mardi 25 mars 2014

A l'est d'Eden

4e de couverture: Dans cette grande fresque, les personnages représentent le bien et le mal avec leurs rapports complexes. Adam, épris de calme. Charles, son demi-frère, dur et violent, Cathy, la femme d'Adam, un monstre camouflé derrière sa beauté, ses enfants les jumeaux Caleb et Aaron. En suivant de génération en génération les familles Trask et Hamilton, l'auteur nous raconte l'histoire de son pays, la vallée de la Salinas, en Californie du Nord. Pour cette œuvre généreuse et attachante, John Steinbeck a reçu le prix Nobel de littérature.

"A l'est d'eden" fait partie de mes films préférés. 
Après ma découverte de la plume de Steinbeck avec "Des Souris et des hommes", j'ai voulu en lire plus et je suis tombé, par hasard sur ce roman, que je me suis empressé d'acheter...avant de le laisser traîner dans ma PAL pendant 4 ans. 
Pourquoi avoir mis aussi longtemps, avant de le sortir? Tout simplement, connaissant le film par coeur, pour l'avoir vu 4 fois, je reculai l'instant de lire ce petit pavé de plus de 600 pages, de peur de tout savoir à l'avance. 

C'est en lisant la chronique de Frankie, que j'ai eu l'envie de le lire: en effet, dans cette dernière, Frankie révélait qu'Elia Kazan avait adapté la 4e partie du roman, quand Cal et Aron Trask ont 17 ans. Tout le reste était resté non adapté. (Pourquoi? Nul ne le sait) 

Je me suis donc lancé dans ce roman avec envie mais également avec appréhension: la plume de Steinbeck n'est pas si facile d'accès et je l'avais testé sur des petits romans fort et puissants que sont "Des souris et des hommes" et "Lune Noire". C'était donc mon baptême du feu pour un roman au long cours. 
Il m'a fallu 15 jours pour pouvoir connaître le destin des Trask et des Hamilton, mais que cela fut passionnant. La lecture des premières parties du roman éclairent toutes les zones d'ombres du film, que je ne comprenais pas totalement, et surtout, le personnage de Kate, assez mystérieux pour moi, dans le film. Là, elle prend toute sa mesure et c'est à un personnage fantastique de complexité et de noirceur que Steinbeck nous donne à lire. J'ai aimé détesté ce personnage qui n'a aucune conscience et ne connais que la haine. C'est un monstre à la beauté éclatante. 
Les Trask ont la part belle du roman, de Charles et Adam, les deux frères qui seront séparés par la belle et troublante Cathy/Kate, jusqu'à Cal et Aron, les fils d'Adam. Ces deux duos fraternel représente le bien et le mal, et chacun prend sa place, dans cette dualité, passant d'un état à un autre. 

Mais si les Trask sont les principaux protagonistes de ce roman, il ne faut pas oublier pour autant, la famille Hamilton, dont le patriarche Samuel est la figure paternelle. (Cette famille qui fut celle de John Steinbeck, puisque sa mère Ollie, n'était autre que l'une des filles de Samuel. D'ailleurs le petit John fait deux brèves apparitions dans le roman, mais la voix de l'écrivain/narrateur traverse le roman de part en part). J'ai aimé découvrir cette famille, qui resta unie même dans l'adversité et ce, malgré les quelques fâcheries que toute famille connaissent. Le destin des Hamilton ne fut pas tout rose, en atteste la fin tragique de Tom et Dessie, mais il fut beau.  (Le malheur est une constance dans les livres de Steinbeck, je trouve, mais il y a toujours cette lueur d'espoir qui transparaît toujours). 

Le plus étonnant, c'est que mon personnage préféré du roman n'est pas le même que celui du film (Cal, interprété par James Dean, est celui que je préfère dans la version cinéma): c'est bien normal puisque celui ci n'existe pas dans le film: Lee, le serviteur chinois de la famille Trask est celui qui a su me transporter et m'amener à voir la famille Trask autrement. C'est un être fabuleux, serviable, fidèle, malin, attentionné. C'est le plus beau personnage du roman et je ne comprend pas pourquoi Elia Kazan s'est privé de ce personnage là? Pour sa nationalité? Peut être. C'est bien dommage. Lee fait partie de ces personnages qui font le lien entre tous, un fil invisible, une présence indispensable mais qui sait s'effacer quand il faut. L'un des plus beaux personnages d'"A l'est d'Eden". 

