jeune homme en consultation, va se lever en bouclier contre son oncle, pour le sauver. 
Avec ce tome, l'auteur nous plonge dans l'histoire la plus sordide de Québec: son rapport avec la religion, et dû au fait, que l'église régentait tout. Il nous parle également de ces enfants martyrs, que l'église a érigé en saint pour servir sa cause. 
C'est un tome qui m'a mis extrêmement en colère et que j'ai trouvé édifiant, devant le parcours du jeune Raymond. 

Eugénie et l'enfant retrouvé
En cette année 2021, j'avais à coeur de terminer cette saga, sauf que j'appréhendais de lire ce dernier tome. Je savais, par avance, que je n'allais pas autant l'apprécier que les autres. En effet, il est centré sur Eugénie Picard, le personnage que je déteste le plus dans cette saga. Eugénie est une garce absolue qui fait de la vie des siens (et de son mari en particulier) un enfer. Alors, la retrouver pendant plus de 500 pages, au secours. Bon, il est vrai que le roman se focalise aussi sur Jacques Létourneau, jeune étudiant qui rêve d'être avocat...enfin surtout de s'élever dans la société et de devenir quelqu'un de la Haute. 
Alors, je ne vais pas pouvoir trop parler de ce tome sans trop en dire sur la saga "les Portes de Québec", car un évènement qui concerne Eugénie et Jacques, est évoqué dans le 4e tome de la saga précédente. 
Juste vous dire que Jacques est un être imbu de sa personne, que j'ai trouvé au fil de la lecture, de plus en plus désagréable, devant son arrivisme grandissant. Et Eugénie reste égale à elle-même, malgré ce qu'elle va vivre (et qui ne m'a pas peiné, une seule minute). 
Autre point sombre, Mathieu est totalement absent de ce tome. Heureusement Thalie, sa soeur, est là, comme une lumière bienveillante qui éclairait les rares moments de lecture où je prenais plaisir. 
Au final, un dernier tome moins emballant que les précédents, mais il est dû aux personnages sur lesquelles il est centré, Eugénie et Jacques, que je n'apprécie pas. 

Tout ça pour dire, que dans l'ensemble cette 2e saga, consacrée aux familles Picard,(et sur l'histoire du Québec) est tout aussi passionnante que la précédente. Jean-Pierre Charland est un conteur et un "historien" dont j'apprécie énormément la plume. 
Avec ce 4e tome, c'est une nouvelle page qui se tourne...mais l'histoire des Picard est loin d'être finie. En effet, une 3e saga de 4 tomes, "Les Années de Plomb" continue de nous conter l'histoire du Québec à travers deux familles de Québec. A la fin des "Folles Années", la Crise de 1929 fait son apparition et annonce des années bien sombres. 
J'aurai hâte de continuer l'aventure, sauf que je ne sais pas si je vais pouvoir me procurer cette saga (que France Loisirs n'a pas publiée en France) qui n'est édité que sur le continent nord-américain. J'espère la trouver à un prix abordable...surtout que "Le Clan Picard", qui est la 4e et dernière saga de la famille Picard, est en ma possession. On verra bien.

Jean-Pierre Charland: Les Folles Années Tome 2 à 4, France Loisirs, 2016


 



vendredi 16 avril 2021

Accès direct à la plage

Résumé: Rien ne relierait ses personnages s'ils n'avaient le goût des locations à la mer. Ils se sont croisés dans l'épice particulière des soirs d'été. Les couples, les familles, les célibataires qui nous ont précédés. Ceux d'avant. 

Le lecteur, avec Jean-Philippe Blondel, éprouve lui aussi le sentiment d'être à la suite de quelqu'un. Il reste une empreinte qui s'attarde...


Depuis ma découverte de la plume de Jean-Philippe Blondel, avec Un minuscule inventaire, je voue un véritable culte à cet auteur. Il fait parti de mes auteurs chouchous, ceux dont je veux tout lire et dont j'achète les livres, les yeux fermés, sans même lire le résumé. Car je sais ce que je vais y trouver et que la déception ne sera pas au rendez-vous. 

Entrer dans un Jean-¨Philippe Blondel, c'est revenir en terre connue, retrouver des senteurs d'enfance qu'on avait oublié et, surtout retrouver ce cocon familier dans lequel on se sent bien et protégé. 

