mardi 6 avril 2010

Freedomtown



Résumé: Brenda Martin habite Gannon, la ville blanche qui jouxte les tours de Dempsy, une cité à majorité noire de la grande banlieue new©yorkaise. Par une lourde soirée de juin, la jeune femme échoue, hagarde, les mains en sang, à l'hôpital de Dempsy. Elle déclare à la police qu'elle rentrait chez elle en voiture lorsqu'elle a été arrêtée par un Noir, qui l'a éjectée de son véhicule, au volant duquel il s'est enfui. Avec, sur le siège arrière, Cody, quatre ans, le fils de Brenda. C'est Lorenzo Council, un inspecteur asthmatique, patriarche de cette communauté noire au sein de laquelle il est né, qui recueille sa déposition. Très vite, il y relève un certain nombre de contradictions. Avec son passé de toxicomane et de déséquilibrée, Brenda dit elle la vérité ? A la suite de ce tragique événement, les policiers de la ville blanche bouclent la ville noire, la presse s'empare de l'affaire et la tension monte. Entre Gannon et Dempsy, le contentieux est déjà lourd, et Lorenzo Council sait que l'explosion est imminente. Prêt à tout, il se résout à faire appel à Jesse Haus, une jeune journaliste blanche ambitieuse, mais née elle aussi dans un quartier défavorisé. Comme Lorenzo, Jesse soupçonne Brenda de ne pas avoir tout dit. Flairant le scoop, elle tente de gagner la confiance de la jeune mère. Mais la vérité ne peut être simple car le personnage de Brenda est complexe. Son histoire se tisse peu à peu. Une histoire qui ne s'écrit ni en noir ni en blanc...

(L'image de couverture du livre n'est pas la mienne (j'ai une édition France Loisirs). Mais comme je ne l'ai pas trouvée, j'ai pris celle des éditions 10/18)

Mon avis: Ville noire, ville blanche est un polar atypique. Avec un style sec, nerveux et des dialogues taillé au couteau - on ressent d'ailleurs, la patte du scénariste de La couleur de l'argent - , Richard Price nous raconte l'histoire d'une Amérique fait de clivage entre les noirs et les blancs, avec comme décor, la banlieue new yorkaise qu'il connait bien.

Toutes les tensions que l'on ressent dans le livre, exacerbées au possible ne sont le fait que d'une personne: Brenda. C'est par elle que le conflit, blancs-noirs va faire peu à peu exploser la ville. En affirmant qu'un noir lui a volé sa voiture dans laquelle se trouvait son fils de 4 ans Cody, elle va mettre les flics sous pressions et la ville de Dempsy va se retrouver bloquée. Les noirs n'ont plus le droit de sortir de leur "cité", faisant de leur quartier un ghetto.

Trois personnages vont se détacher du lot des nombreux personnages qui "habitent" ce roman:
Brenda, la victime qui va se dévoiler progressivement jusqu'à la terrible vérité. C'est un être fragile qui ne se rendra pas compte du tort qu'elle va faire aux habitants des quartiers de Dempsy et de Gannon.
Lorenzo Council, flic noir, surnommé par tous les gens du quartier black: Big Daddy, nous montre un être torturé par sa vie chaotique: séparé de sa femme, un fils en prison, mais ayant toujours à coeur de bien faire son métier et de venir en aide aux victimes qui en ont besoin: il va mener les recherches du gamin et s'occuper de Brenda, malgré qu'il sent qu'elle lui cache quelque chose.
Jesse Haus, journaliste, n'ayant que son boulot en tête. en clair, il est toute sa vie et elle ferait tout pour un scoop. C'est comme ça qu'elle va croiser la route de Brenda et faire amie amie avec elle pour ce fameux scoop. Sauf que ce qu'elle va découvrir va tout remettre en question.

Ce qui rend ce polar atypique que j'ai beaucoup aimé -mais qui m'a aussi beaucoup frustré à chaque fois que je devais poser le livre à contre coeur car d'autres activités,- professionnelles le plus souvent- me rappelaient à l'ordre-, c'est que l'enquête criminelle n'est qu'un prétexte- d'ailleurs on aura le fin mot de l'histoire 200 pages avant la fin.
L'enquête n'est là que pour nous montrer le racisme présent à chaque instant: Les blancs n'ont jamais vraiment accepté que les noirs vivent en liberté dans leur ville.
Certains personnages noirs , disent même que la police n'aurait pas fait tout ce ramdam si l'enfant à retrouver était noir: le quartier n'aurait pas été bouclé, des arrestations de noirs n'auraient pas eu lieu pour essayer de retrouver l'agresseur.
Ce que raconte ce livre, c'est l'affrontement de deux Amériques, les souffrances, les douleurs. Jusqu'à l'explosion finale lors d'une marche organisée par le révérend Longway du quartier blanc, Gannon. Peut être n'auraient t-ils pas dû traverser la frontière: le parc où l'agression à eu lieu. Ce fameux parc qui se situe entre Gannon (quartier blanc) et Dempsy (quartier noir).

Ville noire, ville blanche est un polar qu'on ne peut lâcher avant d'avoir eu le fin mot de l'histoire. Et dès la dernière page tournée, les réflexions et les questionnements se bousculent dans notre tête. On ne sort pas indemne de cette histoire. Surtout quand elle s'est joué devant nos yeux (car ce livre est écrit comme un film. Un film que j'aurai bien aimé voir dans une salle de cinéma). Je me demande d'ailleurs pourquoi j'ai laissé ce livre dormir trois ans dans ma PAL. L'erreur est enfin réparée et je vous conseille de découvrir la plume nerveuse et sans concession de Richard Price. Elle m'a laissé plus d'une fois hors d'haleine et sans voix.

Richard Price: Ville noire, ville blanche, (Freedomland), France Loisirs, 718 pages, 1998

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