"La religion" est également évoqué de par la dualité du bien et du mal. Les jumeaux Trask représentent, par bien des égards, les deux faces d'une même pièces: Aron est le gentil, à qui on donnerai le bon dieu sans confession, et Caleb, le "méchant", qui n'aspire qu'à faire le mal autour de lui: malgré son amour pour son jumeau, il ne peut s'empêcher de lui faire du mal. La jalousie le consume, cette jalousie née d'un manque d'amour de la part d'Adam, le père des jumeaux. Pourtant, Aron se dévoile progressivement sous un jour égoïste: je l'ai trouvé, au contraire de Cal, plus détestable car ne pensant qu'à son petit bien être. Celui à qui on donne toute l'affection et l'attention, au détriment de Cal qui fait tout son possible pour être aimé. Malgré ses efforts, ce dernier ne réussira pas à se faire accepter par ce père "absent'. Heureusement, Lee, est là pour le soutenir et l'écouter. 

Voilà un roman foisonnant, qu'il faut prendre le temps de lire pour bien l'assimiler (et je pense qu'il va me falloir un petit peu de temps avant de le digérer). La plume forte et cruelle, par certains côtés, de Steinbeck vous happe pour ne plus vous lâcher. Il m'a fallu du temps pour pouvoir aller au bout de ce roman mais je ne le regrette pas. Il faut parfois prendre son temps pour pouvoir comprendre tous les aboutissants et les subtilités d'un texte aussi fort émotionnellement. Une fresque américaine, où le bien et le mal se battent constamment pour enfin voir le bout du tunnel, à la dernière ligne...en faisant quelques victimes au passage, tel le lecteur que je suis. Je pense qu'on ne sors pas indemne d'"A l'est d'Eden". On y laisse un peu de soi au passage. 

John Steinbeck: A l'est d'Eden (East of Eden), Le Livre de Poche, 632 pages, 195













7e roman lu dans le cadre du challenge "La Littérature fait son cinéma". "A l'est d'Eden", fut adapté au cinéma en 1955, par Elia Kazan, avec James Dean, Julie Harris, Jo Van Fleet...







8 commentaires:

  1. Ah, ça fait envie ! Et je ne crains pas l'effet "redite" : je n'ai jamais vu le film de Kazan.

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    1. Je pense que cela devrait te plaire. Puis, comme ça, tu pourras par la suite, voir le film absolument superbe d'Elia Kazan. (qu'il faut voir au moins une fois dans sa vie).

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  2. Je l'ai lu il y a trop longtemps pour que je puisse m'en souvenir dans les détails, mais il m'en reste cependant cette idée de foisonnement dont tu parles ! Je l'ai lu dans ma jeune adolescence parce que j'étais amoureuse de James Dean (comment faire autrement ?) et sans doute n'ai-je pas tout bien compris et appréhendé à l'époque !
    Beau billet en tout cas, qui me donnerait envie de le relire si je n'avais pas une PAL titanesque !

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    1. Ben, ça fait plaisir de voir que je donne envie de relire un livre (même si je comprend parfaitement le problème de la PAL titanesque, n'est ce pas!). Et un autre point commun qui nous rapproche puisque je suis également tombé sous le charme (et la beauté du diable) de James Dean.

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  3. Tu es maintenant prêt pour Les raisins de la colère! Je sais que je dois toujours voir le film, je le verrai c'est sûr, et c'est aussi sûr que je lirai le roman un jour!

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    1. Je t'en souhaite déjà une bonne lecture et un bon visionnage.
      Pour "Les raisins de la colère", sa lecture attendra un petit peu, je pense. Ma prochaine lecture de Steinbeck sera un de ces petits romans, qui traine dans ma PAL...quelque part.

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  4. Désolée, j'oublie toujours d'aller sur mon Feedly et du coup je n'avais pas vu ta chronique ! Du coup, je t'ai rajouté à mon blogroll. Bref, je suis ravie de t'avoir donné envie de découvrir ce livre (et ravie de t'avoir vu au Salon du Livre) et surtout que tu l'aies aimé ! Et ta chronique est superbe ! Je ne savais pas que Lee n'existait pas dans le film, c'est pourtant un personnage très important dans la vie des Trask ! J'ai lu qu'ils allaient faire une nouvelle version du film (mais qui raconterait tout le livre) avec Jennifer Lawrence dans le rôle de Cathy Ames.

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  5. Merci pour cette envie de découverte. Cela m'a aussi étonné qu'Elia Kazan ait fait l'impasse sur le personnage de Lee.
    Tiens, je serais curieux de voir cette nouvelle version (surtout si elle prend en compte l'intégralité du livre). De plus, j'aime beaucoup Jennifer Lawrence.

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