Pour ce vendredi matin, j'avais envie de retrouver une plume amie et de découvrir comment tout cela avait commencée. Donc, retour en arrière avec le premier roman du Monsieur, Accès direct à la plage. Et là, comment vous dire, la claque monumentale que je me suis pris. Pour un premier roman, c'est un coup de maître et du génie pur dans la construction du roman. C'est surtout cela qui m'a frappé dans ce dernier...mais j'y reviendrai un peu plus tard. Pour le moment, revenons à ce qui fait le charme des romans de Jean-Philippe: les voix. Entendre les voix de ses personnages (et là, ils sont nombreux (pas moins de 18!) nous raconter leur histoire à l'oreille pour nous faire entrer dans leur intimité. Et c'est là que Jean-Philippe excelle dans son écriture: arriver à nous faire entendre la voix d'un petit garçon, d'un homme beauf sur les bords, d'une femme "mangeuse d'homme", d'un vieillard, d'une jeune fille de quinze qui découvre l'amour.... et tout ce petit monde qui ne se connait pas, mais qui pourtant se tourne autour, des années 70 jusqu'au début des années 2000, pour raconter une histoire, la nôtre. 

L'intime. Raconter l'intime. Nous raconter, nous petits français par le prisme de l'intime. Voilà la force de Jean-Philippe Blondel. Voilà ce qui nous rapproche de ses personnages, le partage de vies qui nous parlent. Il y a comme des souvenirs communs qui nous frappent quand on lit les petits moments de vie de Philippe, Danièle, Line, Sabrina, Vincent, Henri... C'est vous, c'est nous, c'est moi...tout simplement. 

Cependant, quelque chose m'a frappé dans ce roman: sa construction. Par petits chapitres, comme de courtes nouvelles, Jean-Philippe donne la parole à plusieurs personnages qui se répondent, sur 30 ans, et toujours l'été, sur des bords de plages différents, mais qui forment un tout. Des noms reviennent, des histoires se complètent et un puzzle se reforme et se met en place. Alors, pour le lecteur, c'est un jeu de l'esprit car il essaie de  recoller tous les morceaux pour avoir tous les tenants et aboutissants de l'histoire tragique qui se dessine devant ces yeux. Car, oui, il y a un suspense, qui emprunte au roman policier, qui se met en place et qui s'éclaire à la fin. C'est magnifiquement construit et cette tragédie française prend tout son sens jusqu'au point final d'un article de journal. Tout simplement grandiose. 

Pour un premier roman, c'est un coup de maître! Un roman qui fera parti de mes préférés de l'auteur, et que je relirai un jour. 


P.S. Il y a quelques années, j'étais frustré quand je lisais un roman de Jean-Philippe Blondel. Frustré par sa brièveté. J'en voulais plus, toujours plus. Je voulais un jour, lire un pavé de plus de 500 pages de ce grand monsieur. Sauf que voilà, j'ai compris, il y a peu, que la force des romans de Jean-Philippe, c'est leur brièveté. En peu de mots, en phrases courtes, il réussi à nous émouvoir et à nous frapper au coeur. Pas besoin de grand discours pour réussir à nous toucher. Et puis, ainsi, on peut toujours relire un livre de Jean-Philippe et retrouver les émotions qu'il nous a procurer à leur première lecture. C'est ça qui est beau. 




 Jean-Philippe Blondel: Accès direct à la plage, Pocket, 118 pages, 2003




1984

 

Résumé: De tous les carrefours importants, le visage à la moustache noire vous fixait du regard. Il y en avait un sur le mur d'en face. Big Brother vous regarde, répétait la légende, tandis que le regard des yeux noirs pénétrait les yeux de Winston... Au loin, un hélicoptère glissa entre les toits, plana un moment, telle une mouche bleue, puis repartit comme une flèche, dans un vol courbe. C'était une patrouille qui venait mettre le nez aux fenêtres des gens. Mais les patrouilles n'avaient pas d'importance. Seule comptait la Police de la Pensée.


Le risque avant de commencer à lire un classique de la littérature, c'est qu'on a l'impression de connaître déjà l'histoire avant de le commencer...et de se rendre compte qu'on était à côté de la plaque. 

C'est ce que j'ai pensé en commençant 1984 d'Orwell. J'étais persuadé de savoir vers quoi le roman allait se diriger...puis, j'ai débuté ma lecture, et je me suis aperçu que le roman n'était pas du tout ce à quoi je m'imaginais. 

