jeudi 11 mars 2010

En souvenir de moi


Résumé:C’est en passant devant un kiosque à journaux du boulevard Pierre-Seymard, à Nice, qu’Ondine apprend le suicide de sa mère, la grande écrivaine Zita Chalitzine. On l’a retrouvée dans une voiture enveloppée dans un magnifique manteau de fourrure blanc. Zita, qui avait passé sa vie à faire scandale, ne se départ pas de sa réputation. Et juste avant de disparaître, elle faisait encore parler d’elle : elle n’aurait été qu’un prête-nom aux livres qui ont fait son succès. Ondine ne veut rien savoir de sa génitrice qui n’a été qu’une pâle imitation de ce que devrait être une mère et qui n’a jamais voulu lui dire qui était son père.
Et pourtant, en rangeant les affaires de Zita, après l’enterrement, Ondine découvre le dernier livre de sa mère, non publié, son autobiographie.
Le lecteur entre alors de plein fouet dans la vie extraordinaire de Zita, petite fille pauvre, élevée dans la loge de son énorme mère, Madame Lourdes.
Devenue la protégée de la famille propriétaire de l’immeuble dans lequel elle vit, elle découvre la haute société, la vie facile de ceux qui ont les moyens, la culture, la finesse. Après son bac, elle gagne son indépendance en devenant une des filles de Madame Claude et par la même occasion la maîtresse du grand auteur Romain Kiev. Coqueluche du tout-Paris des années 1970, elle illustre ce temps où tout était possible.
Les fêtes, les drogues, Yves Saint-Laurent, les belles voitures, on suit Zita dans un tourbillon d’avant crise. Mais aussi dans sa chute, dans sa déchéance. Lorsque l’on est monté si haut, on ne peut que redescendre très bas.



Mon avis: J’ai reçu ce livre, lors d’un partenariat entre les éditions Stock et le forum Livraddict

Je viens de finir ce livre et j’en ressort chamboulé.
Adélaïde de Clermont-Tonnerre nous embarque dans une histoire pleine de mystère dont elle déroule les fils un a un et nous dresse le portrait d’une femme libérée.
Ah Zita! Quelle femme. Une femme qui va construire sa vie comme elle l’entend, traverser une époque, les années 70, que l’on garde en mémoire comme une époque de libération sexuelle. Une libération de la femme, également, dont Zita pourrait être une vision.
La force du roman est cette mise en abime que l’auteur a mis en place: Après l’enterrement, Ondine découvre un manuscrit de sa mère dans son appartement. Elle demande à Pierre, le mari de sa mère de le lire pour savoir ce qu’il renferme (Ondine a toujours eu une aversion pour les livres, car ils l’ont privé de l’amour de sa mère.) Et à partir de ce moment là, il y a une cassure dans le roman Fourrure, avec une page de garde: En souvenir de Moi de Zita Chalitzine. Puis la liste des romans de l’écrivaine.
Et là Adélaïde de Clermont Tonnerre se glisse dans la peau de Zita en lui donnant son propre style. Et je trouve cela admirable de pouvoir changer de style afin de se glisser entièrement dans la peau de son personnage.
Le style de Zita est net, précis, allant à l’essentiel. Zita ne s’embarrasse pas des convenances: elle est cash et a décidé de dire ses quatre vérités. Elle enlève ses fourrures, carapaces dont elle se servait pour cacher ses blessures.

"Si depuis la nuit des temps, nous volons la toison des autres mammifères, c'est parce que nous sommes fragiles et nus comparés à eux. En nous couvrant de leur pelage, nous empruntons leur beauté et leur férocité. Je ne fais pas autre chose avec ce manteau. je le garde pour retrouver mes belles années, un peu de ce pouvoir et de cette indépendance qui m'allaient si bien au teint"., nous dit Zita dans son autobiographie.

