mercredi 28 février 2018

Eux

4e de couverture: « Je ne vous envie pas et je ne désire pas être comme vous, je ne veux qu’échapper au destin d’être Maureen Wendall toute ma vie » : coincée entre une mère volage, un père alcoolique et un grand frère adoré, Maureen Wendall désespère. Ils vivent ensemble dans les bas-fonds de Detroit et subissent la violence quotidienne d’une société qui sépare les Blancs des Noirs, les miséreux des nantis. Pourtant ils s’aiment, luttent et gagnent parfois.

Joyce Carol Oates reçu le National Book Award pour ce roman, en 1970. (je dois dire qu'elle le mérite, mais je ne suis pas très objectif en ce qui concerne cette grande dame de la littérature). 

Pour ma part, c'est la deuxième fois que je me plonge dans les premiers écrits de Joyce Carol Oates (après "Haute enfance", il y a quelques années) et je dois dire que j'ai été quelque peu déconcerté. Je n'ai pas totalement retrouvé le "style" de Joyce Carol Oates (les thèmes, eux, sont bien là, mais j'y reviendrai plus tard) qui m'avait tant fasciné, ce qui fait que j'ai eu du mal à me retrouver en terrain connu  dans ce livre. Tout ça est simplement dû à la traduction. Quoi qu'on en dise, un traducteur/trice, quoiqu'essayant d'être le plus fidèle au texte, y met sa propre patte, laissant un peu de son empreinte. J'ai été de suite charmé et happé par le "style" de Oates, version Claude Seban. Je trouve que cette dernière à su trouver le style qui fera mouche à chaque fois. En même temps, ayant lu plus des derniers livres de Oates, c'est au regard de Claude Seban auquel j'ai eu droit. C'est donc, normal, que j'y vois le style de l'auteure. 
Là, j'ai trouvé cela un peu plus facile d'accès, mais je n'ai pas totalement retrouvé la puissance de Oates. En même temps, Eux est l'un de ses premiers romans. Peut être n'avait elle pas toute la maîtrise de son art...même s'il est là en filigrane. 

En fait, Eux fut une frustration, à chaque moment de lecture. On retrouve bien les thèmes chers à Mrs Oates: le meurtre, le sexe dans ce qu'il a de plus dur et sombre (ici la prostitution), la pauvreté, le racisme, dans ce qu'il a de plus cru (il ne faut pas être choqué par certaines expressions des personnages comme Loretta: il n'est tout simplement que le reflet de la société américaine) afin de dresser le portrait d'une famille ouvrière qui va vivre dans le malheur le plus absolu. La psychologie des personnages est formidablement dessinée par Oates, mais tout cela est englobé dans un mélange de scènes qui n'ont que la famille Wendall en  commun. 

Surtout, Joyce Carol Oates, lance des scènes hallucinantes, comme le moment où Loretta, jeune fille de 16 ans (en 1937) se réveille en sursaut, avec le corps sans vie du garçon avec qui elle a passé la nuit, probablement tué par son frère, d'un coup de pistolet:j'ai été scotché à mon siège pendant plusieurs minutes me demandant ce qu'il allait advenir...et puis...tout ça retombe comme un soufflet, puisque Loretta s'enfuit, croise un flic qui va l'aider (Howard Wendall) et qu'elle épousera. Scène suivante: quelques années ont passé et on ne parlera jamais plus de ce jeune garçon tué. 
Et beaucoup de scènes provoquant un choc au lecteur se termineront souvent en queue de poisson, laissant le lecteur que je suis, frustré. Surtout que les personnages n'ont pas eu l'air de m'être sympathique: que ce soit Loretta, Maureen ou Jules (ce sont principalement sur ces trois membres de cette famille qu'on se focalise), tous sont un peu désespérants. 

Alors, ne vous attendez pas à un livre rempli d'actions, vous seriez déçu. C'est plus une radiographie psychologique d'une famille américaine sur près de 30 ans. Il y a forcément des moments de fulgurances stylistiques (c'est Oates tout de même, c'est donc très bien écrit)  qui m'ont énormément plu, mais la frustration ressenti par ces moments d'action inachevée, fait que je ne mettrai pas ce livre dans mes préférés de Mrs Oates. Je pense même que si Mrs Oates n'était pas derrière ce roman, la lecture en aurait été encore plus fastidieuse. 

En faisant cette constatation, je remarque que la découverte d'un auteur(e) doit beaucoup dans le choix du livre que l'on fait pour savoir si on va l'apprécier ou pas. Je pense que si je découvrais la plume de Mrs Oates par le roman Eux, mon admiration pour ses écrits n'aurait pas eu la même saveur et je ne sais pas si j'aurai eu envie de continuer à la découvrir. 
Heureusement, mon parcours fut tout autre, et je pense que mon ressenti sur ce livre  (roman qui me frustre mais dont j'ai pris plaisir à le découvrir car c'est Mrs Oates) aurait été totalement différent, si Blonde n'était pas entré dans ma vie, il y a 8 ans. 
De toute façon, mon voyage littéraire avec Mrs Oates est loin d'être fini. 

Joyce Carol Oates: Eux, (Them), Points, collection "Signatures", 650 pages, 1971



2 commentaires:

  1. Et comme la dame est assez prolixe tu auras de quoi te rattraper, il y a longtemps que j'ai ouvert un de ses livres, il me reste toujours La fille du fossoyeur dans ma PAL!

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    1. Tu as tout à fait raison. D'ailleurs, il est tout à fait normal qu'il y ait des romans qui me plaisent plus que d'autres. Et j'ai encore de belles heures de lectures avec elle. J'ai moi aussi "La Fille du fossoyeur qui traine dans ma monstrueuse PAL. Peut être le sortirai je cette année, car j'ai décidé de lire plus régulièrement les romans de Mrs Oates...sinon, je n'aurai pas assez de toute une vie pour tous les lire.

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