Alors, je n'ai pas l'habitude de lire de la Science-Fiction. C'est donc toujours difficile pour moi d'entrer dans ce genre de roman. C'est bien simple, il m'a fallu la première partie du livre, plus d'une centaine de pages pour pouvoir entrer dans le roman. En même temps, George Orwell, dans cette première partie, nous décrit le monde futuriste dans lequel vit ses personnages, avec ses lois, ses qualités et ses défauts, avant d'entrer dans le vif du sujet. Et c'est avec la 2e partie que l'histoire s'enclenche réellement. 

Je dois dire que j'ai "apprécier"(oui, le mot est entre parenthèse car on ne peut pas dire que ce que j'ai lu soit réjouissant tout de même) la découverte de ce classique de la science fiction, qui, malgré qu'il ai été écrit, il y a plus de 70 ans, sonne toujours très actuel...et c'est ça qui est effrayant. De se dire qu'Orwell nous avait prévenu de ce que le monde pourrait devenir si l'on ne faisait rien et que malgré cela, on s'y dirige encore plus. Comme si l'homme n'apprenait jamais de ces erreurs et effaçait le passé de sa propre mémoire comme dans le roman. 

1984 est un roman complexe à appréhender. Il faut prendre le temps de s'immerger dedans pour essayer de tout comprendre. C'est un roman très contemplatif et explicatif, qui peut paraitre très hermétique, mais qui, pour un esprit curieux peut être fabuleux dans le génie de son auteur. Imaginez un monde totalitaire, qui trouve encore une résonnance actuelle de nos jours. Seuls les auteurs de science-fiction sont capables de cela. Ce sont des visionnaires, qui, en analysant leur propre monde, nous parle du futur de l'humanité...dans ce qu'elle a de plus sombre. 

Je dois dire que c'est le retournement de la fin de la 2e partie, qui m'a fait dévorer la 3e et dernière partie. Les cartes de l'espoir sont rebattues et la fin est glaçante pour le héros Winston. Mais surtout, il y aura une scène de la fin du livre qui me glacera pour longtemps...tout ce que je peux en dire c'est qu'elle concerne des rongeurs que je déteste. 

Ce qui déroute à la lecture de 1984, c'est la date à laquelle se déroule l'action. L'année 1984 (le futur pour Orwell qui écrivit ce roman en 1948) est passée depuis longtemps pour nous qui vivons en 2021, et cependant, à la lecture, on s'aperçoit que le monde décrit est un monde futuriste qui n'existe pas encore. C'est très déstabilisant. Il faut alors faire abstraction du titre du livre pour que l'histoire qu'on lise ne paraisse pas anachronique. 

Pour finir, j'aimerai parler de la traduction. Pour ma part, j'ai lu celle d'Amélie Audiberti, qui date de 1950. Alors, même si des tournures de phrases m'ont paru d'un autre temps, cela ne m'a pas gênée. Après, je peux comprendre qu'on veuille réactualiser une traduction qui peut paraître désuète. Ce qui fut fait pour les 70 ans du livre. Mais, alors, là où je comprends cette initiative, j'ai du mal à comprendre l'intérêt de retraduire le roman deux ans plus tard par un autre traducteur, et avec un titre remanié (en effet, le titre est maintenant écrit en toutes lettres et plus en chiffres). Je trouve que c'est un manque de respect pour les traducteurs précédents (comme une façon de dire, "votre travail n'est pas bien, moi je vais faire mieux") et le changement de titre est tout simplement ridicule (même si il colle au titre original). Comme une façon de se démarquer des autres. Tout bonnement pathétique. 

Ce qui n'enlève en rien au fait que ce classique est à découvrir et qu'il résonne encore en nous comme un livre très actuel...et c'est ça qui fait peur. 


George Orwell, 1984, (Nineteen Eighty Four), Folio, 439 pages, 1950




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samedi 10 avril 2021

Un début dans la vie

 

Résumé: " Il n'y a rien de plus dangereux que de causer dans les voitures publiques. En diligence, d'ailleurs, les gens comme il faut gardent le silence. " Si Oscar Husson suivait à la lettre ce conseil de sa mère, son " début dans la vie " ne tournerait certes pas à la catastrophe, mais il n'y aurait pas de roman. Il parle donc à tort et à travers, dans le " coucou " qui le mène de Paris au château de Presles, en compagnie de jeunes gens qui mentent comme ils respirent. Orient de carte postale, conquêtes féminines, châteaux en Espagne, tout est prétexte aux vantardises et à la blague.