On part à la découverte de personnages atypiques comme les quatre hommes de la vie de Zita: son père qui lui a donné le gout des livres et tracé son avenir d’écrivain.
Timothée,( le cousin de Solange, la petite fille de Mme de Vitré, meilleure ennemie de Zita), qui sera son premier véritable amour mais quelle refusera d’épouser pour garder sa liberté. Elle s'en voudra par la suite mais il sera trop tard. Timothée lui laissera un joli cadeau en souvenir de lui: Ondine.
Romain Kiev, qu’elle rencontre par l’intermédiaire de Madame Claude (la Vraie Madame Claude), va déterminer sa vie d’écrivain en devenant une sorte de mentor qui lui fait découvrir le sexe mais aussi le monde littéraire dont il est issue.
D’ailleurs, Adélaïde de Clermont Tonnerre, nous brosse un portrait du monde littéraire très instructif mais peu glorieux, entre les caprices des écrivains (la scène du restaurant avec Kiev qui veut sa table à tout prix alors que celle-ci est déjà occupée est hallucinante. Je n’en revenais pas en lisant cela).
Elle nous dépeint aussi la guerre entre écrivains et critiques, ces derniers réglant leurs compte en écrivant des papiers peu élogieux sur les romans des dits écrivains.
Zita compare même le milieu littéraire à une mafia. C’est très culotté je trouve de sa part de faire cette comparaison mais tellement dans son style que cela ne me surprend pas.

Et il y a enfin Pierre, le dernier homme de sa vie qu’elle va s’empêcher d’aimer totalement parce qu’elle se trouve trop vieille pour cela.

Un personnage qui m’a été désagréable de bout en bout, c’est Solange. Dès l'enterrement je ne l’ai pas aimé. Je l’ai trouvé hypocrite, se cachant sous un masque de moralité alors qu’elle n’est qu’une petite bourgeoise perverse et masochiste (du moins c’est-ce qu’en dit Zita. Aurai-je été influencé par elle dans ce qu’elle raconte. )

Ce que j’ai beaucoup aimé aussi, c’est-ce rapport avec la réalité. L’auteur nous fait rencontrer Madame Claude, (La première rencontre entre Zita et la Générale comme la surnommaient ses filles, est décrite de telle façon, qu’elle m’a semblé surréaliste et pourtant bien réelle; retrouvant dans les attitudes et le parler de Madame Claude, l’image que je me faisais d’elle. ), Françoise Sagan, Jean Edern Hallier et même le président de l’époque (qui n’est pas nommé. On sait juste qu’il a pris le poste après le décès de Pompidou.). Pour inclure encore plus Zita dans cette réalité, l’auteur nous annonce que les ennuis de madame Claude sont arrivée parce que Zita a refusé un rendez-vous avec le Président.

En revanche je n’ai pas pu trop m’attacher aux personnages d’Ondine et Henry car ils sont trop peu présent dans le roman.

En conclusion, ce roman m’a passionné de bout en bout, je tournais les pages pour savoir ce qui était arrivé à Zita, pourquoi elle en était venu à se suicider. J’ai découvert un univers passionnant, un monde parisien des années 70 fait de manipulations, de scandales, matinée de prostitution de luxe, de rencontres, de passions, de déchéance. J’ai fait la connaissance d’une femme libre qui eu un destin magnifique, flamboyant qui a voulu mener sa vie comme elle l’entendait.

Merci aux Editions Stock et à Livraddict pour ce fabuleux roman qui m’a fait découvrir une auteure pleine de talent .

Et j'espère que le prochain roman d'Adélaïde de Clermont-Tonnerre me charmera autant que Fourrure.

Edit du 29 Mai 2010: Le roman d'Adélaïde de Clermont-Tonnerre a obtenu le prix Maison de la Presse 2010. Une bonne nouvelle pour ce très bon roman.

Adélaïde de Clermont-Tonnerre: Fourrure, Éditions Stock, 574 pages, 2010

5 commentaires:

  1. Ah on a publié notre billet en même temps! Moi aussi j'ai adoré, et moi aussi je n'ai pas pu arrêté de le lire! Et tout à fait d'accord avec toi Ondine et Pierre ne sont pas assez présents!

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  2. C'est ce que j'ai remarqué en mettant ma critique dans la fiche du livre sur Bibliomania. Et comme toi, j'ai adoré ce livre. Il restera l'une des belles surprises de cette année.

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  3. Je suis passée à coté du partenariat !! Le résumé m'avait déjà interessé, avec ton billet, je le note, c'est sûr ! Mais je vais devoir attendre qu'il sorte en poche !

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  4. Comme je te comprend. Si je n'avais pas été choisi pour ce partenariat, j'aurai fait la même chose.

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  5. j'ai assez bien aimé, mais contrairement à vous j'y ai vu d'autres défauts que celui du manque d'importance donné à Ondine et Pierre (la taille, le nombre de personnages, le genre un peu trop intimiste pour moi...) même si j'ai aussi trouvé ce livre assez formidable dans son genre.

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