Ce "Début dans la vie", est un petit bijou de drôlerie et de causticité...mais une belle leçon de vie. 

Je continue ma découverte de l'oeuvre de Balzac, avec ce 3e roman, et je dois dire que j'ai encore pris beaucoup de plaisir à lire sa plume. (Je me suis d'ailleurs fait cette réflexion durant ma lecture: "il aura fallu attendre la quarantaine pour enfin apprécier la plume plaisante et souvent drôle de Balzac")

Ce qui est idéal dans mon édition de "La Comédie Humaine", c'est qu'elle regroupe plusieurs romans et nouvelles dans un seul volume. Il n'y a donc pas de résumé du roman ou de la nouvelle que je m'apprête à lire. Seul le titre peut me donner une idée (ou pas) de la teneur de l'histoire. Je rentre ainsi vierge de toute connaissance de l'histoire au début de ma lecture. Et je trouve cela idéal pour pouvoir m'immerger dans un roman de Balzac. 

Alors, la prise en main d'un roman de Balzac est toujours difficile pour moi car il rentre dans de nombreuses descriptions (qui me faisaient fuir quand j'étais ado, je le rappelle) des lieux et des personnages du roman avant de rentrer dans le vif du sujet. Ici, nous avons le droit à toute une entrée en matière sur les transports de voyage et la présentation des protagonistes qu'ils soient principaux ou secondaires. Cela peut donc être rébarbatif, mais elles sont souvent nécessaires, pour bien comprendre les tenants et les aboutissants et avoir toutes les clefs en main pour bien comprendre l'histoire qui va se jouer. Après ces présentations faites, l'histoire peut aller tambour battant pour notre plus grand plaisir. 

Et du plaisir, j'en ai pris énormément avec le jeune Oscar, qui est le jouet de menteurs invétérées dans une voiture publique, et plus particulièrement Georges Marest, qui va lui faire commettre l'irréparable et ainsi compromettre son avenir. Toutes les mésaventures d'Oscar sont d'une drôlerie que je ne soupçonnais pas chez Balzac (quoique, j'en ai eu un aperçu dans "Modeste Mignon"). Je suis toujours agréablement surpris de cet état de fait. Pourtant, ce roman se rapporte grandement à un roman d'apprentissage ou initiatique: le jeune Oscar va faire erreur sur erreur mais apprendra de celles ci. j'ai été d'ailleurs beaucoup attendri par le jeune Oscar, auquel je ne trouvais pourtant aucune excuse au début, mais, j'ai compris sa naïveté et la vantardise de sa jeunesse. En revanche, je n'ai pas du tout aimé ce Georges Marest, qui sera l'instigateur de la "chute" d'Oscar. Mais la fin du roman me donnera beaucoup de joie sur l'avenir de cet odieux personnage. 

En un mot comme en cent, c'est toujours un plaisir de retrouver la plume et l'univers de Balzac et ce "Début dans la vie" en est encore une belle preuve. C'est drôle, caustique et plein d'esprit. Alors, je ne sais pas comment se passera la suite de la découverte, mais je trouve que ces "Scènes de la vie privée" sont un délice. Et je pense que maintenant, je n'ouvrirai plus un Balzac à reculons. 


Balzac: Un début dans la vie, (La Comédie Humaine, Volume 9), Classiques Garnier, 164 pages (p.410 à 574), 2008




jeudi 8 avril 2021

Bonbon Palace

Résumé: 
 Des habitants loufoques, des contes intarissables et des cafards clandestins : bienvenu au Bonbon Palace ! Dans cet immeuble décrépit, qui a tout perdu de son prestige, d'inoubliables égarés se croisent, s'agacent et se cherchent. Chacun doit rebâtir son existence au cœur d'une Istanbul mythique qui brandit, sous les fenêtres, ses clameurs bariolées.


C'est toujours étrange pour moi de débarquer dans la littérature d'un pays que je ne connais pas encore. 

Il faut d'abord trouver ses repères, découvrir et apprivoiser d'autres cultures, d'autres coutumes. Entrer en littérature étrangère, c'est partir dans un voyage immobile qui peut vous réserver de belles surprises ou vous laisser sur le pas de la porte. 

En ouvrant Bonbon Palace, je ne savais pas dans quoi je m'embarquais. En effet, la littérature turque m'est totalement étrangère et j'ai toujours un peu de mal avec la littérature des pays orientaux. Mais, même si le début est nébuleux, fait de contes et légendes, avec ce retour en arrière, je dois dire que l'arrivée à Bonbon Palace, à la rencontre des coiffeurs jumeaux Djemal et Djelal fut des plus plaisants. Et je conçois d'ailleurs qu'un salon de coiffure est un bon point de départ pour nous présenter bons nombres de personnages que le lecteur va croiser par la suite. 

Alors, je dois tout de même vous avouer que même si les nombreux personnages ne me dérangent pas outre mesure, je dois dire que là, il y en a beaucoup et je n'ai pas pu tous les retenir. Je citerai seulement, les jumeaux qui m'ont bien fait sourire, surtout Djemal, j'ai été touché par le petit Muhammet, par Mme Teyze, et la Maitresse Bleue, et par leur solitude différente mais tellement semblable. Il cherche comme un sens à leur vie. Mais, en revanche, je n'ai pas été touché plus que ça par le narrateur (qui n'a pas de nom) et sa présentation fut des plus laborieuse à lire: c'est bien simple, je soupirai à chaque fois que je voyais son "nom" en haut du chapitre...même si cette situation s'est amélioré au fil de ma lecture. 

Alors, je n'ai pas été si fortement touché par ce roman, même s'il est beau, bien écrit, je pense que je n'ai pas eu toutes  les clés pour entrer dans cet Istanbul fantasmagorique. Comme je vous le disais, j'ai un peu de mal avec la littérature orientale, ou asiatique...mais je ne regrette pas le voyage et la découverte: il est toujours bien d'ouvrir son esprit à d'autres horizons. C'est l'une des richesses des livres. Puis, je dois dire que le petit twist final a fait son effet sur moi. Je ne m'attendais pas à cet fin là pour le narrateur. Donc, tout compte fait, même s'il ne m'a pas complètement emporté, j'ai passé d'agréables moments avec ce roman et ses personnages sympathiques, même dans leur solitude et leur tristesse. Un joli petit voyage que je ne regrette pas d'avoir fait, même s'il ne me laissera peut être que peu de souvenirs...seul le temps me le dira. 


Elif Shafak: Bonbon Palace, (Bit Palas), Editions 10/18, 567 pages, 2008





dimanche 4 avril 2021

Le triomphe du singe-araignée

 

Résumé: Accusé Bobbie Gotteson, levez-vous ! Au tribunal, se joue la vie de cet énergumène, faciès de singe et jambes velues d'araignée. Il voulait briller sous les feux de la rampe en étant acteur ou chanteur. Raté ! Aujourd'hui, il est sous les projecteurs de la Justice à cause de son principal hobby : découper des femmes à la machette. Bobbie Gotteson, autoproclamé le Taré, vous êtes condamné !


Joyce Carol Oates a toujours su mettre en lumière les laissés pour compte, les méchants, les ordures, les fous. 

Avec ce triomphe du singe araignée,, elle s'est surpassée. Elle a su entrer dans la tête d'un véritable psychopathe, en nous livrant ses pensées telles qu'elles arrivent, mais surtout sans juger. C'est alors à une écriture décousue, sans queue ni tête, mélangeant prose et poésie dans un même paragraphe, donnant à son histoire cet air nébuleux qui fait qu'on a vraiment du mal, en tant que lecteur à s'y retrouver. 

Alors, c'est brillant, comme d'habitude chez J.C. Oates, mais c'est également déstabilisant. La discours décousu de Bobby Goteson, le psychopathe de l'histoire, dont le lecteur assite au procès, renforce la confusion dans laquelle le lecteur se trouve. J'ai été mal à l'aise tout au long de ma lecture, ne sachant pas bien où l'auteur veut nous emmener au final...et le malaise grandit encore plus. Heureusement, la brièveté du livre nous sauve de ce sentiment de malaise qui ne dure que quelques heures. Je pense que je n'aurai pas supporté de rester dans la tête de cet être dérangé plusieurs jours. 

Alors, s'il faut saluer le génie de Oates d'avoir su entrer dans la tête d'un tueur et nous restituer sa pensée malade, il faut saluer le travail du traducteur Claro, qui a su retranscrire en français, la complexité de ces propos et de cette pensée. Le travail de traduction a dû être fastidieux, car la pensée décousue, qui se mélange avec les parties au tribunal lors du procès, qui ne sont que la représentation que Bobby, l'accusé, s'en fait, participe complètement à ce sentiment de malaise et de confusion qui nous habite. 

Soyons, clair, ce ne sera pas un de mes Oates préférés, loin de là, mais je salue le génie de Mrs Oates, qui a su plonger au plus profond d'un esprit malade, jusqu'à toucher l'abyme de cet individu pour nous faire comprendre comment ces personnes là ressentent le monde qui les entourent. Tout simplement brillant, mais totalement dérangeant. C'est Joyce Carol Oates, tout simplement. 


Joyce Carol Oates: Le triomphe du singe-araignée, (The Triumph of the Spider Monkey), Points, 128 pages, 1976 (2010 pour la traduction française)






vendredi 2 avril 2021

Le Maître

Résumé: Le roman s’attache à cinq années de l’existence du romancier Henry James, de 1895 à 1899. Il commence par l’un des événements les plus douloureux de l’existence de James : l’échec retentissant de sa pièce de théâtre, Guy Domville, à Londres en janvier 1895. Lors de la première, les applaudissements des amis de James sont noyés sous les sifflements du public. Dans un théâtre voisin, en revanche, la nouvelle pièce d’Oscar Wilde fait un triomphe. Après ce fiasco, James décide de retourner au roman, mais d’abord il accepte les invitations de quelques-uns de ses amis de la noblesse installés en Irlande, espérant ainsi échapper aux échos de son échec londonien – cette visite permet à Colm Tóibín de s’attarder avec ironie sur les abus de l’occupation anglaise, sujet qui lui tient davantage à cœur qu’à James, peu préoccupé par ses lointaines origines irlandaises.


Si j'ai sorti ce livre de ma Pal, c'est pour sa magnifique couverture qui a attiré mon oeil...sans me souvenir aucunement ce qu'il racontait. 

Oui, cela m'arrive souvent de me demander ce que raconte un livre et pourquoi je l'ai acheté, surtout quand ce  livre traine depuis quelques années dans mes bibliothèques. J'avais donc totalement oublié qu'il parlait d'un écrivain. (En le regardant à chaque fois dans la bibliothèque, j'étais persuadé que ce livre parlait de peinture...mais non, c'est bien d'Henry James, écrivain américain, dont on va suivre 5 années de sa vie). C'est la 2e fois que je rencontre cet écrivain dans mes lectures, devenant, dans ces romans, personnage,  sans pour autant, l'avoir déjà lu. 

J'ai aimé la plume de Colm Toibin, même si celle ci, n'est pas si facile d'accès. Disons, que j'ai pris le temps de lire et de m'immerger dans ce roman fort plaisant. C'est une jolie réflexion sur le "métier d'écrivain" et les aléas de la vie d'un auteur, avec ses joies, ses déboires, et ses peines...toujours affilié au défi et problème de création. C'est vraiment, à un récit intérieur auquel l'auteur nous invite. La vie d'Henry James nous ai dévoilé par petites touches, avec des retours en arrière inclus dans la narration, comme autant de souvenirs qui revient en mémoire à Henry pour mieux éclairer son présent. 

Bien sûr, les chapitres m'ont plu a un degré différents: le premier sur l'échec de sa pièce est une bonne entrée en matière pour faire connaissance avec l'auteur, Henry James, qui vivra là une épreuve dont il aura du mal à se remettre. Puis petit détour par L'Irlande ensuite, Londres mais également l'Italie. J'ai trouvé agréable de deviner quelles nouvelles ou romans, se cachait derrière les idées qui venaient à Henry James (dans l'un des chapitres, j'ai clairement reconnu dans la génèse de création, le roman "Le Tour d'Ecrou"), comme Le Tour D'écrou, donc, ou "Portrait de femme", qui fut inspiré par l'une des amies d'Henry James. 

En fait, ce roman est un donneur d'envie de découvrir la plume d'Henry James...mais pas tout de suite. Comme si je ne me sentais pas encore prêt à découvrir l'auteur...mais par contre, j'ai aimé le retrouver comme personnage de roman. Et les réflexions sur la création et le besoin d'écrire sont très bien retranscrit. Une jolie découverte qu'il faut prendre le temps de déguster pour ressentir tout le spectre du grand auteur américain, Henry James. 


Colm Toibin: Le Maître (The Master), Editions Robert Laffont, 425 pages, 2005